Votre première question, madame la sénatrice, est presque d'ordre philosophique. Jusqu'où fonctionne la peur du gendarme ?
Nous serions tous ici ravis que plus un seul radar ne flashe qui que ce soit, non pas parce qu'ils auraient tous été bâchés, mais parce que tout le monde respecterait le code de la route. Entre nos souhaits et la réalité, les écarts sont substantiels.
Nous venons de fêter la première année de la dépénalisation du stationnement. Les collectivités n'ont pas toutes décidé de tourner la page des contraventions à 17 euros de la même manière : les tarifs varient d'un territoire à l'autre.
En tant que citoyen et en tant que maire, je me demande si les gens paient davantage leur stationnement là où les amendes sont les plus élevées. À moins que le comportement de chacun au regard des règles ne soit insensible au montant de l'amende ?
Je pense qu'il y a loin avant que les automobilistes ne respectent tous le code de la route. Le principal avantage des radars, ce n'est pas les recettes qu'ils génèrent, mais les vies qu'ils permettent de sauver. C'est une des raisons pour lesquelles décorréler le financement des infrastructures du produit des amendes aurait du sens.
Nous sommes beaucoup plus dans une logique régalienne de respect des règles pour éviter les morts et les blessés sur la route que dans une logique de recettes pour l'entretien du réseau routier. On peut même y voir une forme de contradiction : plus les gens respectent les limites de vitesse, moins il y aurait besoin de réaliser de travaux... À l'inverse, il est vrai que des routes en très mauvais état peuvent amener les conducteurs à respecter malgré eux les limites de vitesse... Mais je ne pense pas qu'il s'agisse du modèle de réseau routier dont nous rêvons.
L'agence a besoin d'un demi-milliard d'euros. Si nous n'allons pas chercher cette somme sur la vignette, il faudra la trouver ailleurs.
Vous m'avez interrogé sur les freins à l'instauration d'une telle vignette. Nous devons juste nous assurer de mettre en place un dispositif soutenable à l'échelon européen. L'obstacle est moins d'ordre législatif que communautaire : théoriquement, on ne peut traiter de manière différente des sociétés dans la même situation. Il faut donc caractériser en droit ce qui différencie la situation de ces sociétés étrangères de celle des sociétés françaises. J'ai quelques idées sur la manière dont nous pouvons procéder, mais je ne suis pas chargé de mettre en place cette architecture.
Je pense que vous serez amené à examiner les dispositifs sur lesquels travaille Élisabeth Borne dans les prochaines semaines. Elle vous en expliquera alors les modalités en détail.