La philosophie même du référé tel qu'il nous est proposé pose problème - et non le délai de 48 heures. Une fois la loi entrée en vigueur, le juge ne pourra pas tout faire. Comment définir des faits influençant un scrutin à venir ? Dans tout contentieux électoral français, le juge électoral se prononce a posteriori pour établir ces faits. Affirmer que Christophe-André Frassa détient un compte à Monaco, est-ce de nature à influencer le vote ? Bien malin le juge qui peut décider ex ante une potentielle influence... Tous les magistrats que nous avons auditionnés peineraient à se « dépatouiller » d'un tel objet juridique.
Ce référé pourrait être demandé par toute personne « ayant qualité à agir ». N'importe quelle association d'hurluberlus se créera ad hoc, créera le buzz et sera génératrice de fake news. On sait qui sont le ministère public, le candidat et le parti politique, mais pas ces personnes-là... C'est la porte ouverte à n'importe quoi ; ce référé est boiteux dès le départ. Ces deux points sont source d'incertitude et de danger.
La loi gère déjà les plateformes. La loi allemande a comme conséquence une autocensure absolue. Dès qu'il y a le moindre soupçon sur une publication qui ne serait pas politiquement correcte, elle disparaît. Veut-on aller jusque-là ? Ce n'est pas la société dans laquelle je veux vivre. Je ne veux pas vivre dans ce « Canada des Bisounours », et préfère dire comme Portalis : « Il ne faut point de lois inutiles ; elles affaibliraient les lois nécessaires ».