Intervention de Alain Marc

Réunion du 11 décembre 2018 à 14h30
Port du voile intégral dans l'espace public — Adoption d'une proposition de résolution

Photo de Alain MarcAlain Marc :

En mettant en cause la relation à autrui et la réciprocité d’un échange, la dissimulation du visage dans l’espace public s’oppose directement aux exigences du « savoir vivre ensemble », exigences qui s’imposent à chacun, quelle que soit sa confession.

Oui, l’échange social implique d’apparaître à visage découvert dans l’espace public, quand la dissimulation paraît contraire au principe de fraternité et, au-delà, au principe de civilité. Elle marque le refus d’entrer en relation avec autrui ou, plus exactement, d’accepter la réciprocité et l’échange, puisque cette dissimulation permet de voir sans être vu.

De plus, au-delà de la mise en cause de la relation à autrui, la dissimulation du visage porte directement atteinte à la dignité de la personne, ce qui constitue une base constitutionnelle incontestable pour l’interdiction prévue, d’autant qu’elle est limitée à l’espace public.

De même, le Conseil d’État a relevé que le respect de la dignité de la personne humaine fait partie intégrante de l’ordre public. Le 27 juin 2008, il avait ainsi rejeté la requête d’une Marocaine qui s’était vu refuser l’accès à la nationalité française en raison de sa pratique religieuse radicale, laquelle incluait le port de la burqa.

L’ordre public est également mis en cause du fait de l’impossibilité d’une identification, qui concerne d’ailleurs tous les modes possibles de dissimulation du visage et toutes les justifications, alors même que les préoccupations de sécurité sont maximales pour nos concitoyens.

Ainsi, en 2010, un choix de société a été fait. Aujourd’hui il paraît impérieusement nécessaire de le préserver et de le réaffirmer avec force, dans la mesure où celui-ci semble être menacé.

En effet, le Comité des droits de l’homme des Nations unies a adopté, le 22 octobre 2018, des « constatations », à la suite de la plainte de deux femmes verbalisées en France pour leur port du voile intégral sur la voie publique.

Celui-ci a estimé que la loi de 2010 portait atteinte « au droit des deux plaignantes de librement manifester leur religion » et qu’elle constituait, dès lors, une discrimination à caractère religieux. Comme l’indiquent les auteurs de la proposition de résolution, « cette interprétation de la protection des droits de l’homme aboutit de fait à favoriser la négation des droits des femmes et remet frontalement en cause notre conception de leur place dans la société ».

Or, il faut ici le rappeler, la Cour européenne des droits de l’homme, dans son arrêt S.A.S. c. France rendu le 1er juillet 2014, avait déjà statué sur la loi française et affirmé de façon très claire : « Les autorités nationales jouissent d’une légitimité démocratique directe et […] se trouvent en principe mieux placées que le juge international pour se prononcer sur les besoins et contextes locaux. »

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, même prétendument volontaire ou accepté, le port du voile intégral ne consiste en vérité qu’en une forme de réclusion publique. Il n’existe aucune liberté dans le fait de dissimuler son visage. La dignité est l’une des premières libertés dans la patrie des droits de l’homme ; c’est notre héritage humaniste.

Aussi, à l’heure où les Français s’interrogent sur le devenir de la Nation et sur l’avenir de ce qu’ils sont, il est de notre responsabilité de faire preuve d’une extrême vigilance et de réaffirmer les valeurs que nous avons en partage et qui sont le fondement de notre volonté de construire un destin commun. Notre devoir est de parler d’une seule voix pour manifester notre attachement unanime à la République, à ses principes et à ses valeurs.

En tant que parlementaires, il nous revient aussi de garantir la pérennité de nos valeurs, lesquelles façonnent un modèle qui a fait notre pays et qui fait aussi son image, un modèle qui fonde notre pacte social et forge notre identité.

Il nous revient d’être dignes des exigences attachées à l’honneur d’être Français et au privilège de vivre en France.

Pour toutes ces raisons, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera en faveur de cette proposition de résolution.

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