À mon tour de féliciter nos rapporteurs. Lors de la première lecture, notre rapporteur espérait pouvoir changer les choses. Je n'y croyais pas et, hélas, la suite m'a donné raison. La première lecture avait déjà servi de défouloir aux députés de la majorité, sur le plan des contraintes, et ressemblait davantage à une discussion de comptoir qu'à une vraie réflexion pour améliorer le revenu des agriculteurs. La nouvelle lecture ajoute encore des contraintes à une profession qui criait pourtant son désarroi déjà bien longtemps avant les États généraux de l'alimentation et disait son ras-le-bol de travailler plus de soixante-dix heures par semaine sans en récolter les fruits, d'être sans cesse montrés du doigt, traités de pollueurs ou de profiteurs des aides de l'Europe, sans être capables d'évoluer vers un nouveau modèle.
Cette loi accentue les paradoxes dont le nouveau monde de la macronie est coutumier : je pense au déséquilibre de puissance entre les 12 000 fournisseurs et les cinq ou six centrales d'achat qui permet à la grande distribution d'avoir la mainmise totale sur les produits qu'elle vend. Or, la loi en rajoute en refusant le plafonnement des pénalités de retard, ce qui permettra à des pratiques, sinon maffieuses, du moins très irrespectueuses des fournisseurs, de perdurer.
Autre paradoxe : ce texte impose de nouvelles contraintes à nos agriculteurs alors que nos marchés s'ouvrent toujours davantage à une concurrence qui ne respecte ni nos normes, ni nos méthodes de production.
Le ministre d'État, ministre de l'écologie et, si j'ose dire, ministre par intérim de l'agriculture sur ce texte a largement contribué à ce défouloir des contraintes environnementales. Dans cette écologie punitive, on ne cesse de donner des leçons à tout le monde, sans parfois d'ailleurs se les appliquer à soi-même. Mais croyez-vous qu'à vouloir rendre notre pays soi-disant plus vertueux, nos voisins vont suivre notre exemple ? Arrêtons de nier les réalités économiques.
La CMP à laquelle j'ai participé a été un condensé de l'état d'esprit de la macronie : des certitudes, des obstinations et une absence totale d'écoute. Après la grande illusion, la réalité apparaît : le nouveau monde ne comprend rien aux réalités économiques ni aux évolutions du monde : quand demain notre terre comptera 9 milliards d'habitants, la France devra acheter de quoi se nourrir à l'étranger, car son agriculture aura disparu sous le poids de toutes ces contraintes.