Intervention de Vincent Segouin

Réunion du 7 mai 2019 à 14h30
Lutte contre les espèces toxiques envahissantes — Vote sur l'ensemble

Photo de Vincent SegouinVincent Segouin :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi n° 215, présentée par notre collègue Agnès Canayer, vise à renforcer les pouvoirs de police du maire dans la lutte contre l’introduction et la propagation des espèces toxiques envahissantes.

Cette proposition de loi tend plus spécifiquement à donner des pouvoirs au maire, afin qu’il puisse lutter contre les frelons asiatiques. Les maires sont en effet régulièrement interpellés par leurs administrés, qui, inquiets, scrutent et détectent un nid sur leur propriété, sur des espaces privés voisins ou même sur des espaces publics. Ils n’ont cependant aucune compétence lorsque le nid est situé sur une propriété privée dont le propriétaire refuse de donner l’autorisation de pénétrer ou d’agir, sauf s’il existe une menace grave et imminente pour la sécurité publique.

Je commencerai mon intervention par une rapide présentation des espèces exotiques envahissantes.

L’introduction de nouvelles espèces sur le territoire national n’est pas un phénomène récent. Avec le développement des échanges au niveau mondial, il s’est toutefois accéléré et de nombreuses espèces végétales ou animales arrivent sur le sol national. Au total, 14 000 sont comptabilisées. Parmi elles, 10 % s’acclimatent et 10 % de ces 10 % deviennent invasives, avec des conséquences écologiques, économiques ou sanitaires néfastes. On les appelle les espèces exotiques envahissantes.

Certaines ont un impact écologique, avec la création de désordres au niveau de l’écosystème faunique et floral : elles représentent ainsi la troisième menace pour la biodiversité à l’échelon mondial. D’autres ont un impact économique, avec une menace sur l’agriculture, par exemple, ou sanitaire, avec une menace pour la santé publique, comme c’est le cas de l’ambroisie à feuilles d’armoise, qui provoque des allergies.

Les pouvoirs publics se sont rapidement rendu compte de la nécessité de coordonner au plus haut niveau la lutte contre ces espèces. Une convention internationale a tout d’abord été signée en 1992, avant que le sujet ne soit appréhendé à l’échelon européen en 2004. La notion d’espèces exotiques envahissantes a fait son apparition dans le droit national en 2016.

La lutte contre les espèces exotiques envahissantes n’est efficace qu’au début de leur implantation sur le territoire. À ce moment-là, une opération rapide peut permettre d’éradiquer les spécimens d’une espèce sur le territoire à moindre coût. Après cela, l’espèce s’est diffusée et la stratégie de lutte doit s’orienter vers une gestion de la population globale et une protection des espèces autochtones qu’elle menace. Cette stratégie est alors beaucoup plus coûteuse.

En France, c’est le préfet qui dispose du pouvoir de police pour lutter contre l’introduction et la propagation de ces espèces : il peut notamment intervenir à ce titre sur les propriétés privées.

En cas de menace grave et imminente pour la santé publique et la sécurité, le maire peut également prendre, à défaut des propriétaires, toutes les mesures nécessaires pour mettre fin à cette menace au titre de son pouvoir de police générale ; c’est l’article L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales. Il peut, dans ce cadre, ordonner la destruction de certaines espèces exotiques envahissantes.

Mais revenons plus précisément au frelon asiatique.

Une seule reine frelon asiatique a été introduite en France en 2004 à l’intérieur de poteries importées de Chine. Présent dans treize départements en 2006, le frelon asiatique avait envahi cinquante-six départements en 2012 et a depuis conquis la France métropolitaine entière, à l’exception de la Corse.

Le cycle de vie des frelons asiatiques est annuel. Les reines sortent de l’hibernation au printemps et fondent de nouveaux nids. Pendant l’été, les frelons chassent les insectes pour nourrir leurs larves, surtout les abeilles et les guêpes. Puis, la colonie meurt naturellement en hiver. Seules les femelles fécondées survivent en se protégeant du froid. Ils ne reviennent jamais dans le nid de l’année précédente ; il faut le savoir. Leur piqûre n’est pas plus dangereuse pour l’homme que la piqûre du frelon européen ou que celle des guêpes. En revanche, les frelons asiatiques représentent un vrai danger pour les abeilles domestiques, donc pour l’apiculture.

La stratégie d’éradication des nids n’est pas très efficace et coûte actuellement très cher. Nous ne constatons aucune diminution du nombre de frelons asiatiques. Au vu de la vitesse de propagation de l’espèce, il semble aujourd’hui que son éradication soit, sinon impossible, du moins très difficile. La recherche se concentre alors sur la protection des ruches.

Le frelon asiatique est classé parmi les espèces exotiques envahissantes et les dangers sanitaires. Le pouvoir de police spéciale en la matière appartient donc au préfet. Cependant, au titre de son pouvoir de police générale, le maire peut intervenir en cas de menace grave et imminente pour la sécurité publique. Je me suis attaché à décrire dans mon rapport les possibilités dont disposent les maires pour lutter contre le frelon asiatique et pour répondre aux sollicitations de leurs administrés en la matière.

La proposition de loi qui nous occupe aujourd’hui vise à donner de nouveaux pouvoirs au maire dans la lutte contre les espèces exotiques envahissantes.

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