Madame la présidente, madame la ministre, madame, monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, au début de l’automne, le Gouvernement a présenté le plan « Ma santé 2022 », visant à refonder le système de santé autour du patient. À l’image du plan Pauvreté, dont nous avons déjà parlé, cette réforme entend « prévenir » et « accompagner » : prévenir les situations à risques et accompagner les personnes pour éviter que les situations ne se reproduisent.
Je salue le cap choisi. Nous ne pouvons pas répondre aux enjeux de vieillissement de la population et de développement des maladies chroniques en gardant comme modèle le « tout-curatif ».
La France peut être fière de son système de santé, qui nous permet de jouir d’une des meilleures espérances de vie au monde : 79, 5 ans pour les hommes et 85, 4 ans pour les femmes. Mais il faut se pencher sur une autre statistique, qui classe notre pays dans la moyenne européenne, seulement, s’agissant de l’espérance de vie en bonne santé : 62, 6 ans pour les hommes et 64, 1 ans pour les femmes.
Nous pouvons en conclure que, si nous vivons plus longtemps, nous vivons aussi longtemps en mauvaise santé, notamment à partir du départ à la retraite. C’est d’autant plus vrai pour les femmes, qui vivent plus longtemps que les hommes, mais ne vivent pas, proportionnellement, plus longtemps en bonne santé.
Aussi, la prévention est plus que jamais une urgence pour améliorer les conditions de vie de nos concitoyens, mais aussi pour préserver nos dépenses publiques.
Cette ambition portée par Mme la ministre se retrouve-t-elle, par conséquent, dans la mission « Santé » du projet de loi de finances qui nous est présentée aujourd’hui ?
La mission « Santé », c’est 1, 4 milliard d’euros de budget, réparti entre deux programmes : le programme 204 relatif à la prévention, la sécurité sanitaire et l’offre de soins, pour un tiers de l’enveloppe, et le programme 183 relatif à la protection maladie, qui récolte les deux tiers restants.
Si les crédits de la mission progressent globalement de 3, 4 %, c’est exclusivement le fait de l’augmentation des moyens de l’aide médicale de l’État, dans le programme 183. À périmètre constant, les crédits du programme 204 diminuent même de 1 %.
Aussi, la politique de prévention de la santé devra composer avec 5, 5 millions d’euros de moins que l’année passée, comme l’ont déjà relevé un certain nombre d’orateurs. Si la prévention est autant, voire davantage, affaire de changements de pratiques et de mentalité que de moyens financiers, une telle évolution peut être néanmoins regrettée.
Il est toutefois une évolution positive à noter : l’augmentation de plus de 2 millions d’euros des subventions versées à l’Agence nationale de santé publique, acteur majeur de la prévention.
Inversement, les sommes versées à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé se réduisent de 120 000 euros, après une augmentation salutaire l’année dernière. Je regrette que le Gouvernement ne maintienne pas l’effort, alors que l’agence doit gérer plusieurs crises sanitaires importantes : celle du Levothyrox, celle de la Dépakine ou encore la pénurie de médicaments. Les Français s’inquiètent de ce dernier point à raison, alimentant d’autant la défiance à l’égard de la médecine conventionnelle et des laboratoires.
Face à la pluralité de ses missions, il convient de donner à cette agence les moyens adéquats.
J’en viens maintenant au programme 183, « Protection maladie », qui concentre ses crédits sur l’aide médicale de l’État, l’AME.
Aussi certain qu’après le jour vient la nuit l’AME fait l’objet d’un débat animé à chaque projet de loi de finances. Il serait donc tentant de reprendre, à ce stade, les éléments de l’intervention que j’ai tenue l’an dernier, mais ce serait faire injure à notre assemblée, à nos concitoyens et au débat démocratique.
Je tiens à féliciter notre rapporteure pour avis, Corinne Imbert, pour sa prise de position digne et responsable sur le sujet, à laquelle je me rallie bien volontiers.
L’AME est une nécessité humanitaire, sanitaire et économique. À sa manière, elle participe à la politique publique de prévention sanitaire.
Nous pouvons regretter la difficulté rencontrée par l’État pour contenir sa dépense – qui a pratiquement doublé entre 2004 et 2017 –, ainsi, peut-être, que le manque de sincérité des gouvernements à budgétiser ce programme. Mais il serait vain de nous enfermer dans une forme de déni.
Les propositions de notre rapporteur spécial, Alain Joyandet, de réduire de 300 millions d’euros les crédits de l’AME et l’instauration d’un droit de timbre annuel pour accéder à cette aide ne me paraissent pas opportunes. Ce droit de timbre tendrait à créer une barrière dans l’accès aux soins, tandis que la menace de réduction des crédits affectés à l’AME n’est plus crédible. Sur ces points, les analyses diffèrent au sein du groupe centriste, je le regrette.
Je salue, enfin, la gestion de l’AME de droit commun par les caisses primaires d’assurance maladie de Paris, Bobigny et Marseille. Cet effort de mutualisation permettra des économies de gestion, mais également un renforcement du pilotage du dispositif et du contrôle des dossiers, tout en homogénéisant leur traitement.
Pour conclure, si, dans l’intention, le Gouvernement a fait de la prévention son mot d’ordre en matière de politique sanitaire et sociale, d’un point de vue budgétaire, les moyens restent un peu limités.
Ces quelques déceptions exprimées, le groupe Union Centriste votera les crédits de la mission « Santé ».