Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a vingt-huit ans, je rendais mon uniforme de la gendarmerie après avoir servi militairement notre pays pendant un quart de siècle. Aussi est-ce avec gravité et émotion que je prends la parole aujourd’hui.
Depuis de nombreux mois, nos forces de sécurité sont victimes d’une nouvelle forme de violence. Des individus armés et parfaitement organisés s’infiltrent dans des manifestations pour en découdre. Ces délinquants sont là pour blesser, mutiler nos policiers et nos gendarmes. Ils s’en prennent à nos institutions et n’hésitent pas non plus à piller et à dégrader les biens privés ou publics.
Les chiffres sont alarmants : depuis le début du mois de novembre 2018, 430 gendarmes et plus de 1 000 policiers ont été blessés, certains gravement, voire très gravement.
Notre arsenal juridique n’est plus adapté à ce nouveau contexte de violence, et l’occasion nous est enfin donnée d’y remédier. Permettez-moi de saluer le travail du président Bruno Retailleau, qui est à l’initiative de cette loi dite « anti-casseurs ».
À l’occasion d’une première lecture à l’Assemblée nationale, ce texte a été amendé. Nos collègues députés ont d’ailleurs conservé l’esprit du dispositif et n’ont pas totalement dénaturé les principales mesures de la proposition de loi.
Monsieur le ministre, c’est bien là la preuve de l’utilité de notre institution, ainsi que de la nécessité d’un dialogue entre le Sénat et l’Assemblée nationale. Le message, je l’espère, sera entendu en haut lieu.
Toutefois, le Président de la République a fait savoir qu’il saisirait le Conseil constitutionnel, alors que cette loi n’a même pas encore été votée. C’est un message négatif transmis à nos forces de l’ordre confrontées aux agresseurs, à la violence des casseurs. Le Président doit clarifier sa position. Une loi de plus grande fermeté est en voie d’être votée, et nous attendons du Gouvernement, du Président de la République, un soutien sans ambiguïté à nos policiers, à nos gendarmes. Défendre et protéger nos forces de l’ordre ne peut être inconstitutionnel ; l’envisager, c’est déjà les affaiblir !
Le temps de la réflexion et de ce qui a été qualifié de « grand débat » est maintenant derrière nous. Il faut désormais agir, et agir vite. Combien de blessés supplémentaires faudra-t-il avant que ne soit prise la pleine mesure de la situation ? Monsieur le ministre de l’intérieur, voulez-vous continuer à être spectateur des agressions de nos forces de sécurité intérieure, vous qui êtes leur chef ?
La proposition de loi du président Retailleau est un texte d’équilibre, doté à la fois d’un volet préventif et d’un volet répressif. Il répond à une attente forte, à une sorte d’appel au secours du terrain pour quiconque écoute et côtoie nos policiers et nos gendarmes.
Interdire de manifester à une personne qui a commis des actes violents lors d’une précédente manifestation ou qui présenterait une menace d’une particulière gravité pour l’ordre public relève tout simplement du bon sens.
Il s’agit là d’un moyen concret d’écarter les individus les plus à même de commettre des agressions à l’encontre des forces de l’ordre. Lors des précédents mouvements sociaux, la principale difficulté rencontrée par les préfectures et les forces de l’ordre résidait dans l’impossibilité qui leur était opposée de prendre des mesures en amont d’une manifestation. Désormais, il sera possible d’anticiper et de prévenir des atteintes aux personnes et aux biens.
Une deuxième mesure consiste à donner davantage de moyens juridiques aux policiers et aux gendarmes. Lorsque cette loi aura été promulguée, le recours aux fouilles de sacs ou de véhicules se trouvera élargi afin d’éviter l’introduction d’armes au sein d’une manifestation.
De même, les mesures personnelles d’interdiction de manifester seront inscrites dans le fichier des personnes recherchées. Ce type de fichage sera immédiatement opérationnel, car la police, la gendarmerie et les douanes disposent de tablettes permettant un accès direct au fichier des personnes recherchées.
Je souhaiterais revenir sur une dernière mesure, relative à la dissimulation du visage au sein ou aux abords d’une manifestation. Si, dans notre droit positif, la dissimulation du visage est aujourd’hui répréhensible, la difficulté porte sur l’établissement du lien entre personnes au visage dissimulé et dégâts causés, puisque ces personnes sont difficilement identifiables hors flagrance.
Mes chers collègues, vous l’aurez compris, les maîtres mots de la proposition de loi de notre collègue Bruno Retailleau sont bon sens et efficacité. C’est la raison pour laquelle je voterai ce texte sans l’ombre d’une hésitation.
Nos policiers et nos gendarmes sont des personnes dévouées, …