Pour ce faire, monsieur le ministre, vous nous proposez d’instaurer une taxe sur les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 750 millions d’euros au titre des services fournis au niveau mondial et à 25 millions d’euros au titre des services fournis en France. Cette taxe représentera 3 % sur les produits bruts tirés des services de ciblage publicitaire, de la transmission de données personnelles et de l’activité des places de marché du commerce en ligne.
Certes, comme plusieurs orateurs l’ont souligné, l’assiette retenue n’est pas la solution idéale. Taxer le chiffre d’affaires, c’est taxer sans distinction l’entreprise en pleine croissance qui n’enregistre pas ou peu de résultats et celle dont les résultats sont élevés. La taxation des bénéfices eût été préférable ; mais, nous le savons, elle nécessiterait la renégociation de conventions fiscales bilatérales.
La commission des finances, dont je salue le travail important, a longuement débattu de cette question. Elle a apporté au texte plusieurs modifications visant à le sécuriser et à limiter à trois années sa première mise en application – nous en reparlerons dans la discussion des articles.
Mes chers collègues, face aux géants du numérique, qui se jouent des règles fiscales traditionnelles, l’occasion nous est donnée de réaffirmer la souveraineté de l’État, garant de l’intérêt général et protecteur de l’équité fiscale.
Vous l’aurez compris, les sénatrices et les sénateurs du groupe Union Centriste se prononceront en faveur de la création de la taxe sur les services numériques, même s’il ne s’agit que d’un premier pas, avec une recette estimée à 400 millions d’euros en 2019, et qu’une solution internationale doit être trouvée.
J’en viens à l’article 2 du projet de loi, qui prévoit de déroger à la trajectoire de baisse du taux de l’impôt sur les sociétés pour les plus grandes entreprises, celles réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 250 millions d’euros, et seulement pour la fraction du bénéfice imposable supérieure à 500 000 euros. Il leur serait appliqué, pour la seule année 2019, le taux de 2018, soit 33, 33 %.
J’entends l’argument selon lequel, pour donner de la visibilité aux acteurs économiques, on ne devrait pas changer les règles du jeu en cours de route. Évidemment, nous partageons tous cet objectif. Mais nous pouvons aussi considérer que nous avons une exigence de responsabilité au regard de notre déficit public, que nous souhaitons tous diminuer : celle de trouver les moyens de financer les dépenses engagées, que nous avons nous-mêmes adoptées en décembre dernier, pour redonner 10 milliards d’euros de pouvoir d’achat aux Français.
J’estime, pour ma part, que le contexte légitime la mesure proposée, qui devrait rapporter 1, 7 milliard d’euros cette année, étant donné qu’elle ne remet pas en cause l’objectif d’abaissement du taux de l’impôt sur les sociétés, qui reste fixé à 25 % à horizon de 2022, et, j’y insiste, qu’elle concernera seulement les entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse 250 millions d’euros.
La disposition prévue à l’article 2 constitue ainsi un levier utile, parmi d’autres, pour compenser la dépense substantielle que le Gouvernement et le Parlement ont décidée en faveur du pouvoir d’achat des Français. Au sein du groupe Union Centriste, nous serons nombreux à la voter !