Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, le 13 septembre dernier, le Président de la République dévoilait sa stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, dont l’ambition est de lutter contre les inégalités de destin et permettre une égalité des chances réelle. Cette priorité sociale affichée par le Gouvernement se traduit par une augmentation de près de 7 % des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », qui atteignent 21 milliards d’euros.
Dans le même temps, comme je l’ai dit lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, celui-ci entérine un quasi-gel des prestations sociales pour les deux prochaines années. Si le Gouvernement explique vouloir concentrer ses efforts sur les personnes les plus en difficulté, cette désindexation risque de placer un certain nombre de foyers aux portes de la pauvreté.
Sans remettre en cause la priorité donnée à la lutte contre la pauvreté, le sentiment de déclassement grandit au sein de la population, surtout de la population qui travaille, comme en témoigne le mouvement des gilets jaunes. Aussi, la présente mission budgétaire revêt un rôle plus que jamais central.
Je m’attarderai sur les points les plus saillants de cette mission.
Le programme 157, « Handicap et dépendance », regroupe les crédits consacrés à l’allocation aux adultes handicapés. Ceux-ci sont en hausse de 5, 1 % par rapport à 2018, portant l’enveloppe à 11, 9 milliards d’euros.
Cette augmentation permet de concrétiser l’engagement du Président de la République en faveur de la revalorisation de l’AAH. L’aide à taux plein sera portée à 900 euros à la fin de l’année 2019. Cet investissement doit être salué à sa juste mesure.
Cependant, quelques ajustements paramétriques contrastent avec l’engagement tenu. Pour n’en citer qu’un, l’alignement des règles de prise en compte des revenus d’un couple bénéficiant de l’AAH sur celles d’un couple touchant le RSA abaisse mécaniquement le plafond en deçà duquel un couple peut bénéficier de deux AAH à taux plein. Les associations de personnes handicapées alertent à juste titre. L’AAH est par nature différente du RSA et leurs objectifs divergent. C’est notre premier point de vigilance.
Le programme 304, « Inclusion sociale et protection des personnes », est le deuxième programme le plus important en termes de crédits mobilisés, avec 7, 7 milliards d’euros demandés pour 2019, soit 1 milliard d’euros de plus qu’en 2018. Selon le Gouvernement, ce programme sera l’instrument majeur dans l’application de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté. L’un des outils mobilisés est la revalorisation de 20 euros, en 2019, du montant forfaitaire de la prime d’activité. Cette augmentation succède à une première hausse du même montant, intervenue en 2018. D’ici à la fin du quinquennat, la revalorisation pour les bénéficiaires de la prime d’activité rémunérés au niveau du SMIC s’élèvera à 80 euros.
Comme l’a souligné fort justement notre rapporteur pour avis, Philippe Mouiller, la concentration sur la prime d’activité des efforts de lutte contre la pauvreté incite les travailleurs déjà partiellement insérés dans l’emploi à s’y insérer davantage, mais, dans le même temps, le Gouvernement semble oublier les personnes les plus éloignées de l’emploi. Je souscris donc à l’analyse de notre collègue, pour lequel la prime d’activité, en l’espèce, est plus un soutien au pouvoir d’achat qu’une incitation à retourner vers l’emploi.
S’agissant de la situation des mineurs non accompagnés, au sujet de laquelle j’ai réalisé, l’année dernière, un rapport d’information avec notre ancien collègue Jean-Pierre Godefroy, je demande à l’État une vraie prise en charge de cette compétence, en raison des difficultés des départements à y répondre.
Depuis 2014, l’augmentation du nombre de mineurs non accompagnés est en forte hausse. Comme on l’a vu ces derniers mois, cette évolution est parfois difficile à vivre pour les départements. Certes, comme l’a précisé Jean-Marc Gabouty, les crédits consacrés à l’accueil des mineurs non accompagnés sont portés à 141 millions d’euros. Mais, au final, le problème ne réside pas tant dans les moyens alloués aux départements que dans le fait que ces derniers n’arrivent plus aujourd’hui à héberger les jeunes. Dans combien de départements les jeunes sont-ils une fois de plus hébergés à l’hôtel ? Cette situation n’est pas toujours acceptable.