Intervention de Bruno Le Maire

Réunion du 3 mai 2011 à 22h30
Effets sur l'agriculture des départements d'outre-mer des accords commerciaux conclus par l'union européenne — Adoption d'une proposition de résolution européenne dans le texte de la commission

Bruno Le Maire, ministre :

Je peux vous assurer que le Président de la République est tout à fait déterminé à ne pas sacrifier notre agriculture, d’outre-mer comme de métropole, à des accords commerciaux, quels qu’ils soient.

Au-delà du MERCOSUR, je reste évidemment très vigilant sur l’ensemble des négociations commerciales, comme cela a déjà été le cas s’agissant des accords sur le lait et de la relance d’une régulation européenne des marchés. J’ai mis en place une coalition d’une douzaine d’États membres qui font actuellement pression auprès de la Commission sur ces sujets.

En ce qui concerne le cycle de Doha, les négociations sont difficiles, et j’ai eu l’occasion de rappeler à de multiples reprises, à Genève comme à Bruxelles, que l’Union européenne était allée au maximum des concessions agricoles raisonnables.

S’agissant des accords « banane », la cohérence fait là aussi défaut, et si nous voulons préserver notre modèle d’agriculture outre-mer, une compensation est indispensable.

Je rappelle que, récemment encore, la Commission refusait le principe même d’une telle compensation, qui s’avère pourtant juste et nécessaire.

Grâce à l’implication personnelle du Président de la République, qui a envoyé un courrier sur le sujet au Président Barroso, ainsi qu’aux multiples démarches que nous avons entreprises, les choses commencent à évoluer.

Nous évaluons actuellement l’impact de ces accords sur le marché de la banane et la juste compensation qui pourrait en résulter. Je vous tiendrai bien entendu directement informés des résultats de ces négociations, mais il est déjà positif que le principe même de la compensation ait été accepté.

Au-delà de cette vigilance indispensable, de ces négociations nécessaires avec la Commission, et de ces signaux d’alerte que nous ne cessons d’envoyer sur la conclusion d’accords qui se feraient sur le dos de l’agriculture et des paysans en métropole et outre-mer, je pense qu’il est indispensable de continuer à soutenir le développement de l’agriculture ultramarine.

Ainsi, en Guadeloupe, j’ai été frappé de constater que la production locale ne couvrait que 60 % des besoins en produits alimentaires, alors que ce département, comme les autres DOM, a les moyens de développer son autosuffisance alimentaire.

Il n’y aura pas de développement économique de l’outre-mer sans développement de l’agriculture : c’est un point stratégique en termes d’emplois, et donc de richesse, pour ces départements. Nous devons donc impérativement passer la vitesse supérieure.

Je crois profondément aux ressources de ces territoires, de même qu’aux capacités des agriculteurs ultramarins, lesquels ont tous les atouts pour réussir le développement d’une agriculture endogène.

Il ne s’agit pas de renoncer aux cultures traditionnelles de ces départements, comme la banane ou la canne à sucre, qui font la richesse, l’identité et la force économique de ces départements. Il s’agit simplement, sur cette base solide, de poursuivre une diversification qui doit assurer les besoins alimentaires de la population locale.

Les fonds mis en place dans le cadre du Comité interministériel de l’outre-mer de 2009 visent précisément à encourager le développement endogène de l’agriculture et les productions tournées vers le marché local. Les départements d’outre-mer ont besoin d’une agriculture de proximité.

Ainsi, 40 millions d’euros ont été débloqués pour les filières végétales et animales.

Au-delà de l’autosuffisance alimentaire, nécessaire pour les départements ultramarins, cette diversification est aussi une chance pour l’emploi, pour les entreprises, pour le développement touristique et pour l’environnement, notamment la biodiversité.

Dans le même état d’esprit, et comme le Gouvernement s’y était engagé lors des débats sur le texte qui est devenu la loi relative à la modernisation de l’agriculture et de la pêche, nous allons soutenir le développement des circuits courts en outre-mer.

Une circulaire du Premier ministre adressée aux préfets est actuellement en cours de signature. Elle permettra de favoriser l’approvisionnement en produits locaux dans la restauration collective et l’utilisation du bois dans la commande publique. Il me semble en effet opportun que les établissements publics donnent l’exemple en la matière, et permettent ainsi de soutenir le développement d’une agriculture endogène.

Vous pouvez donc compter sur ma détermination totale pour soutenir le développement durable de l’agriculture des départements d’outre-mer, pour défendre les intérêts de ces départements dans les négociations commerciales qui s’engagent et pour que la politique de cohésion continue de tenir compte des spécificités et des fragilités des régions ultrapériphériques.

Naturellement, nous veillerons également à ce que, au sein de la PAC 2013, qui fait actuellement l’objet de négociations très ardues, le programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité, ou POSEI, demeure un instrument financier spécifique et que nos territoires ultramarins restent un atout pour l’agriculture de notre nation et de l’Europe tout entière.

Le Gouvernement soutiendra donc sans réserve cette proposition de résolution.

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