Je voudrais dire ma déception de voir que l'on ne souhaite pas faire aboutir cette CMP. Les agriculteurs avaient mis beaucoup d'espoir dans les EGA ainsi que dans le discours de Rungis du Président de la République. Ils attendaient deux choses : une rémunération plus importante du fruit de leur travail et une meilleure reconnaissance. Aujourd'hui à quoi assiste-t-on ?
Le titre Ier pouvait donner un semblant d'espoir de remontée des prix, conduisant les grandes surfaces à rémunérer correctement les agriculteurs, même si je rappelle que les premières sont organisées en trois centrales d'achat qui font face à 13 000 fournisseurs. Je suis gêné que le Gouvernement ne veuille pas dire clairement ce qu'il entend faire sur l'article 8, d'autant plus que la transparence comme la possible sortie pour les coopérateurs relèvent du domaine réglementaire et qu'il n'y a donc pas besoin de la loi pour faire, si c'est bien ce que l'on veut. Or, les coopératives sont la capacité de faire ensemble quelque chose et les sorties individuelles, pour convenance personnelle, après s'être engagé, parce que telle ou telle chose ne vous plaît plus, ne sont pas conformes à leur esprit. L'intérêt général n'est pas la somme des intérêts particuliers et je m'étonne que le rapporteur de l'Assemblée nationale, qui a été président de coopérative, ne s'en rappelle pas.
Le titre II a été le défouloir d'une société qui ne sait pas ce qu'elle veut : d'un côté une agriculture hyper-protectrice de l'environnement mais de l'autre des décisions gouvernementales qui vont plutôt dans le sens d'une ouverture des marchés pour acheter des produits provenant d'autres continents dans lesquels aucune des règles que nous voudrions faire respecter chez nous n'est appliquée. On nous demande à nos agriculteurs de courir le 100 mètres avec des boulets aux pieds...
Je ne vois pas comment, par principe, on supprimerait les remises, rabais et ristournes pour les agriculteurs. Qui achètera plus cher ce qu'il peut obtenir moins cher ? Et comment expliquer que l'on supprime ces remises, rabais et ristournes quand certains ont pu bénéficier, lors de campagnes électorales, de remises sur la location de salles ? Je trouve que c'est une injustice vis-à-vis du monde agricole, mais aussi - en particulier les articles 14 et 15 - une insulte à l'intelligence agricole. Depuis bien longtemps, les agriculteurs n'utilisent pas ces produits pour le plaisir, ils les emploient de la manière la plus technique possible et au moment le plus opportun, pour la simple et bonne raison qu'ils les paient !
Je crois que nous serons passés à côté de l'objectif : celui de faire une vraie loi économique au bénéfice de l'agriculture du XXIe siècle, d'une bonne alimentation et qui fasse la fierté de nos agriculteurs Pour moi qui suis agriculteur avant d'être sénateur, un échec de cette CMP créerait un profond désespoir. Une fois de plus, nos agriculteurs sont sur le banc des accusés alors que l'agriculture française irrigue la totalité de nos territoires et qu'elle est l'une des meilleures au monde sur le plan de la qualité nutritionnelle et sanitaire.