Intervention de Daniel Chasseing

Réunion du 12 décembre 2018 à 21h45
Emplois non pourvus en france : quelles réponses ? quelles actions — Débat interactif

Photo de Daniel ChasseingDaniel Chasseing :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le marché du travail présente une inadéquation persistante entre l’offre et la demande, faute de candidats ou faute de profils adéquats. Les secteurs du bâtiment et de la construction sont les premiers concernés, mais il y a aussi la filière des services à la personne, le commerce, les TPE, les emplois saisonniers, en horaires décalés, et le travail le week-end.

En décembre 2017, le conseil d’administration de Pôle emploi constatait que 150 000 à 200 000 offres n’étaient pas pourvues, faute de candidats. Les principales causes incriminées par les recruteurs sont le manque de formation, soit le manque de compétences nécessaires, la faible attractivité de certaines offres due à un déficit d’image, aux conditions de travail ou à l’éloignement.

Pourquoi ce constat ? En France, 150 000 jeunes sortent chaque année du milieu scolaire sans formation et sans diplôme ; il y a au total 1, 3 million de personnes dans cette situation. La France compte 22 % de ses jeunes au chômage, et seulement 300 000 à 400 000 apprentis, tandis que l’Allemagne compte 1, 4 million d’apprentis et seulement 7 % de jeunes au chômage. Mon collègue Jean-Pierre Decool a fait état des difficultés de recrutement des apprentis dans certaines filières, notamment l’hôtellerie-restauration.

De plus, le système d’orientation n’est pas suffisamment performant en France : 50 % des jeunes disent avoir mal été accompagnés dans les établissements scolaires. Notre pays accuse un grand retard dans ce domaine, l’orientation se limitant bien souvent à la présentation des filières, quand dans d’autres pays, comme en Finlande, l’orientation est pleinement intégrée dès l’école élémentaire, avec également, au collège, des visites dans les entreprises, des films sur les métiers et des entretiens individuels assurés par un enseignant spécifique.

En ce qui concerne la formation, seulement 19 % des ouvriers en font la demande à l’employeur, contre 50 % des cadres. La réalisation d’entretiens professionnels dans les TPE serait souhaitable.

La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel apporte des solutions pour les apprentis, avec une transformation d’un système trop complexe. Elle vise notamment l’aide pérenne aux entreprises, les horaires de travail adaptés, la simplification des contrats d’apprentissage, la possibilité d’apprentissage jusqu’à 30 ans et la mise en place d’une meilleure information par les régions dans les lycées.

Il s’agit également, à travers les ordonnances prises sur le fondement de la loi d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social, d’encourager le dialogue social dans les entreprises pour améliorer la formation des salariés.

Actuellement, les CFA et les lycées professionnels sont gérés respectivement par les branches et l’éducation nationale, qui doivent travailler ensemble pour tenir compte de la spécificité de l’emploi des territoires et faire de l’apprentissage une voie d’excellence. Il est nécessaire d’associer Pôle emploi, la région, les partenaires sociaux et les entreprises pour réorganiser la formation, en particulier en tenant compte des compétences recherchées dans les bassins d’emploi.

Le Gouvernement a misé sur la formation professionnelle, avec un financement de 15 milliards d’euros entre 2018 et 2022 pour rehausser le niveau de compétences des plus éloignés de l’emploi.

L’aide à la mobilité, notamment dans le milieu rural, est essentielle. Il faut une différence de salaire suffisamment incitative, coût de mobilité compris, entre les personnes qui travaillent et celles qui restent inactives.

Le réseau emplois compétences pourrait tenir le rôle de plateforme de coordination, chargée de centraliser, de traiter les données locales et d’anticiper les besoins par le déploiement de formations centrées sur les compétences recherchées dans les bassins d’emploi.

Pour conclure, je dirai que la lutte contre le chômage passe par la formation initiale et continue, notamment par une voie d’apprentissage, mais aussi par une coopération étroite avec les entreprises, les plus à même d’identifier les salariés dont elles ont besoin. Les personnes handicapées pourront, avec le doublement des entreprises adaptées, trouver aussi une solution. Redonner un sens et une valeur au travail, faire de l’apprentissage une voie d’excellence, favoriser les mobilités internes et géographiques, ainsi que les formations en entreprise : tels sont les principaux axes d’action que nous proposons pour apporter une réponse aux problèmes des emplois non pourvus et du chômage.

Je veux enfin remercier notre collègue Joël Guerriau, qui a pris l’initiative de ce débat, mais également Mme la ministre et tous nos collègues, qui nous ont permis d’avoir des échanges de qualité.

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