Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le Conseil européen s’est accordé sur un programme stratégique pour la période 2019-2024 sur la base de quatre priorités. La quatrième priorité a l’ambition de réussir l’amalgame entre la Realpolitik, chère aux États-Unis de Nixon et de Trump, et un idéalisme européen de bon aloi, consistant à promouvoir les intérêts et les valeurs de l’Europe sur la scène mondiale. Voyons son application pratique dans les relations avec la Russie.
Le Conseil européen vient de décider unanimement de renouveler pour une période de six mois les sanctions économiques contre la Russie. Si cette décision n’a rien d’étonnant, il n’en est pas de même de l’absence d’invitation aux cérémonies du 6 juin dernier du président Poutine.
L’Allemagne à l’origine de la guerre était invitée, mais pas la Russie, qui a détruit 80 % des divisions du IIIe Reich et sacrifié 27 millions d’habitants pour lutter contre le nazisme. Ce n’est certainement pas un hasard si la réponse du président Poutine à ce camouflet a été de recevoir, ce même 6 juin, dernier le président de la Chine pour renforcer une coopération bilatérale, déjà très étroite. Dans cet état d’esprit, a été annoncé le choix très probable de la technologie chinoise Huawei pour équiper les futurs réseaux 5G en Russie.
Le lendemain, le 7 juin, le monde entier a pu découvrir que la flotte russe croisait en mer de Chine aux côtés de la flotte chinoise. Ce constat a été fait à l’occasion d’une quasi-collision entre un navire de guerre russe et un navire de la septième flotte des États-Unis, dont la mission est d’empêcher la Chine de s’approprier les eaux de la mer de Chine méridionale.
Il faut tout de même noter que les pays européens qui veulent durcir et prolonger indéfiniment les sanctions contre la Russie, quitte à la pousser ainsi dans les bras de la Chine, sont ceux qui contribuent le moins à la construction de l’Europe de la défense, chère à Emmanuel Macron.
La Pologne, la Lituanie et la Lettonie apportent régulièrement par milliards leur contribution au complexe militaro-industriel américain. Aucun pays de l’Union européenne n’a d’ailleurs acheté de Rafale…
Par ailleurs, les sanctions économiques occidentales ont amené la Russie à rechercher et à atteindre ses objectifs d’autosuffisance alimentaire. En 2017, la Russie est devenue le cinquième exportateur mondial de céréales. Pendant ce temps, les sanctions font perdre aux pays de l’Union européenne près de 5, 9 milliards de dollars d’exportations dans le secteur agroalimentaire.