Intervention de Loïc Hervé

Réunion du 23 octobre 2018 à 14h30
Accueil des gens du voyage — Adoption définitive en deuxième lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Loïc HervéLoïc Hervé :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, un an après le vote d’un texte au Sénat, nous sommes amenés à débattre à nouveau ce soir, en deuxième lecture, de la question de l’accueil des gens du voyage et de la lutte contre les installations illicites.

Comme auteur de l’une des deux propositions de loi initiales, tout comme l’était notre ancien collègue Jean-Claude Carle – Cyril Pellevat en était le premier signataire –, je me sens une responsabilité particulière dans ce débat. En effet, chacun ici a conscience que la situation reste critique, et l’année qui s’est écoulée n’a pas vu d’amélioration. Les entreprises, les agriculteurs, les élus locaux, les forces de l’ordre, les magistrats sont, pour nombre d’entre eux, épuisés et exaspérés par des situations qui durent et se répètent. Il faut entendre cet appel à l’aide et y répondre autant que possible.

À titre d’exemple, je pourrais vous parler de la Haute-Savoie, où les maires réunis en congrès départemental samedi dernier ont encore manifesté leur ras-le-bol, publiquement et ouvertement. L’association départementale n’a eu de cesse de nous alerter sur l’urgence et d’alimenter les parlementaires d’informations sur les situations rencontrées. Avec mes deux collègues, Cyril Pellevat et Sylviane Noël, qui interviendront également dans la discussion générale et qui, je n’en doute pas, abonderont dans mon sens, je veux me faire le porte-parole de ces élus.

Pour autant, si les auteurs des propositions de loi sont haut-savoyards et les sénateurs de ce département particulièrement vigilants sur ce sujet, la question se pose dans tout le pays. En témoignent les très nombreux collègues cosignataires de nos propositions de loi ou intéressés par le sujet.

J’en viens maintenant au texte que nous devons examiner.

Je voudrais remercier très sincèrement Mme le rapporteur Catherine di Folco pour le travail accompli, à la fois il y a un an, mais aussi depuis lors. C’est grâce à vous, chère collègue, que le Sénat a adopté un texte cohérent et robuste que l’Assemblée nationale, lors de son examen, a malheureusement soulagé de nombreuses propositions importantes.

Si l’on peut émettre des regrets, je voudrais à cet instant souligner, madame la ministre, que votre oreille a toujours été attentive et votre rôle positif, à la fois quand nous vous avons rencontrée place Beauvau, quand vous êtes venue dans notre département, en particulier dans le Genevois, et quand nous avons été amenés à évoquer ensemble ce texte et son destin.

Alors, mes chers collègues, je voudrais vous faire part de mon état d’esprit ce soir. Je voudrais d’abord regretter les mesures que nos collègues députés n’ont pas conservées. Ces mesures, que je ne citerai pas de manière exhaustive, sont de nature assez différente. On pourrait par exemple évoquer le rejet de la prolongation du délai de validité des mises en demeure des préfets de sept à quinze jours. C’est une demande du terrain, notamment de la part des agents de l’État. Il nous faudra y répondre !

Il faut aussi répondre à la question des « sauts de puce », à laquelle le président du Sénat Gérard Larcher est extrêmement sensible, d’autant qu’elle est très souvent évoquée lors des déplacements qu’il effectue dans nos départements.

Enfin, je crois qu’il était nécessaire de revisiter de fond en comble les obligations des communes, notamment dans les départements où les schémas départementaux ont produit l’essentiel de leurs effets et où les collectivités et intercommunalités ont aménagé, pour des coûts élevés, des aires d’accueil.

Toutes ces réflexions et les dispositions correspondantes pourront, à mon sens, trouver leur place dans un nouveau texte, permettant de poursuivre le débat avec l’Assemblée nationale sur nos points de désaccord. J’ai entendu, madame la ministre, que vous compreniez ce besoin, et c’est quelque chose que nous pourrons entreprendre au Sénat avec les collègues qui le souhaiteront.

Il y a aussi les mesures conservées. À elles seules, elles justifient que les membres du groupe Union Centriste s’orientent vers un vote conforme du texte.

Je voudrais d’abord insister sur les amendes forfaitaires délictuelles. C’est un dispositif qui va dans le même sens que la réforme de la justice que nous venons cet après-midi même d’adopter, en déjudiciarisant la procédure et en la rendant beaucoup plus opérationnelle, car nous la confions aux officiers de police judiciaire. Cette nouvelle procédure sera toujours plus efficace qu’une audience au tribunal correctionnel, qui ne peut avoir lieu au mieux que quelques mois après les faits, et seulement si l’affaire n’a pas été entre-temps classée sans suite par le parquet et qu’elle a été audiencée.

Il y a aussi le doublement d’un certain nombre de peines, laissant plus de marges encore aux procureurs pour mieux poursuivre et aux juges pour mieux juger.

Je citerai enfin la possibilité pour le maire d’une commune qui est en conformité avec le schéma départemental, mais qui appartient à un EPCI lui-même non conforme, de faire appel aux pouvoirs de police du préfet. Cette procédure de mise en demeure administrative de quitter les lieux est importante et réclamée par de nombreux élus, notamment en cas de fusion d’EPCI. En effet, je rappelle que, lorsque deux EPCI fusionnent, l’un conforme au schéma, l’autre non, le nouvel établissement est considéré comme non conforme et la commune qui bénéficiait de la possibilité de faire appel au préfet pour la mise en demeure administrative de quitter les lieux ne peut plus le faire. Il convient de corriger ce point de manière urgente.

Notre groupe est donc favorable à un vote conforme de la proposition de loi. Nous comprenons que certains collègues aient souhaité déposer des amendements, mais nous ne pourrons pas les soutenir aujourd’hui, car nous privilégions une adoption rapide de ce texte.

Notre groupe souhaite qu’une mission parlementaire de suivi soit lancée immédiatement pour permettre de s’assurer que la procédure des amendes forfaitaires délictuelles entre en vigueur très rapidement et que le principe non bis in idem ne s’oppose pas à l’efficacité du dispositif.

Notre groupe souhaite enfin, comme je le disais à l’instant, que le débat se poursuive sur les dispositions au sujet desquelles le Sénat et l’Assemblée nationale sont en désaccord.

Mes chers collègues, à quelques jours du congrès des maires, notre vote permettra d’envoyer un signal clair aux élus de tout le pays : le Sénat s’est de nouveau emparé de ce sujet. En adoptant maintenant cette proposition de loi sur l’accueil des gens du voyage et la lutte contre les installations illicites, nous enverrons aussi un message à M. le Président de la République, qui est chargé de promulguer les lois.

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