J'ai participé à la quatrième réunion du groupe de contrôle parlementaire conjoint d'Europol, à Bucarest, les 24 et 25 février derniers.
Cette instance est chargée d'assurer « le contrôle politique des activités d'Europol dans l'accomplissement de sa mission, y compris en ce qui concerne leur incidence sur les libertés et les droits fondamentaux des personnes physiques ». Elle se réunit deux fois par an, en septembre à Bruxelles et à la fin du mois de février ou au début du mois de mars dans la capitale du pays qui assure la présidence de l'Union européenne.
La réunion a notamment été l'occasion d'entendre plusieurs responsables d'Europol et de permettre aux parlementaires membres du groupe de contrôle de relancer la collaboration de leur propre pays avec l'agence.
La directrice exécutive d'Europol, Catherine de Bolle, qui a pris ses fonctions l'année dernière, a souligné la montée en puissance de l'agence en 2017 et expliqué que les États membres y font de plus en plus appel. Ainsi, le nombre d'objets de leur base de données a augmenté de 23 % en 2018, tandis que le nombre de requêtes des États membres augmentait de 64 %. La stratégie « Europol 2020 + » vise à poursuivre ce mouvement tout en développant le rôle de l'agence, qui passerait de la collecte de l'information au traitement de celle-ci et renforcerait sa réponse à la cybercriminalité, qui mérite d'être traitée au niveau européen. Pour cela, sa directrice exécutive souhaite qu'Europol soit « à la pointe de l'innovation et de la technologie ». Cela implique naturellement des investissements importants dans les technologies de l'information et de la communication.
Catherine de Bolle nous a fait part de ses interrogations sur les moyens dont disposera l'agence dans le cadre financier pluriannuel 2021-2027 pour faire face à cette montée en puissance. La proposition actuellement sur la table prévoit une diminution de 10 % des moyens d'Europol, qui s'explique en partie par la mise en oeuvre du parquet européen, financée partiellement par le redéploiement des crédits de l'agence. Toutefois, les rôles du parquet européen et d'Europol ne se confondent pas, et la présidence de la commission Libertés civiles, justice et affaires intérieures du Parlement européen en est bien consciente.
Nombre des préoccupations des parlementaires ont porté sur les conséquences du Brexit : d'une part, un possible retour de la violence le long de la frontière irlandaise en cas d'absence d'accord, et, d'autre part, un risque d'affaiblissement de la coopération policière du fait du départ des Britanniques. En effet, la directrice exécutive considère que la coopération se poursuivra mais note que certains outils, comme le mandat d'arrêt européen ou le système d'échange d'informations, ne seront plus disponibles, a fortiori en cas de Brexit dur. Plusieurs parlementaires sont également intervenus pour souligner la nécessité, concernant le sujet des migrations, d'une meilleure coopération d'Europol avec les autres agences européennes, à commencer par Frontex. Les choses avancent, mais nous avons encore des progrès à faire.
Enfin, Catherine de Bolle s'est réjouie du rôle actif des parlementaires et a souligné que nous devions être les relais d'Europol à l'égard de nos Parlements et de nos instances. Elle nous a encouragés à nous rendre au siège de La Haye ; Sophie Joissains et moi-même saisirons cette occasion les 25 et 26 avril prochains et vous en rendrons compte ultérieurement.
Le directeur adjoint des opérations nous a ensuite présenté l'état des menaces cybercriminelles en 2019, au sein desquelles il a notamment distingué les menaces liées aux monnaies virtuelles comme le cryptojacking : cette criminalité est florissante et dépasse les frontières, mais une opération au Royaume-Uni a conduit à l'arrestation d'un individu ayant détourné 10 millions d'euros de monnaie virtuelle.
Il a également évoqué la subtilisation de données personnelles afin de mener des cybercrimes, les marchés noirs du darknet, contenus invisibles difficiles à détecter, et enfin les contenus pédopornographiques. La cybercriminalité est un enjeu majeur pour la coopération organisée par Europol.
Par ailleurs, Sir Julian King, le commissaire anglais à la sécurité de l'Union, est intervenu brièvement pour souligner la réalité et la complexité des menaces et le bienfondé d'un outil comme Europol, ce que nous avons tous reconnu.
La réunion a été l'occasion d'aborder la question de la protection des données traitées par Europol, qui fait partie de la mission du groupe de contrôle. Depuis 2016, le traitement des données personnelles est attribué à un contrôleur européen de la protection des données, Giovanni Buttarelli. Concrètement, le contrôle est effectué par un conseil de coopération réunissant le superviseur européen et les superviseurs des États membres, et dont le président est François Pellegrini, par ailleurs commissaire à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil). Les recommandations faites à Europol permettent l'évolution de la législation.
Nous avons eu un échange sur la nomination du délégué du groupe de contrôle au conseil d'administration d'Europol. À mon sens, il faut conserver le système actuel qui prévoit de nommer un membre du pays qui détient la présidence de l'Union européenne. Certes, cette alternance tous les six mois n'est pas optimale pour contrôler mais c'est le système de la présidence tournante de l'Union qui est alors en cause. Néanmoins, cette discussion a été reportée en septembre, voire à plus tard.
Le groupe de contrôle parlementaire conjoint tiendra sa prochaine réunion sous présidence finlandaise, en septembre prochain.