Intervention de Charles Gautier

Réunion du 22 février 2007 à 9h30
Prévention de la délinquance — Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire

Photo de Charles GautierCharles Gautier :

Le présent projet de loi a été largement modifié lors de la navette. On peut ici noter ce paradoxe : alors qu'il a fallu près de cinq ans au ministre pour préparer ce texte, la perfection était loin d'être atteinte.

Chaque lecture apportait son lot de surprises. Ainsi, lors de la deuxième lecture à l'Assemblée nationale, le texte s'est trouvé amputé de son volet, très contesté, sur la santé mentale. Le ministre de l'intérieur en a annoncé le retrait dès l'ouverture des débats, alors que quatre syndicats de psychiatres avaient appelé les 3 500 psychiatres hospitaliers à faire grève ce même jour pour obtenir la suppression des articles 18 à 24 du projet de loi.

Le Gouvernement, profitant d'une niche, a introduit ces mêmes articles 18 à 24 dans un autre texte, relatif aux professionnels de santé. Le Conseil constitutionnel, saisi par les députés socialistes, a censuré l'article 23 de ce second texte, article qui autorisait le Gouvernement à légiférer par ordonnances sur les soins psychiatriques. Ces méthodes sont proprement inacceptables, nous l'avons répété tout au long des débats, suivis en cela par de nombreux collègues siégeant sur d'autres travées que les nôtres ! La majorité a tenté une nouvelle fois de passer en force. Elle démontre ici encore qu'elle se joue du Parlement.

Ont aussi fait leur apparition en cours de discussion des mesures très dures sur le vidéolynchage, ou happy slapping, sur les chiens dangereux, sur les troubles du voisinage, sur les interdictions de stade, sur les gens du voyage, le ministre de l'intérieur continuant ainsi à faire des amalgames douteux.

La commission mixte paritaire s'est réunie mardi après-midi. Hier, mercredi, le rapport n'était pas encore en ligne. Nous avons donc travaillé sur ce texte, comme souvent durant cette législature, dans des conditions déplorables. Il nous était pourtant annoncé, je l'ai déjà dit, depuis plus de quatre ans : nous pouvions nous attendre à ce qu'il soit bien préparé !

Malgré tous ces changements, le groupe socialiste votera résolument contre ce projet de loi.

Nous considérons tout d'abord qu'il y a tromperie : nous l'avons souvent rappelé, il s'agit là non pas d'un texte sur la prévention de la délinquance, mais bien d'un texte répressif - j'allais dire : un de plus ! - qui crée des infractions nouvelles et ne cherche aucune solution réelle à la délinquance. Il ne satisfait d'ailleurs pas grand monde dans le milieu des éducateurs et des professionnels qui sont chaque jour au contact de délinquants.

Par ailleurs, et nous l'avons aussi souligné, ce texte est dangereux, car il risque de casser l'équilibre qui existe aujourd'hui dans de nombreuses villes entre les élus et les travailleurs sociaux. C'est particulièrement vrai des articles relatifs aux maires, qui, désormais, seront shérifs, psychologues, éducateurs, assistantes sociales ! Les associations de maires s'en sont d'ailleurs émues et se sont saisies de ces questions ; en vain.

Cependant, le ministre de l'intérieur, qui, sans doute occupé à autre chose, a été particulièrement absent des débats, nous annonce déjà de nouvelles réformes pour les mois à venir. Je vous interroge donc, monsieur le ministre : pourquoi avoir attendu aussi longtemps ? Surtout, à quoi sert ce texte fourre-tout qui ne concerne en rien la prévention de la délinquance ? J'attends vos réponses avec impatience.

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