Intervention de Christophe Béchu

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 29 janvier 2019 à 16:5
Audition de M. Christophe Béchu président du conseil d'administration de l'agence de financement des infrastructures de transport de france afitf

Photo de Christophe BéchuChristophe Béchu, président du conseil d'administration de l'Afitf :

Je vous remercie de votre invitation. Je vous répondrai de manière aussi transparente que possible, en dépit des zones d'ombre liées aux événements du second semestre 2018... Avant cela, les choses étaient assez simples : le COI avait défini une feuille de route, une trajectoire qu'il convenait ensuite de mettre en oeuvre au plan budgétaire. Les 13,7 milliards d'euros que vous avez évoqués sont à mettre en perspective avec les 3 milliards par an d'investissements que le COI avait définis dans le cadre d'un scénario idéal.

Même sans augmentation de budget, l'agence sera en mesure d'honorer ses engagements, y compris sur le long terme ; en revanche, sans recettes nouvelles, elle ne pourra pas financer de nouveaux projets.

Je vous confirme que le budget 2019 de l'Afitf sera voté le 27 février, ce qui vous donnera la visibilité nécessaire à l'examen de la LOM.

En 2018, nous avons subi les répercussions, que vous avez mentionnées, d'une forte diminution de nos encaissements au titre des amendes radar. Faut-il dire que ces encaissements avaient été surestimés, ou que le rendement s'est révélé inférieur à une prévision qui semblait logique ? Je rappelle que l'Afitf perçoit le solde des recettes liées aux amendes radar, qui abondent d'abord le ministère de l'intérieur, puis les collectivités territoriales. Par conséquent, l'agence subit directement les variations à la hausse et à la baisse du produit. C'est ainsi qu'en 2018, nous n'avons encaissé que 248 millions d'euros contre 450 millions prévus.

En prenant mes responsabilités à la tête de l'agence, je me suis assigné trois objectifs : efficacité, soutenabilité, transparence. Ces objectifs demeurent, même dans un contexte d'interrogations sur les recettes. Le budget théorique de l'agence pour 2018 aurait dû être de 2,5 milliards d'euros. Un milliard devait provenir de la TICPE, qui a été au rendez-vous, un autre milliard de la contribution des sociétés d'autoroute, dont une part est volontaire et dégressive, et 500 millions d'euros des recettes issues des radars.

L'Afitf a su réagir à des événements autrement plus complexes. À sa création en 2005, elle devait bénéficier des retombées directes des revenus des sociétés d'autoroutes dont la privatisation n'était pas à l'ordre du jour. Un an plus tard, celles-ci étaient privatisées, obligeant à repenser le financement. C'est alors que l'écotaxe a été imaginée, pour donner des ressources pérennes à l'agence... Non seulement ces recettes ne sont pas venues, mais l'écotaxe s'est transformée en dépense nette : c'est en 2018 que nous avons versé la dernière tranche des 350 millions d'euros dus à la société Écomouv' à titre d'indemnisation.

Vous m'avez interrogé à la fois sur le budget 2019 et sur les années suivantes : comment financer le renforcement des mobilités ?

Le reste à payer de l'Afitf à l'égard de SNCF Réseau a diminué en 2018 : au total, il est passé de 16,5 milliards d'euros en 2013 à 12 milliards début 2019. Malgré les 200 millions d'euros qui nous ont manqué en 2018, nous avons été en mesure d'honorer nos engagements vis-à-vis d'Écomouv' ; notre dette à l'égard de SNCF Réseau est passée de 700 millions d'euros il y a cinq ans à 220 millions aujourd'hui.

En 2019, nous n'aurons plus de versements à faire à Écomouv'. Avec des ressources équivalentes à celles de l'année dernière, nous pourrions à nouveau faire face à nos engagements de long terme, c'est-à-dire le financement des partenariats public-privé pour les lignes à grande vitesse et la contribution à la mise en place de transports en commun en site propre par les collectivités. En revanche, nous ne serions pas en mesure de lancer de nouvelles opérations. Or l'enjeu est là : accompagner les nouveaux besoins, notamment à travers le financement d'un plan vélo ou l'augmentation des moyens de VNF.

Pour 2019, compte tenu du contexte particulier, inédit et complexe, et malgré la décision de ne pas augmenter la TICPE, je puis vous confirmer que la part de la taxe versée à l'agence sera bien cette année de 1,2 milliard d'euros, conformément à la trajectoire de financement de l'Afitf, soit 200 millions supplémentaires au sein des 33 milliards de produit total de TICPE.

Nous restons dans l'incertitude quant à la recette des amendes radar à inscrire au budget, puisque nous avons commencé l'année avec une partie des radars rendus inopérants - euphémisme ! Les 250 millions d'euros perçus au titre de 2018 ne seront peut-être pas atteints en 2019. Les 200 millions supplémentaires au titre de la TICPE comblent au moins une part de cet écart.

Nous travaillons avec le ministère des transports pour dégager des moyens au-delà de ce socle de deux milliards de recettes. Or, je ne suis pas sûr que la période soit propice au dévoilement des contours d'un nouvel impôt... Si la LOM ne comporte pas de volet recettes, c'est justement pour pouvoir poursuivre les discussions avec les transporteurs de poids lourds pour une éventuelle inscription au prochain PLF. L'Afitf a bénéficié, par le passé, de recettes issues des privatisations d'autoroutes ; une autre possibilité est la création d'une vignette, avec la nécessité de trouver un mécanisme par lequel les transporteurs étrangers contribuent au financement et à l'entretien de routes qu'ils contribuent à user. C'est sur cette hypothèse que travaille la ministre Élisabeth Borne. La mise en place de nouveaux impôts ou l'ajustement de dispositifs existants est la prérogative de l'exécutif.

La régénération du réseau ferroviaire dépend de la SNCF ; l'Afitf n'intervient que sur les projets nouveaux, le programme GSM et les trains d'équilibre du territoire, ce qui représente au demeurant des restes à payer très lourds : c'est sur le ferroviaire que portent les charges à venir les plus lourdes, avec un calendrier s'étalant jusqu'au milieu des années 2030.

La régénération routière repose en partie sur l'agence. Le COI estime que pour stopper la dégradation du réseau, il convient d'investir un milliard d'euros par an. Nous en sommes à 700 millions pour 2018, avec un objectif de 800 millions pour 2019. Pour VNF, il faudrait faire passer les financements de 80 à 110 millions d'euros pour assurer une régénération du réseau fluvial dans de bonnes conditions. Pour 2019, nous n'avons pu garantir à VNF qu'un maintien des montants alloués ; une augmentation éventuelle dépendra de l'atterrissage sur les recettes.

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