Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 14 septembre 2006 à 15h00
Prévention de la délinquance — Article 5

Photo de Roland MuzeauRoland Muzeau :

Dans une troisième observation, qui porte sur la sécurisation des règles de partage d'informations entre travailleurs sociaux intervenant auprès d'une même famille, il précise que ce dispositif diffère sensiblement de celui qui a été retenu dans le cadre de la protection de l'enfance, ce qui risque de semer la confusion parmi les travailleurs sociaux.

Enfin, et j'enfonce le clou, M. About indique que sa préférence va au mécanisme de secret professionnel partagé, plus protecteur et mieux encadré, retenu par le projet de loi réformant la protection de l'enfance, et suggère que nous nous en inspirions pour amender le présent texte. Malheureusement, ce n'est pas possible, car les amendements de l'UC-UDF et de notre collègue M. Lardeux, qui étaient pourtant pertinents, ont été retirés.

La volonté du Gouvernement est ici clairement exprimée : il veut organiser le dépistage des prétendus « asociaux » dès la maternelle et organiser sa politique de répression en direction des plus démunis.

Messieurs les ministres, vous encouragez la stigmatisation des familles pauvres et vous voulez transformer les caisses d'allocations familiales en organismes de contrôle et de délation des familles. Le maire deviendrait le pivot de ce dispositif, en tant que détenteur d'éléments confidentiels qui lui seront obligatoirement fournis par les professionnels sociaux et éducatifs. Il se trouverait doté d'un pouvoir discrétionnaire énorme, qui lui permettrait d'accroître la répression policière sur les adolescents.

Son pouvoir ne s'arrêterait malheureusement pas là puisqu'il aurait aussi la possibilité de sanctionner les familles en leur imposant des stages de responsabilité parentale ou en plaçant leurs allocations familiales sous tutelle, tout en ayant connaissance de la profonde détresse dans laquelle elles sont plongées. Pénaliser toute une famille pour un enfant qui commet des actes délictueux, ce n'est pas la formule que nous avions envisagée en juin, monsieur Bas !

Les nouvelles fonctions dévolues aux CAF sont unanimement contestées. Le conseil d'administration de la CNAF est ainsi sorti de sa réserve, en s'inquiétant ouvertement de cette dérive.

Les CAF souhaitent fondamentalement demeurer des organismes sociaux et non pas être transformées en auxiliaires de police. Elles ont pour mission une redistribution plus juste des richesses et, en aucun cas, elles ne sont des organes de sanction ou de délation. C'est pourquoi la transmission au maire de données relatives aux enfants scolarisés s'avère particulièrement inadmissible.

En conclusion, je rappellerai que l'empilement des textes législatifs relatifs aux familles que vous considérez comme « mauvaises » devient caricatural. La suspension des allocations familiales a été instaurée, puis supprimée. Quant aux stages parentaux, ils existent déjà. En outre, voilà quelques mois, cette même majorité a mis en place le contrat de responsabilité parentale. Plus récemment encore, le projet de loi réformant la protection de l'enfance a modifié la législation relative aux conseillères en économie sociale et familiale.

Pourquoi un tel acharnement législatif sur les mêmes catégories de population ? Pourquoi multiplier à tout prix les possibilités de sanction et de culpabilisation à l'encontre des familles les plus démunies ?

Cette majorité, nous le savons, souhaite par ce biais accroître la confusion dans l'opinion publique entre pauvreté, difficultés sociales, difficultés scolaires et délinquance, voire - et c'est plus grave - entre délinquance et immigration. Nous nous opposons fermement à une telle conception de la société et c'est pourquoi nous défendrons la suppression de chacun des articles suivants.

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