Intervention de Laurent Duplomb

Commission des affaires économiques — Réunion du 4 avril 2019 à 16h15
Suivi de la mise en application des mesures de la loi egalim — Audition de Mme Agnès Pannier-runacher secrétaire d'état auprès du ministre de l'économie et des finances

Photo de Laurent DuplombLaurent Duplomb :

Plus d'un an après le discours d'Emmanuel Macron à Rungis, qui avait mis un peu de baume au coeur des agriculteurs qui ont eu le tort de le croire, nous devons faire un constat imparable et factuel : l'année 2017-2018 a engendré pour les éleveurs une baisse de revenus de 1 800 à 3 500 euros par unité de main d'oeuvre (UMO). Le plus lourd tribut a été payé par ceux qui ont effectué la montée en gamme que vous souhaitiez, comme l'agriculture biologique, avec une baisse de 8 900 euros. La montagne - un secteur qui devrait être protégé pour garder une agriculture sur la totalité des territoires - n'y échappe pas, avec une baisse de 6 000 euros. Ces baisses sont liées à une augmentation très forte des charges et par la sécheresse de 2018.

Sur Egalim, ce que nous disent les entreprises, c'est que plus des trois quarts d'entre elles ont dû concéder encore une fois une baisse des tarifs à la grande distribution : ils demandaient en moyenne plus 3, et ils ont eu moins 1 ! Si c'est faux, c'est que ceux qui le disent sont des menteurs !

Les grandes et moyennes surfaces (GMS) - ma collègue Anne-Catherine Loisier vous le confirmera - ont augmenté de 10 % leurs cartes de fidélité, de façon à ne pas perdre leurs clients. Sur ces 10 %, 3 points iront à leurs marges et les 7 points restant serviront à favoriser les marques distributeurs. Or ce sont les marques d'entreprises qui font la valeur ajoutée de nos entreprises territoriales, qu'elles soient coopératives ou privées, et qui valorisent le prix des producteurs. Tout cela ne fera que mettre encore un peu plus l'agriculture française à la botte des grands de la grande distribution...

Dernière chose, dont j'ai parlé à la directrice de la concurrence : les GMS sont en train de s'organiser au niveau européen de façon à rétribuer une partie de ces 10 % aux grandes marques, qui négocieront non plus au niveau national mais au niveau européen et bénéficieront aussi de leur part du gâteau - il est bien normal que Coca-cola récupère une part de l'augmentation des prix, qui devaient normalement bénéficier uniquement aux agriculteurs...

Enfin, il est anormal de ne parler que du titre premier de la loi. N'oublions pas que le titre II, c'est une nouvelle stigmatisation des agriculteurs - qui se trouvent déjà dans une situation psychologique suffisamment compliquée -, c'est une augmentation des charges que nous constatons dès cette année par une baisse du revenu, c'est l'interdiction des rabais, remises et ristournes sur les produits phytosanitaires, c'est une augmentation de 100 millions d'euros de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), c'est la séparation du conseil et de la vente, qui fera augmenter le prix du conseil aux agriculteurs.

Si ruissellement il y a, c'est celui de l'orage en plein été, c'est-à-dire l'érosion, l'érosion de notre agriculture et de nos agriculteurs.

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