Intervention de Cyril Pellevat

Réunion du 23 octobre 2018 à 14h30
Accueil des gens du voyage — Adoption définitive en deuxième lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Cyril PellevatCyril Pellevat :

Je veux tout d’abord vous adresser toutes mes félicitations, madame la ministre, pour vos nouvelles fonctions à la tête de ce grand ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Je vous souhaite de réussir pleinement votre mission pour le bien-être de nos collectivités, vous savez qu’elles attendent beaucoup !

Je suis heureux de voir – enfin – revenir au Sénat cette proposition de loi relative à la lutte contre les installations illicites des gens du voyage, après un an d’attente. Mais je suis aussi très déçu de la réduction de son contenu. L’Assemblée nationale a supprimé les deux tiers des dispositions de notre texte. J’en déduis que l’ampleur de la situation sur le terrain est clairement sous-estimée par certains députés.

Je l’ai maintes fois répété : en Haute-Savoie, comme dans bien d’autres départements, nous sommes assis sur une véritable poudrière, qui peut s’embraser à tout moment. Les exemples d’altercation avec les élus et les agriculteurs sont trop nombreux.

Non, nous ne stigmatisons pas les gens du voyage, comme cela a pu être dit sur les bancs de l’Assemblée nationale ! Nous faisons une différence entre les gens du voyage qui respectent les règles – ils représentent une très large majorité – et ceux qui, au contraire, se comportent comme des délinquants et ne respectent ni les lois de la République ni les arrêtés des communes ou des EPCI. Bref, des vrais-faux gens du voyage, qui restent sur un périmètre d’une trentaine de kilomètres ! Ce sont ces derniers qui posent problème.

Avec mes deux collègues sénateurs, Loïc Hervé et Sylviane Noël, nous nous faisons les porte-parole des nombreux élus qui subissent des installations illicites, sans disposer de réels moyens d’action, et qui nous interpellent régulièrement tout au long de l’année.

Les installations n’ont pas seulement lieu pendant l’été ; elles se font durant des périodes qui sont de plus en plus longues, et la tension monte en puissance, allant parfois jusqu’à des incidents majeurs, comme nous en avons connus en Haute-Savoie où un maire et un gendarme ont été menacés avec une arme à feu.

Madame la ministre, les élus du territoire et les services de l’État sont investis dans leurs missions. La plupart des élus respectent les obligations légales décidées dans le cadre du schéma départemental des gens du voyage, mais certains groupes semblent s’affranchir des droits fondamentaux, tels que le droit de propriété, qui est régulièrement bafoué.

Des groupes se sont imposés dans le département par le nombre et la force, bien qu’un refus de séjour leur ait été notifié en début d’année, puis réitéré lorsqu’ils se sont annoncés la veille pour le lendemain. D’autres arrivent aussi à leur convenance, méconnaissant les dates officielles de réservation.

Les élus locaux sont condamnés à passer nuit et jour à gérer les installations illicites, à subir les invectives, les menaces, les intimidations et à constater des dégradations sur des terrains de foot ou des aménagements municipaux, sans jamais pouvoir se retourner contre ceux qui dégradent volontairement ces espaces. Ils doivent aussi gérer les interrogations de la population, qui fustige une justice à deux vitesses et estime nos lois trop permissives.

Les propriétaires de terrains privés, chefs d’entreprise ou particuliers, ne comprennent pas que l’on puisse s’installer en toute impunité sur leur terrain et qu’il leur revient d’entamer des procédures longues et coûteuses.

Les agriculteurs subissent des dégradations de leur outil de travail avec toutes les nuisances que cela entraîne : pertes de récoltes, dégâts dans les champs dus aux détritus – lames de rasoir, déchets plastiques, etc. – qui peuvent nuire aux appellations d’origine contrôlée…

Nous sentons également sur le terrain l’exaspération des forces de gendarmerie, qui sont mobilisées avec des effectifs limités, face à de grands groupes et pendant des périodes de plus en plus longues.

Devant ce constat, tous les acteurs concernés espéraient un vote rapide et conforme dans chaque chambre. La proposition de loi n’était pas partisane et comportait des mesures utiles. Je souhaite remercier, à cet instant, ma collègue Catherine Di Folco pour la qualité de son rapport.

Malheureusement, l’examen à l’Assemblée nationale fut surprenant : le texte a été entièrement détricoté. La proposition de loi qui nous revient en deuxième lecture est donc bien différente de celle que nous avions votée. Les députés de la majorité ont choisi de la vider en grande partie, je ne peux que le regretter.

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