Intervention de Marta de Cidrac

Réunion du 4 juillet 2018 à 14h30
Lutte contre les violences sexuelles et sexistes — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Marta de CidracMarta de Cidrac :

Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, madame la présidente de la délégation aux droits des femmes, madame la rapporteur, chère Marie, mes chers collègues, membre du bureau de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes du Sénat, c’est avec espoir et attention que j’ai étudié puis amendé ce projet de loi dont on ne peut qu’approuver les intentions, puisqu’il vise à lutter contre certaines violences sexuelles et sexistes.

Je ne reviendrai pas longuement sur l’article 1er du projet de loi. Ses dispositions me paraissent adéquates et conformes aux attentes des victimes.

En effet, l’allongement du délai de prescription pour les infractions sexuelles commises sur les mineurs participe d’une véritable reconnaissance de la difficulté pour une victime de ces agressions de les admettre et de porter plainte. Allonger à trente ans la durée de la prescription en la rendant identique à celle qui s’applique, entre autres, aux crimes de guerre démontre aux victimes l’importance accordée à leur souffrance.

L’article 2, visant à renforcer la répression des infractions sexuelles commises à l’encontre des mineurs, qu’il s’agisse de viols ou d’agressions sexuelles, et tendant à élargir la surqualification pénale d’inceste, doit être examiné avec beaucoup d’attention et de délicatesse.

La proposition de la commission des lois visant à créer une présomption de contrainte en inversant la charge de la preuve en matière de viol sur mineurs mérite d’être examinée avec intérêt, car elle introduit la notion d’incapacité de discernement du mineur et la différence d’âge significative.

Cela laisse entendre également que c’est à la personne majeure de faire preuve de discernement. Cette disposition est primordiale et a toute mon approbation, car elle permet de protéger les victimes mineures, toutes les victimes mineures sans seuil d’âge.

En ce qui concerne la création d’une contravention pour outrage sexiste, je note que le texte lui accorde une véritable place dans notre code pénal, ce que le projet de loi initial ne s’était pas résolu à déterminer.

Peut-être les violences dont sont victimes les femmes et parfois les hommes dans la rue, les transports en commun, au travail, à la maison, cesseront-elles enfin d’être considérées comme anecdotiques. Il est important, ne serait-ce que d’un point de vue moral, de leur accorder une véritable considération.

Cette infraction permettra de faire prendre conscience aux auteurs de la gravité de l’agression dont ils se rendent coupables, et ce serait déjà un bon début. Pour que la dissuasion soit effective, je suis favorable à la transformation de la contravention en délit.

Cependant, je doute que la création de cette infraction soit réellement dissuasive ou que le paiement d’une amende et, éventuellement, l’accomplissement d’un stage soient suffisants pour empêcher la récidive.

Il me semble plutôt que, pour ce qui est des insultes, des sifflets, des moqueries, il est avant tout question d’éducation et de prévention.

Nous devons avoir à cœur de protéger les victimes d’agressions sexuelles ainsi que les victimes de sexisme, j’y suis particulièrement sensible et je sais que, dans cet hémicycle, nous le sommes tous.

Vous l’aurez compris, j’ai tout de même un certain nombre de réserves à émettre sur ce texte, et la première d’entre elles est son manque d’ambition sur un point essentiel. Un volet est totalement absent du projet de loi, madame la garde des sceaux, madame la secrétaire d’État : qu’en est-il de la lutte contre l’inégalité salariale entre les hommes et les femmes à compétences et à poste égaux ? Ne pensez-vous pas qu’il s’agit également là d’une violence sexiste à l’égard des femmes ?

Vous nous l’avez rappelé, madame la garde des sceaux, le président Emmanuel Macron déclarait, le 25 novembre dernier, à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, que l’égalité entre les femmes et les hommes serait la « grande cause du quinquennat ». J’avais formé à cet égard beaucoup d’espoirs.

Peut-être le Gouvernement compte-t-il agir en ce sens dans les prochains mois ? Nous l’espérons. Si tel est le cas, vous pourrez compter sur l’engagement et la détermination des sénatrices et des sénateurs de cet hémicycle pour répondre aux questions que soulève ce sujet majeur.

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