Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous voici donc au terme d’un débat ô combien médiatique, dont nous avons été saisis plusieurs fois ces derniers mois : d’abord à l’occasion de l’examen de la proposition de loi de M. Bas, à la suite de la mission d’information conduite par Mme Mercier, puis par le Gouvernement, qui nous a présenté le mois dernier un projet de loi largement revu après l’avis du Conseil d’État.
Réunie au Sénat lundi dernier, la commission mixte paritaire est parvenue à un accord, en reprenant largement les dispositions adoptées par la Haute Assemblée. Pour ce qui est du contenu du texte, nous sommes plutôt satisfaits, celui-ci ayant été, selon nous, amélioré par le Sénat.
En effet, même si le texte final ne retient pas la promesse initiale du Gouvernement qui établissait un seuil de non-consentement à un acte sexuel pour les mineurs de moins de quinze ans, il ne reprend pas non plus le très polémique délit d’atteinte sexuelle avec pénétration qui pouvait laisser craindre que l’on ne minore les faits de viol. Cette disposition a été supprimée dès la discussion générale au Sénat par Mme la secrétaire d’État.
La commission des lois et la majorité sénatoriale ont cependant clarifié la définition du viol en ajoutant une notion de présomption de contrainte qui tient compte de la différence d’âge entre le mineur et le majeur, ainsi que de la vulnérabilité et du discernement du mineur. Cette mesure a été préférée à la création d’un crime de violence sexuelle sur enfant soutenue par la délégation aux droits des femmes du Sénat et plusieurs sénatrices du groupe CRCE.
Si l’ensemble de mon groupe ne partageait pas forcément toutes les demandes des associations sur le sujet, en particulier l’aggravation des peines, nous sommes unanimes sur un point : ce texte amélioré par le Sénat reste bien en deçà de ce que la lutte contre ce fléau exige.
Alors que le Gouvernement a fait de l’égalité entre les femmes et les hommes la grande cause nationale de cette année, cette cause recouvrant la lutte contre violences faites aux femmes, il a pour le moins manqué d’ambition – n’est-ce pas Mme la secrétaire d’État ? – en présentant au Parlement un tel projet de loi, qui n’aborde le sujet que sous le seul angle répressif.
De manière générale, le Gouvernement, comme la majorité des parlementaires, s’est employé à aggraver les peines en matière de délits et crimes sur mineurs, ne portant que très peu d’intérêt à la prévention et à l’éducation.
Or le sujet de l’égalité entre les femmes et les hommes, tout comme celui de la protection des mineurs, ne saurait être circonscrit au seul angle répressif. Les volets préventif et éducatif doivent être exploités bien davantage. Ils sont la clé du mieux vivre ensemble et de l’évolution des mœurs.
En ce sens, nous nous félicitons de l’adoption de quelques-uns de nos amendements. Je pense en particulier à celui qui tendait à renforcer l’article L. 312-16 du code de l’éducation, lequel dispose que trois séances d’éducation à la sexualité doivent être dispensées chaque année dans les écoles, les collèges et les lycées.
L’éducation à la sexualité constitue un levier de lutte contre les discriminations. Elle doit être non pas réduite aux seules dimensions physiques et biologiques, mais appréhendée de manière globale.
L’éducation doit contribuer, dès le plus jeune âge, à détruire stéréotypes et préjugés, mais nous sommes aujourd’hui encore loin du compte. Aussi, s’il est besoin de légiférer, c’est selon nous essentiellement en ce sens.
Toujours plus de répression ne réglera rien au fléau des violences faites aux femmes ou aux enfants si le problème n’est pas pris dans son ensemble. Or cela ne pourra prendre forme qu’avec la discussion d’un projet de loi-cadre sur le sujet, dessein que nous soutenons depuis un certain nombre d’années avec les associations féministes, notamment le Conseil national pour le droit des femmes.
Enfin, alors qu’une importante réforme de la justice sera discutée – en tout cas nous l’espérons – dès cet automne, j’alerte l’ensemble de nos concitoyens sur cette conception du droit pénal, qu’il s’agirait de modifier sans cesse au gré des faits divers pour aggraver les sanctions, sans tenir compte ni du sens ni de l’échelle des peines. C’est pourquoi les sénatrices et sénateurs du groupe communiste républicain citoyen et écologiste s’abstiendront sur ce texte.