Nous accueillons aujourd'hui notre ancien collègue Christophe Béchu, président du conseil d'administration de l'Afitf, que nous avions déjà entendu en mars 2018 peu avant sa nomination.
Nous le recevons à nouveau aujourd'hui car la question des infrastructures revêt une actualité particulière. En effet, le point de départ des événements politiques et sociaux que nous connaissons a été la question des mobilités, et le sentiment de certains d'être assignés à résidence dans ce que l'on appelle les « zones blanches de la mobilité ».
De plus, nous allons examiner le projet de loi d'orientation des mobilités (LOM) en commission le 6 mars et dans l'hémicycle à partir du 19, ce texte s'inscrivant dans le prolongement des Assises de la mobilité tenues entre septembre et décembre 2017.
Votre agence est au coeur de ce texte dans la mesure où il comporte un volet programmatique planifiant les investissements de l'État dans les infrastructures de transport à l'horizon 2027 ; c'est important, car aucune programmation de ce type n'avait été discutée au Parlement depuis le Grenelle I en 2009.
Le rôle de l'Afitf est, depuis 2005, de porter financièrement les grands projets d'infrastructures de l'État à partir de recettes affectées. Son fonctionnement suit une logique de report modal, en affectant des ressources provenant majoritairement du trafic routier au financement de projets d'infrastructures relevant de l'ensemble des modes de transport, routiers mais aussi ferroviaires, collectifs, fluviaux et maritimes.
Or, les limites de ce système de financement et notamment de sa soutenabilité, ont été soulignées à plusieurs reprises, par la Cour des Comptes ou par le Conseil d'orientation des infrastructures (COI), car il a abouti à de nombreux engagements de réalisation d'infrastructures finalement non financés.
Nous souhaiterions un point sur le rôle de l'Afitf et les difficultés auxquelles elle fait face, à commencer par la couverture de ses engagements financiers. L'adoption du budget pour 2019 de l'agence, qui devait avoir lieu à la mi-décembre, a été repoussée au 30 janvier et, selon nos informations, devrait encore être reportée. Le budget prévisionnel de l'Afitf transmis en fin d'année prévoyait 2,684 milliards d'euros de recettes dont 1,2 milliard d'euros provenant de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) et 500 millions d'euros des amendes radars. Mais les recettes de ces dernières sont apparues surévaluées de manière importante, nombre de radars ayant été mis hors service, et la TICPE pourrait ne pas augmenter dans les proportions prévues compte tenu du gel de sa trajectoire. Sur les 1,2 milliard d'euros prévus au titre de la TICPE pour 2019, 200 millions sont incertains. Notre rapporteur Didier Mandelli vous posera des questions plus spécifiques pour le projet de loi d'orientation des mobilités.
Notre commission a également créé une mission d'information, dotée des prérogatives de commission d'enquête, sur la sécurité des ponts. Conviendrait-il de consacrer spécifiquement des crédits à l'entretien des ouvrages d'art, en particulier des ponts, et d'envisager une programmation pour éviter la dégradation de ce patrimoine ?
L'article 30 du projet de loi d'orientation des mobilités (LOM) prévoit une programmation financière des investissements à dix ans, détaillée dans le rapport annexé. C'est une première, et le fruit d'une concertation entre le Gouvernement et le Conseil d'orientation des infrastructures (COI).
Pouvez-vous nous préciser le budget de l'Afitf pour 2019, qui devait être voté à la mi-décembre ? Pouvez-vous nous confirmer qu'il sera voté fin février, soit avant le début de l'examen au Sénat de la LOM prévu en commission pour le 6 mars ? Le rapport annexé au projet de loi indique un montant de 2,7 milliards d'euros de dépenses, sur la base des recettes prévues dans le cadre du projet de loi de finances. Cela est-il cohérent avec vos prévisions de recettes, et cela permettra-t-il la mise en oeuvre des priorités définies par le président de la République et le financement du scénario 2 prévu par le COI ?
Je ne reviens pas sur la perte d'exploitation liée aux amendes radar ; l'affectation de ressources additionnelles au profit de l'Afitf, à hauteur de 500 millions d'euros, sera nécessaire à partir de 2020, c'est-à-dire demain. Une taxe sur les poids lourds, dont la recette serait de 300 millions d'euros, avait été envisagée dans une première version du texte, mais semble avoir été abandonnée. Dans ces conditions, la trajectoire de financement de l'Afitf sera-t-elle revue à la baisse ? Nous sortirions dans ce cas du scénario 2 du COI, qui prévoyait un total de dépenses de 13,7 milliards d'euros pour les cinq prochaines années et de 14 milliards pour la période qui suit. Compte tenu de la dynamique de rendement de la TICPE, quelle sera sa part affectée à l'horizon 2022, alors qu'elle est de 1,2 milliard d'euros aujourd'hui ?
Pouvez-vous nous préciser le montant de dépenses prévues pour le transport fluvial ? Le budget envisagé pour l'Afitf ne suffit pas à couvrir les besoins de Voies navigables de France (VNF). Avez-vous prévu des ressources alternatives pour cet organisme ?
Enfin, qu'en est-il du reste à payer de l'Afitf à l'égard de SNCF Réseau ?
Je vous remercie de votre invitation. Je vous répondrai de manière aussi transparente que possible, en dépit des zones d'ombre liées aux événements du second semestre 2018... Avant cela, les choses étaient assez simples : le COI avait défini une feuille de route, une trajectoire qu'il convenait ensuite de mettre en oeuvre au plan budgétaire. Les 13,7 milliards d'euros que vous avez évoqués sont à mettre en perspective avec les 3 milliards par an d'investissements que le COI avait définis dans le cadre d'un scénario idéal.
Même sans augmentation de budget, l'agence sera en mesure d'honorer ses engagements, y compris sur le long terme ; en revanche, sans recettes nouvelles, elle ne pourra pas financer de nouveaux projets.
Je vous confirme que le budget 2019 de l'Afitf sera voté le 27 février, ce qui vous donnera la visibilité nécessaire à l'examen de la LOM.
En 2018, nous avons subi les répercussions, que vous avez mentionnées, d'une forte diminution de nos encaissements au titre des amendes radar. Faut-il dire que ces encaissements avaient été surestimés, ou que le rendement s'est révélé inférieur à une prévision qui semblait logique ? Je rappelle que l'Afitf perçoit le solde des recettes liées aux amendes radar, qui abondent d'abord le ministère de l'intérieur, puis les collectivités territoriales. Par conséquent, l'agence subit directement les variations à la hausse et à la baisse du produit. C'est ainsi qu'en 2018, nous n'avons encaissé que 248 millions d'euros contre 450 millions prévus.
En prenant mes responsabilités à la tête de l'agence, je me suis assigné trois objectifs : efficacité, soutenabilité, transparence. Ces objectifs demeurent, même dans un contexte d'interrogations sur les recettes. Le budget théorique de l'agence pour 2018 aurait dû être de 2,5 milliards d'euros. Un milliard devait provenir de la TICPE, qui a été au rendez-vous, un autre milliard de la contribution des sociétés d'autoroute, dont une part est volontaire et dégressive, et 500 millions d'euros des recettes issues des radars.
L'Afitf a su réagir à des événements autrement plus complexes. À sa création en 2005, elle devait bénéficier des retombées directes des revenus des sociétés d'autoroutes dont la privatisation n'était pas à l'ordre du jour. Un an plus tard, celles-ci étaient privatisées, obligeant à repenser le financement. C'est alors que l'écotaxe a été imaginée, pour donner des ressources pérennes à l'agence... Non seulement ces recettes ne sont pas venues, mais l'écotaxe s'est transformée en dépense nette : c'est en 2018 que nous avons versé la dernière tranche des 350 millions d'euros dus à la société Écomouv' à titre d'indemnisation.
Vous m'avez interrogé à la fois sur le budget 2019 et sur les années suivantes : comment financer le renforcement des mobilités ?
Le reste à payer de l'Afitf à l'égard de SNCF Réseau a diminué en 2018 : au total, il est passé de 16,5 milliards d'euros en 2013 à 12 milliards début 2019. Malgré les 200 millions d'euros qui nous ont manqué en 2018, nous avons été en mesure d'honorer nos engagements vis-à-vis d'Écomouv' ; notre dette à l'égard de SNCF Réseau est passée de 700 millions d'euros il y a cinq ans à 220 millions aujourd'hui.
En 2019, nous n'aurons plus de versements à faire à Écomouv'. Avec des ressources équivalentes à celles de l'année dernière, nous pourrions à nouveau faire face à nos engagements de long terme, c'est-à-dire le financement des partenariats public-privé pour les lignes à grande vitesse et la contribution à la mise en place de transports en commun en site propre par les collectivités. En revanche, nous ne serions pas en mesure de lancer de nouvelles opérations. Or l'enjeu est là : accompagner les nouveaux besoins, notamment à travers le financement d'un plan vélo ou l'augmentation des moyens de VNF.
Pour 2019, compte tenu du contexte particulier, inédit et complexe, et malgré la décision de ne pas augmenter la TICPE, je puis vous confirmer que la part de la taxe versée à l'agence sera bien cette année de 1,2 milliard d'euros, conformément à la trajectoire de financement de l'Afitf, soit 200 millions supplémentaires au sein des 33 milliards de produit total de TICPE.
Nous restons dans l'incertitude quant à la recette des amendes radar à inscrire au budget, puisque nous avons commencé l'année avec une partie des radars rendus inopérants - euphémisme ! Les 250 millions d'euros perçus au titre de 2018 ne seront peut-être pas atteints en 2019. Les 200 millions supplémentaires au titre de la TICPE comblent au moins une part de cet écart.
Nous travaillons avec le ministère des transports pour dégager des moyens au-delà de ce socle de deux milliards de recettes. Or, je ne suis pas sûr que la période soit propice au dévoilement des contours d'un nouvel impôt... Si la LOM ne comporte pas de volet recettes, c'est justement pour pouvoir poursuivre les discussions avec les transporteurs de poids lourds pour une éventuelle inscription au prochain PLF. L'Afitf a bénéficié, par le passé, de recettes issues des privatisations d'autoroutes ; une autre possibilité est la création d'une vignette, avec la nécessité de trouver un mécanisme par lequel les transporteurs étrangers contribuent au financement et à l'entretien de routes qu'ils contribuent à user. C'est sur cette hypothèse que travaille la ministre Élisabeth Borne. La mise en place de nouveaux impôts ou l'ajustement de dispositifs existants est la prérogative de l'exécutif.
La régénération du réseau ferroviaire dépend de la SNCF ; l'Afitf n'intervient que sur les projets nouveaux, le programme GSM et les trains d'équilibre du territoire, ce qui représente au demeurant des restes à payer très lourds : c'est sur le ferroviaire que portent les charges à venir les plus lourdes, avec un calendrier s'étalant jusqu'au milieu des années 2030.
La régénération routière repose en partie sur l'agence. Le COI estime que pour stopper la dégradation du réseau, il convient d'investir un milliard d'euros par an. Nous en sommes à 700 millions pour 2018, avec un objectif de 800 millions pour 2019. Pour VNF, il faudrait faire passer les financements de 80 à 110 millions d'euros pour assurer une régénération du réseau fluvial dans de bonnes conditions. Pour 2019, nous n'avons pu garantir à VNF qu'un maintien des montants alloués ; une augmentation éventuelle dépendra de l'atterrissage sur les recettes.
En 2015, l'Afitf consacrait 50 millions d'euros à VNF : nous sommes donc sur une trajectoire de progression. Ce sont des dépenses nécessaires.
Nous n'avons pas de programme spécifique de régénération des ouvrages d'art. L'Afitf a financé la sécurisation des tunnels à hauteur de 1,2 milliard d'euros entre 2007 et 2018. La mission d'information créée par votre commission permettra d'établir un état des lieux, préalable à un éventuel programme spécifique de régénération. Les deux ponts dont les structures sont le plus altérées - le viaduc d'Echinghen sur l'A16 et le viaduc de Caronte sur l'A55 - ne relèvent pas de l'Afitf. Le premier se trouve sur une partie concédée du réseau et le second sur une partie non concédée mais relevant de crédits classiques. Des besoins de travaux ont été identifiés sur une vingtaine d'autres ponts, mais seuls quelques centaines d'ouvrages ont été inspectés. L'Afitf ne peut agir en amont du recensement des besoins.
Nous formulerons des propositions dans le cadre de notre travail sur les ponts, dont beaucoup relèvent de la maîtrise d'ouvrage des collectivités. Celles-ci ont des difficultés à y faire face.
Je me suis permis ma remarque à propos de VNF car j'ai été choqué de l'état de certaines écluses franciliennes que j'ai pu visiter avec le COI.
Je suis accompagné du nouveau secrétaire général de l'Afitf qui, issu de VNF, connaît bien ces problématiques.
Il ne me contredira donc pas sur l'état des écluses ! Je cède la parole à Jean-Pierre Corbisez, rapporteur pour avis des crédits du transport routier.
Je vous félicite pour votre nomination. Le fait que votre secrétaire général soit issu de VNF devrait faciliter le dialogue avec la ministre, dont le directeur de cabinet est lui aussi passé par cet organisme.
Quel sera le montant du budget 2019 ? Vous avez annoncé le maintien de l'augmentation des crédits issus de la TICPE, mais la recette des amendes radars, après s'être élevée à environ 400 millions d'euros en 2017, a brutalement baissé en 2018. Les coupes budgétaires entraînées par ce manque à gagner affecteront-elles les travaux, ou les subventions d'attribution comme le bonus-malus ou la prime à la conversion ?
Je suis heureux d'apprendre que le montant de la dette est passé en dessous des 12 milliards d'euros : cette dette, issue d'engagements parfois vieux de plusieurs décennies, engendre des frais financiers de près de 8 millions d'euros.
Que pensez-vous de ces coupes financières ? J'apprends avec stupeur qu'en cas de difficultés concernant les recettes des amendes radars, l'État maintient, semble-t-il, son propre pourcentage de reprise sur le volume financier annuel que rapportent ces amendes ; l'Afitf récupère ensuite le restant. Serait-il possible d'intervenir, par voie d'amendement ou d'une décision commune, afin que la répartition des éventuelles pertes financières entre le budget de l'État, celui des collectivités locales et de l'Afitf soit revue, et que l'Agence ne soit pas systématiquement la perdante ?
Sur le premier sujet, les ordres de grandeur se situent au-dessous des 12 milliards d'euros de reste à payer, dont 8 milliards sur le ferroviaire, environ 2,3 milliards sur les routes et 1,3 milliard sur les transports collectifs d'agglomération. Le delta entre les montants engagés et ceux qui sont mandatés au cours de cette période nécessitera sans doute un léger toilettage, du fait des évolutions de gouvernance ou des décalages d'opérations dans certaines communautés urbaines ou d'agglomération. En effet, les crédits d'engagement ne correspondront pas forcément aux projets qui, pour certains, se poursuivent. Par ailleurs, les effectifs de l'Agence se résument à quatre personnes - un secrétaire général, un adjoint dont le poste est actuellement vacant, une secrétaire et une comptable -, d'où une capacité d'évaluation propre assez réduite, sans l'appui du ministère. Vous mesurez l'intérêt d'un comptable avec 2 à 2,5 milliards d'euros de mandatements à réaliser.
Pour la partie ferroviaire, sur les 8 milliards d'euros de reste à payer, 4,5 milliards concernent les LGV, et donc s'étaleront jusqu'au milieu des années 2030, avec 1,5 milliard d'euros pour les trains d'équilibre territoriaux. De plus, autour de ce programme récent mis en place sous la présidence de mon prédécesseur, 2,3 milliards d'euros ont été engagés pour l'amélioration des rames, donc du confort des voyageurs, là où aucune perspective n'existait auparavant. Il faut citer également 600 millions d'euros sur le contrat de plan État-Région (CPER) ferroviaire, 400 millions d'euros sur la liaison Lyon-Turin - l'agence n'est pas engagée dans la réalisation en tant que telle du tunnel, mais elle accompagne les études sur le projet - et environ 400 millions d'euros sur le programme GSM afin d'accroître le débit à l'intérieur des infrastructures ferroviaires.
Avec 200 millions d'euros de TICPE, le budget respecterait l'épure d'une trajectoire sur les amendes radars à environ 500 millions d'euros. Si le produit de la TICPE ne soulève aucun problème, il n'en est pas de même des amendes radars. Par conséquent, sauf à majorer encore la part de TICPE qui pourrait être versée à l'Agence, l'atterrissage ne sera possible qu'avec une nouvelle inscription sur les radars. Or 250 millions d'euros, c'est une somme trop optimiste, puisque nous commençons l'année avec un parc dégradé. Et sauf si les rendements au premier et au second semestre 2019 sont identiques à ceux de 2018, je ne vois pas comment on peut inscrire une telle somme dans un contexte où, au lieu des 2,6 milliards d'euros, nous percevrons plutôt 2,3 à 2,4 milliards d'euros.
Notre priorité absolue est de continuer à réduire le montant de nos restes à payer, donc d'honorer nos engagements. Et avec les sommes que je suis en train de vous indiquer, il n'y a pas péril ! L'enjeu est la montée en puissance des crédits en faveur de la régénération routière, de VNF et l'accompagnement d'opérations dans le cadre de la LOM. Le sujet est moins le budget 2019 que la trajectoire globale des recettes nouvelles et pérennes, dont le montant doit avoisiner 500 millions d'euros pour les années 2020 à 2022. Quand bien même nous aurions 100 millions d'euros de plus au titre de l'année 2019, nous devons raisonner à long terme.
Pour ce qui est des radars, le mécanisme aujourd'hui n'est pas un pourcentage, mais un montant fixé dans la loi de finances, dont une part sera prélevée par le ministère de l'intérieur et une autre par les collectivités locales, avant un versement à l'agence en fonction des recettes globales. Jusqu'à maintenant, le rendement était toujours légèrement supérieur aux sommes inscrites ; nous étions donc confiants en 2018. Est-il souhaitable de ventiler les amendes radars entre trois structures ? Ne pourrait-on pas remplacer des montants théoriques de ces amendes par un complément de TICPE, ce qui simplifierait les recettes de l'agence et permettrait une plus grande lisibilité quant au niveau des recettes des amendes radars et de l'affectation de la TICPE ? Enfin, une variation de quelques centaines de millions d'euros d'un poste à l'autre, sur les 30 milliards d'euros prévus, présente l'avantage de sanctuariser des investissements dont notre pays a besoin, d'améliorer la régénération des infrastructures de transports et d'assurer la soutenabilité de projets attendus sur nos territoires. Le jeu en vaut la chandelle d'autant que, pour assurer la soutenabilité d'une trajectoire financière, il est souhaitable d'éviter tout aléa sur des sommes qui avoisinent les 13 à 14 milliards d'euros.
Nous y réfléchirons dans la perspective du projet de loi d'orientation des mobilités.
Nous avons bien compris les difficultés que vous rencontrez pour trouver des recettes nouvelles, mais il est un projet qui est porté depuis plusieurs années par les élus consulaires de Limoges, de la Haute-Vienne, de la Dordogne, du Gers et des Hautes-Pyrénées : le doublement de la N 21 par la mise en place de péages sur ces routes, afin de relier un axe nord-sud qui partirait de Limoges jusqu'à Tarbes, voire jusqu'en Espagne. Que pensez-vous de cet investissement de 2,5 milliards d'euros dans la régénération des routes nationales ?
Ce sujet est très vaste, mais pour résumer, je dirai que certaines routes seraient intéressantes pour des sociétés concessionnaires d'autoroutes, qui pourraient proposer à l'État d'étendre leur concession et d'allonger leur réseau par le biais de la réalisation de travaux sur des parties non concédées, en échange d'un adossement financier sur les parties concédées. C'est précisément l'accord qui avait été conclu par Ségolène Royal au moment d'un plan de relance autoroutier dans plusieurs endroits de France il y a quelques années.
Cela renvoie à une question patrimoniale beaucoup plus large : les concessions autoroutières et les partenariats public-privé sont-ils des modèles ? La concession n'est pas un modèle à généraliser, même si l'on ne peut l'exclure en raison de certaines difficultés budgétaires. Des allongements d'adossement me paraissent plus souhaitables pour de nombreuses raisons qui tiennent parfois au contexte ou à l'irritabilité de nos concitoyens face à de nouveaux paiements. Mon degré de connaissance sur le projet dont vous parlez, Monsieur le sénateur, alors que certains y travaillent depuis des années, ne me permet pas de donner un avis autorisé sur la conduite à tenir.
Vos propos très intéressants répondent à notre besoin de transparence et de communication sur la diminution des recettes de la TICPE et des amendes radars, ainsi que leur impact sur nos infrastructures. Les derniers événements ont mis en évidence la fracture sociale et territoriale, et si le pouvoir d'achat a été au centre des revendications, la question des transports en a été le révélateur.
Dans le cadre de la LOM, en particulier ses volets régional et départemental, un certain nombre d'infrastructures pourraient être prises en charge par les régions. En 2016, l'Afitf avait été épinglée par la Cour des comptes, qui l'avait qualifiée de « coquille vide » appliquant les décisions du ministre des transports. Comment comptez-vous concilier les décisions de ce dernier avec les besoins d'infrastructures de chaque région ? Comment dégagerez-vous des priorités ? La région Occitanie, notamment le Gard qui est mon département, demanderait de manière expresse la mise en place des TER qui nous manquent tellement !
Je répondrai d'abord aux critiques en soulignant qu'une demi-douzaine d'États européens se sont dotés d'un dispositif du type de l'agence, dont la particularité est qu'elle s'autorise à effectuer du report modal de la route vers le ferroviaire, contrairement aux agences d'autres pays qui fonctionnent par type de mobilité. De plus, ce modèle n'est pas unique, puisque la Nouvelle-Zélande l'a adopté.
Le problème de transparence nécessite à la fois, il est vrai, une disponibilité du président devant les assemblées parlementaires, et l'adoption d'une convention d'objectifs claire sur ce qui est attendu de l'agence, qui sera présentée par le président, débattue devant le conseil d'administration et constituera une feuille de route sous le contrôle des représentants élus du peuple que vous êtes. La première mouture de cette convention vient d'être terminée et sera adoptée avant la fin de cette année ; elle aura vocation à préciser les voies et missions pour gagner en transparence, efficacité et soutenabilité, ainsi que nos engagements, y compris en termes de « trajectoire démocratique » sur la manière de rendre des comptes.
J'attire votre attention sur le fait qu'il n'y a plus de sénateurs au conseil d'administration de l'agence à cause d'un léger télescopage législatif. En effet, le texte sur la moralisation de la vie politique prévoyant désormais que des parlementaires ne pouvaient pas siéger dans des instances en l'absence de disposition législative le prévoyant, en septembre dernier, le président Larcher a considéré plus prudent de ne pas nommer un sénateur au même moment. L'Assemblée nationale avait déjà nommé un représentant plusieurs semaines avant l'examen du projet par les députés. Il est temps de préciser dans la LOM qu'un sénateur doit siéger au sein du conseil d'administration de l'agence.
Le transfert vers les régions me choque d'autant moins que, par le passé, le transfert d'une partie du réseau national au réseau départemental n'a pas été accompagné d'une déresponsabilisation des élus locaux chargés des infrastructures. On peut en revanche s'interroger sur la soutenabilité de la responsabilité des collectivités locales concernant le financement des ouvrages ou leur capacité à y faire face, d'où l'intérêt des plans d'urgence en cas d'écarts entre les capacités financières de certaines structures et le montant des travaux. Globalement, le transfert n'a pas eu lieu dans de mauvaises conditions. D'ailleurs, en France, sur un million de kilomètres, on enregistre seulement 10 000 kilomètres de routes nationales, dont l'écrasante majorité est gérée dans les communes par des bureaux d'études dont les moyens sont loin d'être au niveau de ceux des départements, dont le réseau concédé représente aujourd'hui l'équivalent des routes nationales.
Un transfert vers les régions sera une bonne chose, à condition que ce ne soit pas un marché de dupes au détriment des élus locaux et que les conditions du transfert, notamment les coûts de remise en état du réseau, soient identiques à ce qu'aurait décidé le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema).
L'éligibilité éventuelle de travaux qui seraient conduits par d'autres opérateurs que l'État n'est pas impossible. La preuve : l'agence accompagne des projets de tramway ou de métro portés par des collectivités territoriales, sous la seule réserve que les infrastructures soient la réponse à un intérêt justifiant un financement par l'agence, et non le résultat de la « personnalité » du maître d'oeuvre.
Merci pour la qualité de vos précisions, qui satisfont en partie mes interrogations. Les recettes de l'Afitf déterminent nécessairement sa capacité d'action. Les investissements dans les infrastructures de transport représentent l'essentiel de l'aménagement du territoire et doivent à ce titre demeurer substantiels. Aux amendes radars et à la TICPE s'ajoutera, je l'espère, la vignette sur les poids lourds étrangers.
Par ailleurs, j'ai lu aujourd'hui dans la presse que les travaux de la route Centre-Europe-Atlantique qui traverse le pays d'est en ouest étaient en partie repoussés. Y-a-t-il un lien de cause à effet entre la baisse des recettes de l'Afitf et le report de ce chantier ? En outre, la ministre des transports s'est rendue à Clermont-Ferrand voilà un mois environ pour annoncer des investissements importants sur les lignes d'équilibres des territoires, notamment sur la ligne Paris-Clermont-Ferrand. Doit-on reconsidérer ces annonces en termes de montants ou de délais ?
Sur la route Centre-Europe-Atlantique, nous sommes engagés pour un montant global de 329 millions d'euros, qui est évidemment loin de financer l'essentiel des travaux. Nous avons déjà versé, en respectant les délais, quelque 260 millions d'euros, soit un delta de 60 millions d'euros par rapport aux objectifs, ce qui ne représente pas une impasse budgétaire absolue.
Les annonces concernant les projets à venir représentent précisément l'enjeu de ces prochaines semaines, en particulier celui de la recette nouvelle : si, à l'arrivée, nous avons 100 ou 150 millions d'euros de moins que prévu, ce n'est pas gênant sur un plan à cinq ans ; mais si cela se produisait tous les ans, ce serait le retour du scénario dans lequel l'agence se contenterait de payer les opérations antérieures à 2018, sans accompagner des projets nouveaux. Toutefois, je ne pense pas que l'Afitf soit la principale responsable des décalages entre les promesses qui ont été faites et les réalisations. Il faut plutôt regarder du côté des annonces de certains ministres ou hommes politiques éminents sans que la moindre inscription figure ensuite dans les comptes de l'agence. C'est pourquoi nous payons les engagements qui sont les nôtres, avec une prévision jusqu'en 2042, date de la dernière mensualité sur l'opération la plus longue : la L2 à Marseille.
Lors de votre dernier passage en commission, vous avez pris des engagements d'efficacité, de soutenabilité et de transparence, et avez déclaré que vous seriez particulièrement attentif aux projets structurants dans le Grand-Ouest, notamment du fait de l'abandon de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes. L'aménagement du barreau Massy-Valenton à hauteur de 300 millions d'euros est important, car la nouvelle liaison nous permettrait de nous rendre plus rapidement à l'aéroport d'Orly.
Autre projet soutenu par l'Afitf, la plateforme fret-rail-route de Saint-Berthevin a vocation à devenir un site majeur de transbordement de marchandises dans le Grand-Ouest. Quel est le soutien de l'agence sur ce projet ? Enfin, quel est le montant du soutien au projet de départementalisation de la RN 162 qui traverse le beau département de la Mayenne ?
Lorsqu'une route nationale est départementalisée, elle relève désormais du département et non plus de l'État. En compensation, et compte tenu de l'état du routier, une soulte est versée au département, mais non par l'Afitf, qui a vocation à procéder à des travaux de régénération routière. La soulte représente ce que l'État aurait investi au titre de la départementalisation. J'étais président du département lorsque j'avais plaidé pour la départementalisation de la RN 162. Mon collègue de Mayenne proposait au contraire de la laisser dans le giron de l'État pour profiter des crédits de l'Afitf. Je vis, je vous l'avoue, une sorte de mise en abîme assez incroyable en tant que président de l'agence, en voyant les Mayennais réclamer une départementalisation, parce qu'ils préféreraient que l'agence en soit le financeur. On est à front renversé !
J'ai rencontré le préfet de la région Pays-de-la-Loire tout récemment, puisque les projets que vous avez évoqués s'inscrivent d'abord dans le contrat d'avenir en cours de finalisation entre le Premier ministre et Christelle Morançais, la présidente de la région, et prévoyant un véritable plan d'infrastructures, non seulement dans la région Pays-de-la-Loire, mais également dans le Grand-Ouest et en Bretagne. Ce plan repose sur deux axes : la LGV pour desservir la Bretagne et l'aéroport international à Notre-Dame-des-Landes. La LGV a été inaugurée et l'aéroport n'est plus : il faut donc repenser l'ensemble des infrastructures de la région Pays-de-la-Loire.
À ma connaissance, une nouvelle rencontre est prévue jeudi entre le préfet de région et la présidente Morançais. Je ne m'avancerai pas sur les annonces d'Édouard Philippe ou de Christelle Morançais, mais l'agence sera le bras armé du financement des engagements qui seront tenus par les uns et les autres. Sachez que ces deux projets fortement soutenus par la région font l'objet d'un examen très attentif.
Merci pour ces explications très claires. Vous avez confirmé que les 1,2 milliard d'euros seraient tout de même versés au budget de l'Afitf. Néanmoins, ce montant sera forcément prélevé sur un autre budget. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur ce point ? S'agira-t-il du budget des infrastructures en lien avec la LOM ? De plus, le budget actuel de l'Afitf permet-il de répondre à tous les contrats de plan État-Région qui posent localement de gros problèmes ? Pour ce qui est du plan Vélo, j'ai bien compris qu'il ne serait pas complètement financé. Pourriez-vous nous en dire plus ? Enfin, les grands projets tels que la liaison Lyon-Turin et le canal Seine-Rhône seront-ils financés par un budget annexe ?
L'agence bénéficiera de 200 millions d'euros supplémentaires provenant des recettes de la TICPE, mais je ne sais pas qui ne les aura pas - je ne peux pas être plus clair ! Je mesure notre chance, et je me réjouis qu'Élisabeth Borne ait pesé de tout son poids dans les équilibres internes. Ces 200 millions assurent la soutenabilité de tous nos engagements antérieurs, donc également le financement des CPER. Pour l'heure, il nous reste un tout petit peu plus de 1,5 milliard d'euros de crédits de paiement à payer au titre des contrats de plan État-Région par rapport à ce que nous avons mandaté, soit au total, 12,7 milliards d'euros d'autorisations d'engagement et presque 10,2 milliards d'euros de crédits de paiement. Nous payons au fur à mesure en fonction du delta : comme nous ne procédons à aucune régulation budgétaire sur les contrats de plan État-Région, leur exécution prend généralement un ou deux ans de plus - c'est une façon de diminuer la dépense publique sans forcément assumer le décalage des calendriers.
Le plan Vélo, dans le cadre de la LOM, représente 50 millions d'euros par an. Il y a plusieurs manières de voir les choses : si on en fait une priorité, on trouvera les crédits correspondants, même avec un budget qui n'atteindrait que 2,3 ou 2,4 milliards d'euros. Autrement dit, en 2018, nous avons dépensé précisément 2,5 milliards d'euros, pour avoir puisé dans les 300 millions d'euros de réserves du début de l'année. Donc, nous avons à peu près tenu nos engagements concernant les dépenses, bien qu'il nous ait manqué 200 millions d'euros d'amendes radars. Or nous avons payé 350 millions d'euros à Ecomouv' la même année. Avec moins de 2,2 milliards d'euros, je ne sais pas comment nous ferons pour régler nos factures, car il nous faut au moins 100 millions d'euros pour la régénération routière, au moins 30 millions pour VNF et au moins 50 millions pour le plan Vélo, soit un total de 180 millions d'euros au minimum. À cela, il faut ajouter les projets nouveaux, d'où nos besoins de recettes nouvelles.
Monsieur le président, soyez rassuré : le Sénat devrait avoir un représentant au conseil d'administration de l'Afitf avant le 15 février, conformément à la loi du 3 août 2018 - elle vous a échappé ! -, texte « balai » de tous les organismes dans lesquels il était important que le Sénat soit représenté.
A priori, un sénateur sera présent et particulièrement attentif au vote de votre budget.
Je n'oserai pas vous dire que c'est la raison pour laquelle nous l'avons décalé !
Je vous remercie pour la clarté de vos propos, mais je trouve la situation plutôt désolante : à la veille de l'examen d'un texte sur les mobilités qui comporte un volet significatif sur les infrastructures, on ne sait toujours pas comment elles seront financées à long terme.
La période est effectivement particulièrement complexe, surtout si l'on se réfère à notre passé plutôt inquiétant concernant le financement des infrastructures. Nous sommes un des rares pays développés à ne pas savoir faire payer les externalités négatives des modes polluants des transports : c'est un véritable échec. D'après vous, le signe d'espoir serait l'adossement autoroutier. Mais quand on en connaîtra le coût complet pour les finances publiques, on s'interrogera autant que sur les premières concessions autoroutières, qui étaient excessivement coûteuses pour l'usager, variable d'ajustement dans cette affaire. Une autre variable d'ajustement semble être l'Afitf. Alors qu'il s'agit de long terme, vous établissez des hypothèses complexes sur les radars : vont-ils être réparés ou saccagés - et comment les financer de nouveau ?
Il y a deux mois, la délégation à la prospective avait organisé un colloque sur le financement des mobilités en invitant des Suisses : ils nous ont presque ridiculisés avec politesse en indiquant que le fonctionnement de leur système coûtait beaucoup moins grâce à une planification sur le long terme.
L'autre piste sérieuse que vous avez évoquée est un fléchage de la TICPE. Nous devons prendre nos responsabilités comme parlementaires et proposer une solution claire et nette d'avenir écologique, afin que le financement des infrastructures ne soit pas soumis à des aléas du quotidien.
Face à des dépenses de long terme, il est logique de prévoir des recettes de long terme, assorties à un adossement. À cet égard, répondre brièvement à une question complexe peut être problématique, car cela entraîne des raccourcis comme celui que vous venez de faire. Je ne pense pas que l'adossement soit la bonne recette partout. Je dis juste que, dans un contexte où l'on établit des dépenses urgentes sans les recettes équivalentes, exclure systématiquement l'adossement ne me semble pas être une bonne idée, d'autant que parfois, sans argent public, les travaux ne seront pas entrepris. Aujourd'hui encore, certains de nos territoires sont totalement enclavés et ne bénéficient même pas d'une route à deux fois deux voies - c'est le cas d'Aurillac.
Nous devons donc nous doter des moyens de nos ambitions. L'avancée de ces derniers mois a été la mise en place du Conseil d'orientation des infrastructures, qui a objectivé la situation ; il aurait d'ailleurs dû être instauré en 2005 en même temps que l'agence. Celle-ci a été créée pour assurer un financement de long terme, sans que les moyens lui soient attribués, puisque chacun de ses outils budgétaires a disparu au fil du temps, qu'il s'agisse des recettes des autoroutes, de l'écotaxe et, aujourd'hui, des augmentations théoriques de TICPE. Il est urgent de prioriser les dépenses et de garantir la soutenabilité des recettes. Nous avons effectivement des progrès à faire.
Je vous remercie de la clarté de vos propos, monsieur le président. Vous êtes victime des fautes de gestion du Gouvernement sur certains points. Les recettes des radars étaient à l'origine exclusivement réservées à la sécurité. Ce n'est plus le cas aujourd'hui, puisque l'État prélève désormais 22,5 % des amendes de radars pour rembourser la dette. Simplement, les chiffres de la répartition des recettes indiqués par les ministres sont inexacts. En outre, notre réseau est le plus cher d'Europe, avec des gaspillages invraisemblables et toutes sortes de dispositifs coûteux. Comment pouvez-vous diminuer ces coûts ? Enfin, avez-vous commencé une étude sur ce que pourrait rapporter la taxation des camions étrangers ?
La ventilation des amendes radars, par définition, je ne la connais pas. Je la connaîtrai à travers la présentation des textes budgétaires devant l'Assemblée et le Sénat comme n'importe quel citoyen, puisque le solde ne nous est versé qu'après les autres bénéficiaires. Le montant exact que ceux-ci ont perçu est, je pense, conforme à ce qui figurait dans la loi de finances initiale, contrairement à l'agence, puisque les collectivités locales n'ont pas perçu des recettes moindres. De plus, je n'ai pas entendu le ministère de l'intérieur se plaindre d'un moindre encaissement. Le solde qu'il nous reste est d'un montant inférieur de 202 millions d'euros à ce qui avait été inscrit dans la loi de finances, et cette somme est intégralement à la charge de l'agence.
Pour les routes, il faut tenir compte du coût de la route au mètre carré et du coût global du réseau routier. Et si l'on finance aussi, pour partie, l'aménagement du territoire, l'argument selon lequel ce coût serait le plus élevé d'Europe s'explique par la densité d'habitants dans nos campagnes et le nombre de communes.
En outre, notre patrimoine de routes nationales est très faible, puisqu'il ne représente que 1 % du patrimoine routier global, soit moins de 10 000 kilomètres sur 1 million. Toutefois, quand un échantillon est faible, les comparaisons sont plus complexes à établir. Le sous-investissement dans ce réseau national nécessite d'augmenter les crédits de régénération, ce qui n'est pas nécessairement le cas d'autres pays au réseau national plus vaste et nécessitant moins de travaux.
En ce qui concerne les poids lourds, l'enjeu est d'aller chercher un demi-milliard d'euros. Je souhaite que les poids lourds étrangers en supportent la plus grande partie : aujourd'hui, les transporteurs étrangers font le plein avant de franchir la frontière et ne paient pas de TICPE. Nos transporteurs, en s'acquittant de la TICPE et en respectant les règles en viennent en quelque sorte à financer doublement l'entretien du réseau, à la fois par les impôts qu'ils paient et par la TICPE.
On peut imaginer un dispositif qui soit compatible avec le droit européen, tout en tenant compte de ce qu'ont déjà réglé les uns et les autres pour l'entretien du réseau.
Monsieur Béchu, tout ce que vous nous dites aujourd'hui est très déprimant ! La LOM n'a pas de budget, le scénario retenu pour le COI n'est pas le plus ambitieux, l'État s'est défaussé des routes joyeusement - pour avoir présidé la commission voirie du conseil général du Rhône, je sais que les routes sont entretenues a minima depuis un certain temps...
Par ailleurs, sans revenir sur cette triste histoire des portiques, vous nous avez tout de même expliqué qu'elle avait plombé les finances de votre agence. De même, les péages ont disparu de la LOM d'un coup de baguette magique.
Que pensez-vous de l'idée d'un péage de transit ? Ne pensez-vous pas qu'un tel dispositif pourrait rapporter de l'argent ?
Que pouvez-vous nous dire de l'eurovignette ? Il y a quelque chose à faire à l'échelle européenne. On est en train de mollir sur cette question, comme sur d'autres, ce qui est assez affligeant. On a peur de notre ombre dès qu'il faut trouver des recettes !
Comme l'a souligné M. Jacquin, il faut une vision de long terme. Or vous n'avez évoqué que du bricolage, à la manière d'un Mac Gyver !
Enfin, que pensez-vous d'une contribution des autoroutes sur leurs bénéfices ? Cette question, là encore, semble avoir disparu des écrans radar.
Je voudrais d'abord dire à M. Gold qu'il me reste 9 millions d'euros à honorer au titre de Seine-Nord Europe et 388 millions pour Lyon-Turin. Il ne s'agit que de la fin des études : nous ne sommes aucunement engagés dans la réalisation de ces projets, qui ne figurent pas dans le budget.
J'ai bien peur de ne pas avoir vu suffisamment d'épisodes de Mac Gyver pour pouvoir aller au bout de votre comparaison, madame Vullien.
Ces derniers mois, au regard de ce qui se passe sur les ronds-points de notre pays, il a été davantage question de pouvoir d'achat que de création de nouveaux impôts pour nos programmes d'infrastructures. Je ne suis pas persuadé que ce soit mes propos qui soient « plombants », mais bien plutôt le contexte global que nous connaissons. Nos concitoyens s'interrogent sur le sens de l'impôt, sur son utilité. Les quelques gaspillages d'argent public qui peuvent exister servent à discréditer le principe même du consentement à l'impôt.
Il est nécessaire de mettre en place un fléchage clair. Il est important d'expliquer aux automobilistes qu'une partie de l'argent qu'ils dépensent à la pompe sert, par exemple, à réparer les nids de poule des routes qu'ils empruntent.
Je suis favorable à une vignette poids lourds dont l'essentiel du rendement serait assis sur les transporteurs étrangers, qui se comportent aujourd'hui comme des passagers clandestins, au sens financier du terme : ils utilisent nos infrastructures sans participer à leur entretien. Une telle situation est aussi source d'irritabilité générale, notamment pour les patrons français qui ne comprennent pas pourquoi, alors que leurs charges sociales sont plus élevées qu'ailleurs, que leurs tonnages à l'essieu sont moins favorables, que les règles du droit du travail sont parfois plus contraignantes qu'ailleurs, ils devraient en plus faire face à des concurrents étrangers qui abîment le réseau sans contribuer à son financement. C'est un peu comme si le dumping fiscal s'ajoutait au dumping social.
Il faut évidemment aller vers un dispositif qui évite d'alourdir la fiscalité des transporteurs français dans le contexte que nous connaissons.
En ce qui concerne le péage de transit, la loi ne permet pas aux maires de mettre en place des péages urbains. Cela étant dit, à six mois des élections municipales, imaginez-vous un seul maire de ce pays - à l'exception, peut-être du maire de Paris - vouloir se saisir de cette question ? On est en train de jouer sur les peurs. Aucune association d'élus n'a formulé une telle demande. Ne laissons pas penser ici que les élus locaux auront demain le pouvoir de taper sur les automobilistes, alors même qu'ils ne le souhaitent pas ! Ce ne serait un bon signal ni pour l'État ni pour les collectivités territoriales.
Si un exécutif local décidait, demain, de mettre en place des péages urbains, je souhaite qu'il ait le courage de réclamer un débat législatif concret sur cette question, à travers une proposition de loi ou un projet de loi.
Je plaide pour l'instauration d'une vignette. Si cela ne devait pas se faire, alors se poserait la question de dispositifs alternatifs. Prenons garde de ne pas brouiller les choses en allumant plusieurs feux. La priorité, c'est la vignette pour les transporteurs étrangers.
Monsieur Béchu, j'aimerais savoir dans quel état d'esprit vous vous trouvez. Voilà un an, vous avez postulé à la présidence de l'Afitf avec enthousiasme. Or l'horizon s'assombrit aujourd'hui avec l'annulation de la hausse de la TICPE, l'abandon de la taxe poids lourds, l'effondrement des amendes radar... D'ailleurs, en ce qui concerne ce dernier point, on ignore combien de radars ont été dégradés. Il semblerait que ce chiffre soit confidentiel. Est-ce l'enjeu que représente cette nouvelle recette qui conditionne votre non-renoncement ?
Vous avez parlé d'intermodalité. Serait-il possible de faire contribuer le transport aérien - je parle des lignes intérieures - sans détourner la convention de Chicago. Une taxe kérosène avait été évoquée...
Se contenter de faire coïncider un montant de recettes avec un montant de dépenses n'est pas l'exercice le plus passionnant d'un point de vue intellectuel ou politique. Je n'irai cependant pas jusqu'à dire que l'adversité me procure un plaisir supérieur à celui que m'auraient procuré des rendements à la hauteur de nos espérances.
Nous sommes à la croisée des chemins. La LOM, la trajectoire, l'instauration du COI, tout cela nous inscrit théoriquement dans un temps long sur le plan politique. Alors que l'annualité est déjà un gros mot et que l'infra-annualité - pour répondre à la dernière brève d'une chaîne d'information - va constituer le paroxysme de l'exercice politique, il est motivant de s'inscrire dans un temps différent, celui de l'intérêt général. Il s'agit de doter notre pays d'un plan crédible pour continuer de faire de ses infrastructures un élément essentiel de sa compétitivité et de son pacte social.
Ce sont ses infrastructures et leur densité qui permettent aujourd'hui à notre pays de ne pas reproduire ce qui arrive dans d'autres. Malgré tous les débats que nous tenons sur la désertification, nos campagnes, nos territoires ruraux sont beaucoup plus peuplés que ceux de beaucoup de nos voisins.
Voilà quelle est ma motivation dans ma fonction à un moment où la somme des incertitudes est autrement plus élevée que celle que j'avais imaginée. La question des ressources pérennes était devant nous, celle des radars s'est invitée, tant en termes budgétaires qu'en termes d'état d'esprit.
Faut-il taxer le transport aérien ? Aujourd'hui, ceux qui contribuent au financement de l'agence bénéficient de crédits d'investissement. Si la route finance quasiment 100 % et ne retrouve que 45 % de ce qu'elle a donné, il existe tout de même un lien entre ce qui est prélevé au transport routier et ce qu'il en reçoit en retour. La question de la contribution du transport aérien ne s'est jamais posée, car pas un seul centime d'euro de l'agence ne sert à accompagner des projets aériens.
Nous trouvons déjà un aéroport tous les quatre-vingts kilomètres. Par ailleurs, en ayant laissé se monter un certain nombre de plateformes, ce modèle présente une forme de gaspillage d'argent public. Je ne suis pas persuadé que trouver des relais de financement pour ces infrastructures de proximité soit une priorité.
L'un des objectifs de la LOM est d'améliorer la qualité du service des réseaux existants et d'en assurer la pérennité, de les moderniser. Réussir l'intermodalité est à ce prix.
S'il faut entretenir le réseau routier, il faut aussi entretenir le réseau ferroviaire - qui souffre parfois beaucoup - et notamment les petites lignes qui permettent une desserte fine du territoire. Quelle est votre visibilité sur cette question ?
L'intermodalité suppose de conjuguer plusieurs modes de déplacements : le vélo - peut-être, demain, les trottinettes - la voiture et le ferroviaire.
La régénération et l'entretien du réseau ferroviaire dépendent de la SNCF, pas de l'agence.
L'intermodalité constitue un enjeu primordial. La question des trottinettes et des vélos ne relève pas de l'État ni de l'agence. En revanche, comment faire en sorte que davantage de cyclistes se rendent à la gare à vélo ? C'est là que se pose la question des box sécurisés qui nécessitent un investissement autrement important que les simples arceaux fixés au sol.
Si l'on veut développer l'usage des vélos à assistance électrique, il nous faut davantage de box sécurisés, dont le nombre est extrêmement faible en France par rapport aux pays nordiques, par exemple.
L'objectif du plan vélo n'est pas la réglementation du free floating, l'ajout de bandes de peinture ou de signalisation - que les collectivités prennent leurs responsabilités -, mais l'adaptation des infrastructures. S'ajoute à la question des box sécurisés celle des ouvrages d'art, qui constituent souvent les goulots d'étranglement des déplacements à vélo.
Chacun d'entre nous connaît au moins un pont qui pose difficulté : c'est là que se rejoignent les pistes cyclables existantes et où les cyclistes se mélangent à la circulation routière. Il nous faut donc disposer de crédits pour créer des encorbellements légers de part et d'autre de ces ponts pour assurer la continuité cyclable.
C'est à portée de main, mais ces quelques crédits sont souvent la variable d'ajustement des arbitrages budgétaires des collectivités départementales dont la plupart n'a pas le prisme cycliste.
Oui à l'intermodalité qui permet de soutenir ces développements indispensables.
L'Afitf étant une autorité indépendante, j'imagine que ses décisions le sont tout autant.
En revanche, vous n'avez pas de rôle décisionnaire en ce qui concerne le montant des financements des projets, l'agence dépendant directement du ministère de l'écologie.
Or j'ai le sentiment que vous dépensez énormément d'énergie pour trouver ces financements. La Cour des comptes va même jusqu'à écrire que vous seriez un « alibi » - je ne suis pas certaine qu'elle ait utilisé ce terme... - permettant à l'État et au Gouvernement de s'affranchir d'un certain nombre de principes du droit budgétaire.
Je voudrais revenir sur vos objectifs, au premier rang desquels figure l'efficacité. Pourriez-vous nous dire comment vous envisagez de conjuguer cette efficacité qui vous tient tant à coeur ? S'agit-il de trouver davantage de financements ? Mais alors, pour quoi faire ?
Tout part de l'ordonnance du 2 janvier 1959 qui fixe le principe de l'annualité budgétaire : les parlementaires ne donnent d'autorisation budgétaire que pour un an.
Comment garantir des ressources pluriannuelles quand le caractère sacré de l'annualité budgétaire, dont la Cour des comptes est la garante, fait qu'il est impossible de préjuger de la volonté de nos représentants d'une année sur l'autre ? C'est cette contradiction entre consentement annuel à l'impôt et besoin d'une vision pluriannuelle qui est à l'origine de la création de l'agence.
La Cour des comptes a donc raison de dire que l'agence permet de contourner le principe de l'annualité : sa raison d'être est de donner une visibilité sur le long terme. En poussant le raisonnement, on arrive à des logiques inconciliables : soit on renforce l'annualité, mais on n'est alors plus capables de financer nos projets sur le moyen et le long terme, soit on renforce la pluriannualité et les parlementaires apprennent que les décisions budgétaires des vingt ans à venir sont déjà prises et qu'ils n'ont des marges de manoeuvre que sur les nouveaux projets.
La Cour n'a pas encore utilisé le terme d'« alibi » en ce qui me concerne. Sans doute parce qu'elle n'a pas auditionné l'agence depuis que je la préside... Je pense que la mise en oeuvre de la convention d'objectifs va nous permettre de répondre à une critique justifiée sur la difficulté à voir quels sont les objectifs de l'agence et le sens de son action.
Je pense qu'on a fait les choses dans le désordre : on aurait dû commencer par créer un Conseil d'orientation des infrastructures pour déterminer de quel type d'infrastructures notre pays devait se doter, définir le niveau d'investissement annuel minimum dans la régénération et décider où étaient les besoins essentiels de structuration ferroviaire, routière ou fluviale. Sur cette base, l'agence de financement des infrastructures de transport serait mandatée pour rendre possible ce qui a été considéré nécessaire par le Conseil d'orientation des infrastructures.
Or on a commencé par fonder l'agence et, quinze ans plus tard, on décide de créer le Conseil d'orientation des infrastructures... Le fait que la LOM pérennise le COI me semblerait aller dans le bon sens.
Enfin, il serait souhaitable que le président de l'agence en soit membre ès qualités, de manière à ce que celui qui préside le conseil d'administration et procède à un certain nombre d'arbitrages ne perde pas de vue la trajectoire et l'objectif poursuivi.
Qu'est-ce que l'efficacité, Madame la sénatrice ? C'est avoir une trajectoire et s'y tenir. Il s'agit donc de définir cette trajectoire, de se doter d'indicateurs permettant de savoir si on a été meilleur ou moins bon que les années précédentes - même si c'est anecdotique, puisque nous n'avons que 700 000 euros de dépenses de fonctionnement sur 2, 499 milliards d'euros de dépenses... Doit-on s'appliquer à nous-mêmes la limite de 1,2 % d'augmentation des dépenses que l'État demande aux collectivités territoriales ? Quels efforts doit-on mener en termes de transition écologique au sens large ? À quel rythme diminuer le montant de nos restes à payer ? À partir de quel montant peut-on les recharger ? Tels sont les indicateurs que je souhaite mettre en place. Je me réjouis de le faire prochainement en présence de l'un d'entre vous.
Vous avez répondu par anticipation à la question que je souhaitais vous poser. Le Gouvernement, au grand dam de la ministre des transports, avait programmé la disparition du Conseil d'orientation des infrastructures, qui ne figure pas, à ce stade, dans le projet de loi d'orientation des mobilités. Nous avons prévu de réintroduire et de pérenniser, dans ce texte, le COI. Le Gouvernement prendra ses responsabilités, le moment venu, à l'Assemblée nationale.
Je me réjouis de votre position. Je souhaitais connaître votre avis sur l'intérêt de ce Conseil pour déterminer les priorités en amont.
Je voudrais de nouveau tirer la sonnette d'alarme quant à la situation de VNF, à celle des infrastructures fluviales en général et à celle de l'ensemble de la filière économique concernée en rappelant deux chiffres : il faut entre 60 et 100 millions d'euros pour réparer ou reconstruire une écluse. Voilà qui donne la mesure des 110 millions d'euros de budget, revus à 80 millions aujourd'hui. Il ne faut pas être grand clerc pour comprendre qu'un tel montant ne permettra à aucun projet de régénération et de développement du réseau d'infrastructures fluviales de voir le jour en 2019...
Le second chiffre, c'est 1 %, soit la part des financements de l'agence consacrée depuis 2012 aux infrastructures fluviales, contre 28 % aux infrastructures routières.
Ne pensez-vous pas, Monsieur le président, qu'il est temps de rétablir des équilibres permettant au fluvial de se développer en France, à l'instar de ce qui se fait dans les autres pays européens, et de faire ainsi un pas en avant en matière de développement durable ?
Le budget que l'agence alloue à VNF ne concerne que la régénération, non les nouveaux travaux qui relèvent d'autres financements.
Vous avez raison : il faut augmenter ces crédits. Ces 110 millions d'euros ne constituent pas un cadeau. C'est la somme dont VNF a besoin pour que nous puissions préserver ce patrimoine et profiter de cet atout.
Pour autant, j'invite ceux qui ont voté le budget de l'État pour l'année 2018 à se réjouir : vous avez porté le niveau de financement de VNF à son plus haut historique. Nous sommes passés de 50 millions d'euros en 2015, à 70 millions en 2016 et à 80 millions depuis 2018.
Il faut remettre les choses en perspective : il manque des crédits, certes, mais nous avons fait la moitié du chemin en trois ans. Il faut poursuivre ce mouvement. Je peux vous assurer que nous regardons avec beaucoup d'attention et de bienveillance les demandes de VNF, notamment pour les raisons de développement durable que vous évoquiez, et ce d'autant plus que le nouveau secrétaire général de l'agence vient de VNF... lequel me précise à l'instant qu'une rénovation de 100 millions d'euros pour une écluse, c'est tout de même du grand gabarit ! Mais il est vrai que la facture peut monter très vite...
Comme vous l'avez souligné, notre réseau routier est très dense. C'est l'une des spécificités de notre pays. Le département du Lot, par exemple, compte 4 000 kilomètres de routes départementales. Ce réseau n'est sans doute pas étranger au charme bucolique de nos régions.
Cela étant dit, que pensez-vous de la trajectoire des amendes radars ? L'augmentation du nombre de radars a permis aux recettes de croître. Mais tout cela repose sur un comportement humain : à force de payer des amendes et de perdre des points, les conducteurs vont finir par être plus prudents, ce qui induira un tassement des recettes...
Par ailleurs, le mouvement des « gilets jaunes » ne remonte qu'à un mois et demi : la raison de la baisse constatée en 2018 est à chercher ailleurs. Comment bâtir un budget sur de telles recettes fluctuantes ?
L'instauration d'une vignette pour les transporteurs étrangers m'apparaît comme une évidence. Quels sont les freins à sa mise en place ? Quelles recettes en attendez-vous ?
Votre première question, madame la sénatrice, est presque d'ordre philosophique. Jusqu'où fonctionne la peur du gendarme ?
Nous serions tous ici ravis que plus un seul radar ne flashe qui que ce soit, non pas parce qu'ils auraient tous été bâchés, mais parce que tout le monde respecterait le code de la route. Entre nos souhaits et la réalité, les écarts sont substantiels.
Nous venons de fêter la première année de la dépénalisation du stationnement. Les collectivités n'ont pas toutes décidé de tourner la page des contraventions à 17 euros de la même manière : les tarifs varient d'un territoire à l'autre.
En tant que citoyen et en tant que maire, je me demande si les gens paient davantage leur stationnement là où les amendes sont les plus élevées. À moins que le comportement de chacun au regard des règles ne soit insensible au montant de l'amende ?
Je pense qu'il y a loin avant que les automobilistes ne respectent tous le code de la route. Le principal avantage des radars, ce n'est pas les recettes qu'ils génèrent, mais les vies qu'ils permettent de sauver. C'est une des raisons pour lesquelles décorréler le financement des infrastructures du produit des amendes aurait du sens.
Nous sommes beaucoup plus dans une logique régalienne de respect des règles pour éviter les morts et les blessés sur la route que dans une logique de recettes pour l'entretien du réseau routier. On peut même y voir une forme de contradiction : plus les gens respectent les limites de vitesse, moins il y aurait besoin de réaliser de travaux... À l'inverse, il est vrai que des routes en très mauvais état peuvent amener les conducteurs à respecter malgré eux les limites de vitesse... Mais je ne pense pas qu'il s'agisse du modèle de réseau routier dont nous rêvons.
L'agence a besoin d'un demi-milliard d'euros. Si nous n'allons pas chercher cette somme sur la vignette, il faudra la trouver ailleurs.
Vous m'avez interrogé sur les freins à l'instauration d'une telle vignette. Nous devons juste nous assurer de mettre en place un dispositif soutenable à l'échelon européen. L'obstacle est moins d'ordre législatif que communautaire : théoriquement, on ne peut traiter de manière différente des sociétés dans la même situation. Il faut donc caractériser en droit ce qui différencie la situation de ces sociétés étrangères de celle des sociétés françaises. J'ai quelques idées sur la manière dont nous pouvons procéder, mais je ne suis pas chargé de mettre en place cette architecture.
Je pense que vous serez amené à examiner les dispositifs sur lesquels travaille Élisabeth Borne dans les prochaines semaines. Elle vous en expliquera alors les modalités en détail.
Je suis très heureux d'avoir eu des précisions sur le fonctionnement de l'Afitf, dont j'entends parler depuis des années, et d'avoir pu retrouver le président Béchu. Quand il ira dans le Cantal, j'espère qu'il poussera jusque dans l'Aveyron pour profiter de ses 6 200 kilomètres de routes départementales.
Je voudrais évoquer la route nationale 88, appelée un jour, je l'espère, à avoir deux fois deux voies. Le département, que je présidais, et la région ont fait un premier pas en acceptant de cofinancer les travaux nécessaires pour un tronçon de cette route qui relie Lyon à Toulouse.
Département et région s'étaient engagés à financer 46 % des investissements ; aujourd'hui, nous sommes prêts à aller jusqu'à 50 %, voire davantage. J'ai du mal à comprendre pourquoi l'État ne donne pas son accord, tout impécunieux qu'il soit. Les collectivités pourraient financer les premiers travaux, et l'État n'intervenir que dans quatre à cinq ans.
Cela permettrait de désenclaver des départements ruraux et de contribuer ainsi à leur attractivité.
La route qui va me conduire à Aurillac me permettra de pleinement profiter des paysages de notre beau pays. En cinq heures et demie, j'aurai également le temps d'une inspection itinérante du réseau.
Nous aurons l'occasion de discuter du sujet que vous évoquez. Peut-être pourrai-je relayer quelques messages sur le niveau d'engagement des collectivités locales et leurs attentes.
Merci des réponses que vous avez apportées aux nombreuses questions des membres de notre commission, très mobilisés sur ces enjeux d'infrastructures et de financement. Nous aurons l'occasion d'en débattre plus avant dans les semaines à venir.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
La réunion est close à 17 h 55.