Intervention de Jérôme Durain

Réunion du 5 février 2019 à 22h20
Croissance et transformation des entreprises — Article 51

Photo de Jérôme DurainJérôme Durain :

Le jeu d’argent justifie la prudence. Évidemment, quand on est parieur, cela va de soi, mais cette question concerne tous ceux qui s’y intéressent.

Je suis satisfait que la commission spéciale ait choisi de s’opposer à cette privatisation et je partage les réserves de ceux qui se sont exprimés dans le même sens.

Pourquoi vendre un opérateur si différent par son histoire et ses produits ? La question des addictions et des intérêts d’ordre public a été mentionnée. On ne traite pas la Française des jeux comme n’importe quel autre opérateur économique ! Pourquoi vendre un opérateur qui est rentable ? Pourquoi vendre un opérateur qui joue un rôle encore plus important que les autres en matière de prévention ? Certains ont évoqué l’agressivité des acteurs en matière de paris en ligne notamment. Pourquoi vendre un opérateur, alors que rien dans la stratégie de la Française des jeux ne nécessite cette privatisation ?

Le principe de cette privatisation et la volonté du Gouvernement accréditent finalement la thèse de ceux qui craignent que le changement du business model de la Française des jeux ne conduise à une évolution vers un modèle un peu moins vertueux, tel que ceux qui existent dans d’autres pays voisins.

Le sujet revêt aussi un aspect fiscal. Au-delà de l’opposition générale à la privatisation, on a pu observer un certain flou dans la position de l’exécutif sur la fiscalité des jeux, ainsi que sur la régulation.

S’agissant de la fiscalité, de nombreux observateurs du secteur éprouvent des doutes. Les taxes sur les paris sportifs s’élèveraient à 62 % du produit brut des jeux, alors que l’État prélevait auparavant 9, 3 % des mises. Ce n’est pas du tout un jeu à somme nulle ! Beaucoup craignent d’ailleurs que des opérateurs aujourd’hui rentables ne fassent faillite. Quel est le but ? S’agit-il de rendre plus présentable la corbeille de la mariée Française des jeux ?

J’en viens enfin à la régulation, qui est un sujet essentiel pour les motifs évoqués plus haut. Je ne comprends pas bien où veut en venir le Gouvernement. On nous vend une privatisation, mais si elle n’est pas accompagnée d’une remise à plat de la régulation par une autorité unique indépendante, du type de l’ARJEL, l’Autorité de régulation des jeux en ligne, dont on sait qu’elle fonctionne plutôt bien, on n’a pas la garantie d’une régulation saine et universelle.

En ultime argument, comme beaucoup d’autres ici, je ne suis pas tout à fait convaincu, en ma qualité de parlementaire, par le recours aux ordonnances.

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