Intervention de Jean Louis Masson

Réunion du 14 février 2019 à 10h30
Délai d'intervention du juge des libertés et de la détention en rétention administrative à mayotte — Question préalable

Photo de Jean Louis MassonJean Louis Masson :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, si j’ai déposé cette motion, c’est en fait pour deux raisons.

La première est une raison de forme. Le Sénat avait voté un texte. L’Assemblée nationale, considérant que ce texte ne convenait pas, qu’il n’était pas pertinent, a voté, je ne dirai pas n’importe quoi, mais de manière totalement inconsidérée. Elle s’est rendu compte que ce qu’elle avait voté n’était pas bon. La logique aurait voulu que l’Assemblée nationale, reconnaissant son erreur, reprenne le texte du Sénat, ce qui n’est pas le cas.

Cela étant, en cohérence, il conviendrait que le Sénat ne change pas son avis sur un texte qu’il a voté voilà quatre ou cinq mois, et sur lequel il était en désaccord avec l’Assemblée nationale. Je ne vois pas pourquoi il en irait différemment.

Pourtant, pour diverses raisons, dont certaines sont tout à fait légitimes et compréhensibles, le Sénat s’aligne sur la nouvelle version proposée par l’Assemblée nationale. Nous avions notre propre logique ; il n’y a pas de raison d’en changer, quelles qu’en soient les conséquences. Je le répète, car on ne le dit pas assez, c’est l’Assemblée nationale qui a fait une erreur, donc nous n’avons pas à nous déjuger.

La seconde raison tient à la fois à la forme et au fond. J’en ai déjà parlé en commission ou en séance, sous forme d’un rappel au règlement. Il s’agit de l’application, que je trouve excessive, de l’article 45 de la Constitution. En effet, aux termes de cet article et de la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui en a découlé, il n’est pas permis de présenter des amendements sans rapport avec le texte en discussion.

Soyons clairs : je ne remets pas en cause la position du Conseil constitutionnel ni son interprétation de l’article 45. À la limite, je dirai qu’il a tout à fait raison de considérer que, si un amendement n’a aucun rapport avec le texte, il faut le rejeter.

Quand je soulève ce problème, on me renvoie toujours au Conseil constitutionnel, alors que, je le répète, je ne le mets absolument pas en cause. Ce que je critique, c’est l’interprétation de l’existence d’un lien avec le texte en discussion qui est retenue en l’espèce. La proposition de loi que nous examinons vise à rectifier une erreur concernant Mayotte dans la loi que nous avons votée voilà trois ou quatre mois. Selon moi, tout amendement qui concerne le même sujet, c’est-à-dire qui a pour objet de redimensionner des articles de ladite loi, concernant Mayotte et concernant l’immigration, n’a pas à être déclaré irrecevable au titre de l’article 45. Je ne vois pas pourquoi on décide tout d’un coup qu’un amendement qui concerne la même loi que celle qui est visée par la proposition de loi que nous examinons, qui concerne le même sujet, à savoir l’immigration, qui concerne le même département d’outre-mer, c’est-à-dire Mayotte, n’a rien à voir avec le texte à l’ordre du jour. C’est là qu’est le problème, et non pas au niveau de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, que j’admets parfaitement. Le problème, c’est l’interprétation de l’existence d’une connexité avec le texte que retient la commission des lois pour rejeter des amendements qui ne plaisent pas.

Malheureusement, on me renvoie toujours au Conseil constitutionnel en guise de réponse, mais, je le répète, je suis d’accord avec lui. Ce qui me gêne, c’est que l’on s’en serve pour évincer des amendements.

Comme je suis non inscrit, je suis souvent très seul quand j’interviens dans cette enceinte pour défendre mes idées, mais je puis vous dire qu’en commission des lois plusieurs membres de divers groupes politiques ont soulevé le problème. Je ne suis pas le seul. Aussi, il serait bon que l’on définisse ce que l’on entend par connexité d’un amendement avec le texte en cours d’examen.

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