Intervention de Vincent Segouin

Réunion du 21 novembre 2018 à 14h30
Élection des sénateurs — Rejet d'une proposition de loi organique

Photo de Vincent SegouinVincent Segouin :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis 2011, l’âge d’éligibilité des sénateurs est fixé à vingt-quatre ans, alors que celui du Président de la République, des députés et des autres élus a été abaissé à dix-huit ans. Ce seuil de vingt-quatre ans a été défini pour donner l’opportunité aux sénateurs, représentants des collectivités territoriales au sens de l’article 24 de la Constitution, d’exercer un mandat local avant d’entrer au Palais du Luxembourg.

La proposition de loi organique n° 744 relative à l’élection des sénateurs, présentée par notre collègue André Gattolin, a pour objet de réduire l’âge d’éligibilité des sénateurs de vingt-quatre à dix-huit ans pour plusieurs raisons.

Premièrement, il s’agit de faire concorder l’âge d’éligibilité avec la citoyenneté.

Deuxièmement, il s’agit de simplifier les règles pour que l’âge d’éligibilité soit à dix-huit ans pour toutes les élections.

Troisièmement, parce qu’un mandat d’élu local n’est pas indispensable pour faire un bon sénateur.

Quatrièmement, parce qu’il est illogique qu’un grand électeur de moins de vingt-quatre ans ne puisse se présenter.

Cinquièmement, il s’agit de faciliter le renouvellement politique de la Haute Assemblée.

Dans le rapport, nous avons souhaité rappeler le rôle du Sénat, ses spécificités et les objectifs à atteindre. Le Sénat est une haute assemblée qui a trois missions : voter la loi, contrôler l’action du Gouvernement et évaluer les politiques publiques. Mais le Sénat assure aussi la représentation des collectivités territoriales et des Français établis hors de France.

Conformément à la Constitution, l’équilibre de la Ve République repose sur un bicamérisme différencié, mais équilibré. Il est primordial d’avoir et de conserver deux chambres différentes et complémentaires. Pour ce faire, deux modes de scrutin différents ont été instaurés pour le Sénat et l’Assemblée nationale. Les sénateurs sont élus au suffrage universel indirect, l’âge d’éligibilité est fixé à vingt-quatre ans et diffère de celui des députés. Le scrutin est majoritaire, dans les circonscriptions comportant jusqu’à deux sénateurs, ou de liste dans les autres. Enfin, le mandat dure six ans avec un renouvellement partiel tous les trois ans.

Comme l’a récemment déclaré notre collègue Philippe Bas et comme le démontre l’actualité récente, « le Sénat constitue ainsi un pouvoir non aligné, libre et indépendant ». En effet, « le mode d’élection des sénateurs, leur enracinement dans nos collectivités sont pour la démocratie une garantie de liberté et de pragmatisme ».

Faisons un rappel historique. Nous constatons que le choix de la différenciation des âges entre les deux assemblées date de 1795, après la Terreur. À l’époque, déjà, la chambre haute devait concilier l’évolution du régime tout en maintenant la paix sociale. L’âge était perçu comme un facteur de modération et de valorisation des expériences locales.

Le général de Gaulle a d’ailleurs déclaré lors du discours de Bayeux que « le premier mouvement – de l’Assemblée nationale – ne comporte pas nécessairement une clairvoyance et une sérénité entières. Il faut donc attribuer à une deuxième assemblée élue et composée d’une autre manière la fonction d’examiner publiquement ce que la première a pris en considération ».

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion