Intervention de Claude Raynal

Réunion du 11 décembre 2018 à 14h30
Loi de finances pour 2019 — Vote sur l'ensemble

Photo de Claude RaynalClaude Raynal :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, en préambule à cette explication de vote, revenons quelques instants sur le contexte politique, économique et social de la période.

Notre pays se trouve dans une situation extrêmement troublée, marquée par un réel décrochage entre une grande partie de nos concitoyens et les acteurs de la vie publique, qu’ils soient syndicalistes, associatifs ou politiques, gouvernants comme opposants.

Nous assistons à une contestation forte des politiques publiques par une large majorité de l’opinion publique, nourrie notamment par le sentiment d’accroissement des inégalités sociales, par le constat d’une iniquité fiscale qui s’accentue chaque année ou encore par l’aggravation des fractures territoriales. Le mouvement des « gilets jaunes » a bien d’autres facettes, mais reconnaissons que celles-là émergent clairement et doivent trouver un débouché dans nos travaux, au moment où nous examinons les textes financiers que sont le projet de loi de financement de la sécurité sociale et le projet de loi de finances.

En tant que parlementaires, représentants de la Nation, nous nous devons d’entendre cette révolte citoyenne et d’en nourrir nos réflexions et décisions.

C’est dans cet esprit que les socialistes ont souhaité présenter un contre-budget ayant vocation à rediriger une partie des recettes vers le pouvoir d’achat des classes moyennes et de nos concitoyens les plus modestes. C’est encore dans cette optique que nous venons de déposer, la semaine dernière, une proposition de loi allant dans le même sens avec nos homologues de l’Assemblée nationale.

Monsieur le ministre, nous regrettons qu’il ait fallu attendre quatre semaines pour que le Gouvernement daigne vraiment s’intéresser à un mouvement populaire, certes protéiforme, mais représentatif de nombre d’angoisses et de colères aujourd’hui qualifiées par le pouvoir de « légitimes », après avoir été d’abord minorées, puis méprisées et souvent caricaturées.

Nous pouvons partager avec vous le fait que la situation actuelle est le fruit d’une mondialisation libérale où, depuis les années soixante-dix, les gouvernements successifs ont essayé d’adapter notre pays au prix sans doute d’une aggravation des inégalités, aggravation d’ailleurs observée dans le monde entier.

Monsieur le ministre, la violence de la politique du président Macron et celle de votre gouvernement, avec des mesures fiscales en faveur des détenteurs de capitaux couplées à des baisses d’aides ou à des augmentations de taxes pour les plus fragiles, ont déclenché cette réaction éruptive. Vous ne pourrez pas dire que le Sénat ne vous avait pas régulièrement mis en garde contre vos excès !

La réalité est que votre « fabuleuse » théorie initiale du ruissellement ne fonctionne évidemment pas. Le projet de loi de finances que vous nous soumettez aujourd’hui, tout comme d’ailleurs celui de l’année dernière, ne répond pas aux attentes et aux besoins d’une majorité de Français.

Il aura malheureusement fallu attendre des émeutes urbaines, par ailleurs insupportables, pour que le Gouvernement, suivant en cela la voie tracée par notre Haute Assemblée, supprime l’augmentation des taxes sur le carburant et reparle, après l’avoir ici méprisée, d’une TICPE flottante.

Il aura fallu le discours du Président de la République d’hier soir pour que quelques-unes de nos idées, hier moquées, soient pour partie reprises, notamment l’élévation du seuil de retraite pour être exonéré d’augmentation de CSG ou l’augmentation de la prime d’activité.

Encore un effort et vous rétablirez l’ISF, ou tout autre impôt sur le patrimoine : nous ne sommes pas fétichistes. Quoi que vous en disiez, vous ne pouviez pas vous priver, ne fût-ce que moralement, de cette recette tant que nos comptes publics n’étaient pas rétablis et que vous demandiez des efforts à l’ensemble de la Nation.

Par charité, je ne m’appesantirai pas sur la demande de suppression de l’impôt sur la fortune immobilière, l’IFI, une demande formulée l’année dernière par la majorité sénatoriale, mais curieusement et discrètement remisée cette année.

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