Monsieur le ministre, le 6 mars dernier, à l’occasion de la conférence de presse de présentation du présent projet de loi, vous faisiez preuve d’une grande ambition : « nous voulons, avec cette taxation des géants du numérique, inventer la fiscalité du XXIe siècle » ; vous venez de rappeler cette volonté.
Cela dit, plus prosaïquement, ce projet de loi vise surtout à dégager des économies pour financer, en partie, les mesures de pouvoir d’achat adoptées en décembre dernier, au plus fort du mouvement des « gilets jaunes ». Vous l’admettiez vous-même le 6 mars : cette taxe « est une question d’efficacité pour nos finances publiques ». Les mesures de pouvoir d’achat adoptées au travers de deux textes représentent respectivement 3, 7 milliards et 7, 3 milliards d’euros, soit 11 milliards d’euros de nouvelles dépenses.
Le présent projet de loi améliorera, au mieux, les recettes de l’État de 2, 2 milliards d’euros en 2019 : de 1, 7 milliard d’euros au titre du report de la baisse d’impôt sur les sociétés pour les grandes entreprises et de 500 millions d’euros pour la taxe sur les géants du numérique, selon l’estimation très optimiste du Gouvernement. Nous sommes loin de l’équilibre… Nous avons pris bonne note de la volonté du Gouvernement de réaliser 1, 5 milliard d’euros d’économies sur le budget de l’État ; peut-être M. le ministre pourra-t-il nous apporter quelques informations à ce sujet, encore trop peu précisé et documenté.
Les nouvelles mesures annoncées fin avril, à l’issue du grand débat national, vont doubler le montant de la facture, qui sera en réalité essentiellement financée par le déficit public, donc par la dette, les recettes nouvelles discutées ce soir n’ayant qu’un caractère temporaire.
Aujourd’hui, seules les entreprises, notamment les champions français, sont mises à contribution pour payer la baisse de la fiscalité pesant sur les ménages. Cela passe tout d’abord par le report de la baisse de leur fiscalité : quel crédit sera donné, dans la suite du quinquennat, à la parole du Gouvernement ? Cela passe ensuite par une nouvelle taxe, qui affectera non pas uniquement les géants américains, mais aussi des entreprises françaises, et qui ne résoudra aucun des problèmes soulevés par l’e-commerce.