Madame la présidente, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, je tiens à apporter quelques éléments de réponse à certaines de vos interventions.
Monsieur le président de la commission des lois, vous avez tout à fait raison de rappeler que notre droit est déjà fourni en ce qui concerne non seulement la protection de l’enfance, mais aussi, plus largement, la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. C’est précisément parce que notre droit est déjà fourni en la matière que le projet de loi dont nous débattons aujourd’hui est court. C’est aussi parce que la loi est déjà dense que nous entendons travailler sur ce qui, dans le passé, voilà encore dix, vingt ou trente ans, pouvait sembler indicible ou relever de la fatalité et qui, désormais, entre dans les radars des politiques publiques. Je pense notamment au harcèlement de rue ou aux phénomènes de raid numérique et de cyberharcèlement. Je vous remercie donc de ce rappel. J’y insiste, c’est justement parce que notre droit est fourni que ce projet de loi est un texte court et, je pense, efficace.
Il nous a été adressé une interpellation sur la question de l’éducation. J’avais déjà eu l’occasion de m’exprimer à cet égard. Le projet de loi que nous portons, avec Nicole Belloubet, vise à renforcer la condamnation des violences sexistes et sexuelles. C’est vraiment l’objet de ce texte. Il n’y a pas de volets préventifs, parce que ces derniers soit sont déjà dans la loi, soit relèvent de politiques publiques et pas du législatif. S’ils sont absents du projet de loi, cela ne veut pas dire qu’ils soient absents de l’action du Gouvernement. Je pense notamment à la mise en œuvre de lois déjà existantes.
Vous le savez toutes et tous, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, la loi prévoit que l’éducation à la vie affective et sexuelle fait partie des sujets abordés dans le monde éducatif. Cette loi n’est pas mise en œuvre. Nous avons travaillé, avec Jean-Michel Blanquer, sur un audit depuis maintenant plusieurs mois, mené auprès des établissements et des rectorats, qui nous a révélé ce que nous pressentions déjà et qui nous était remonté par les acteurs de terrain, à savoir que cette loi n’est pas mise en œuvre. Nous avons donc lancé une circulaire à l’adresse des recteurs, demandant à chacun de faire appliquer cette loi, qui prévoit trois séances d’éducation à la vie affective et sexuelle par année scolaire. Nous leur avons aussi adressé un catalogue mentionnant l’ensemble des associations qui ont un agrément pour intervenir en milieu scolaire. Nous avons par ailleurs relancé une tournée d’interpellations auprès des associations, afin que ces séances puissent être mises en œuvre et menées réellement par des personnes compétentes et spécialistes.
En outre, nous créons des référents « égalité » : à partir de la prochaine rentrée scolaire, un référent ou une référente « égalité » sera présent dans chaque établissement scolaire, notamment pour prévenir et lutter contre les violences sexistes et sexuelles. Avec la mallette des parents, nous communiquerons avec les parents sur ces questions de manière très claire.
Vous le voyez, il y a une volonté, de la part de mon collègue Jean-Michel Blanquer et de la mienne, d’agir pour l’éducation face aux violences sexistes et sexuelles, même si la question ne relève pas du présent projet de loi.
De la même manière, vous avez appelé notre attention sur les dispositions concernant l’égalité salariale. Par définition, celles-ci ne figurent pas dans un texte qui vise à mieux condamner les violences sexistes et sexuelles. Néanmoins, nous avons pris un certain nombre de dispositions importantes, qui ont été, il est vrai, très peu relayées dans les médias, et je le déplore, dans le cadre du projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, défendu par Muriel Pénicaud. Une fois que la loi sera promulguée, du moins si la mesure votée à l’Assemblée nationale est maintenue, les employeurs des entreprises les plus importantes auront l’obligation de calculer et de publier les écarts de salaires. C’est un pas important vers la transparence des inégalités salariales entre les femmes et les hommes. Ces employeurs disposeront alors de trois ans pour résorber ces écarts de salaires ; passé ce délai, ils s’exposeront à des pénalités financières.
Ce sont des dispositions très importantes. Cela fait plusieurs générations que les inégalités de salaires entre les femmes et les hommes sont interdites par la loi. Mais cela fait aussi des générations que la loi n’est pas appliquée et que l’écart des salaires entre les femmes et les hommes oscille entre 9 % et 27 %. Le Gouvernement a pris ces dispositions pour lutter fermement contre de telles inégalités. Ce sont des dispositions législatives. Je vous fais grâce des dispositions des politiques publiques, afin que nous ayons le temps d’entrer dans le cœur des débats, mais je suis bien sûr à la disposition de toute sénatrice ou de tout sénateur qui souhaiterait que nous puissions évoquer ce sujet en parallèle.
Madame de la Gontrie, vous avez fait l’inventaire de ce qui a pu être fait par les précédents présidents de la République, que nous saluons tous, ainsi que leurs ministres respectifs. Je me permets d’ajouter, pour que l’inventaire soit complet, deux textes importants qui n’ont pas été cités : d’une part, évidemment, la loi de Najat Vallaud-Belkacem, qui a apporté de nombreuses avancées pour l’égalité entre les femmes et les hommes ; d’autre part, la loi Copé-Zimmermann, qui a permis de faire progresser la France sur les questions touchant à la place des femmes dans la gouvernance des entreprises.
On dit, en Corse, que c’est à la fin de la cueillette que l’on compte les figues. Il est donc un peu tôt, six mois après le lancement de la grande cause du quinquennat, pour faire un bilan de celle-ci, puisque, comme son nom l’indique, elle est quinquennale. Je propose que nous fassions le bilan et le droit d’inventaire à la fin du quinquennat. D’ores et déjà, un certain nombre de dispositions ont été prises et sont en cours de mise en œuvre. Sont ici en débat l’allongement des délais de prescription, le harcèlement de rue, la meilleure condamnation des violences sexuelles. Je pense aussi aux contrats locaux en matière de lutte contre les violences conjugales, mis en place, dans chaque département, sur notre initiative, autour des préfets. Il y aura un partage d’informations entre la police, la justice, les travailleurs sociaux, les élus locaux, afin de mieux repérer, en amont, les femmes victimes de violences conjugales et intrafamiliales et de pouvoir les écarter du domicile conjugal.
Vous avez mentionné la Constitution. Les députés de la majorité, avec le Gouvernement, proposent d’inscrire l’égalité des sexes dans la Constitution. Je ne reviendrai pas sur les dispositifs prévus en termes d’égalité salariale. Je mentionnerai le congé maternité pour toutes les femmes, dont nous avions eu l’occasion de débattre au Sénat. C’est à mes yeux une avancée importante que de protéger l’ensemble des femmes dans leur maternité, quelle que soit la profession ou le statut qu’elles exercent, notamment pour les agricultrices et pour les professions libérales.
Je crois, madame de la Gontrie, avec tout le respect que je vous dois, que vous confondez le congé parental et le congé de paternité.