Intervention de Esther Benbassa

Réunion du 12 février 2019 à 21h45
Programmation 2018-2022 et réforme pour la justice – renforcement de l'organisation des juridictions — Article 45

Photo de Esther BenbassaEsther Benbassa :

Au sein de l’article 45 que nous examinons, l’alinéa 38 vise la suppression de l’automaticité de la procédure d’examen des peines d’emprisonnement d’une durée inférieure à deux ans, en vue d’un aménagement de peine.

En effet, les articles 474 et 723-15 du code de procédure pénale prévoient l’examen du dossier par le juge de l’application des peines selon la situation des personnes condamnées à des courtes incarcérations en vue de leur proposer une peine alternative à l’emprisonnement.

Rappelons donc que l’individualisation de la peine est le principe en matière d’exécution des sentences et que l’incarcération doit être considérée comme le dernier recours. Ce principe, inscrit à l’article 132-1 du code pénal, est purement occulté par notre gouvernement.

Pourtant, nous le savons, la courte incarcération a des effets délétères sur la personne condamnée. Elle peut également être la cause de suicide chez les personnes les plus vulnérables, à l’instar de ce jeune homme de 25 ans, condamné à une brève peine de prison pour délit de fraude dans les transports en commun, qui s’est donné la mort dans sa cellule de la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis quelques jours avant sa sortie, l’année dernière. J’ai justement visité cet établissement voilà quelques semaines.

Adeline Hazan a rappelé à ce sujet que les politiques publiques doivent « avoir le courage d’instaurer un système de régulation carcérale, en s’interrogeant enfin sur le sens des très courtes peines » et en développant des mesures alternatives à l’incarcération.

Nous ne pouvons que regretter le parti pris de l’exécutif et le recul net de tous nos principes fondateurs en matière de pénologie. Nous proposons en conséquence de supprimer l’article 45.

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