Je souhaite apporter quelques précisions au sujet de cet amendement.
Celui-ci vise à supprimer la possibilité pour le tribunal de l’application des peines de relever ou de réduire au bout de trente ans la période de sûreté illimitée qui couvre une peine à perpétuité. Des amendements similaires ont déjà été rejetés à propos de la perpétuité réelle applicable aux terroristes dans le cadre de l’examen de la loi du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé.
En effet, le fait de supprimer pour le tribunal de l’application des peines la possibilité de relever cette période de sûreté est contraire à notre Constitution, ainsi qu’à la Convention européenne des droits de l’homme. Dans sa décision du 20 janvier 1994, le Conseil constitutionnel a rappelé que l’exécution des peines privatives de liberté en matière correctionnelle et criminelle a été conçue non seulement pour protéger la société et assurer la punition du condamné, mais aussi pour favoriser l’amendement de celui-ci et préparer son éventuelle réinsertion.
Aussi, si le Conseil n’a pas déclaré la peine de perpétuité incompressible, prévue par les dispositions des articles 221-3 et 221-4 du code pénal, contraire au principe de nécessité des peines, c’est en raison de la procédure prévue justement par les dispositions de l’article 720-4 du code de procédure pénale, qui permet le réexamen de la situation du condamné par le tribunal de l’application des peines à titre exceptionnel et à l’issue d’une période minimale de trente ans, lorsque le condamné manifeste des gages sérieux de réadaptation sociale.
De plus, si l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme n’interdit pas aux États d’infliger des peines perpétuelles aux auteurs d’infractions graves, la Cour européenne, quant à elle, exige que soient prévues la possibilité d’un réexamen et une chance d’élargissement de la peine au moins après trente ans. L’impossibilité d’un réexamen par l’autorité judiciaire de la peine dans la perspective de la commuer, de la suspendre, d’y mettre fin ou de la poursuivre, est contraire aux dispositions de l’article 3 de la convention prohibant les peines et traitements inhumains et dégradants.
Il ne paraît donc pas possible, sous peine de constituer un traitement inhumain et dégradant, de ne pas prévoir un réexamen d’une peine au-delà de trente ans.