Plusieurs personnes rencontrées nous ont également indiqué que l'une des principales sources de complexité dans la gestion des dispositifs d'hébergement était l'accueil du public migrant.
L'hébergement des demandeurs d'asile et des réfugiés fait l'objet d'une prise en charge par des dispositifs spécifiques, sous la responsabilité du ministère de l'intérieur. Le dispositif national d'accueil des demandeurs d'asile (DNA) comprend un parc d'hébergement de 86 000 places, réparties en diverses structures. Malgré l'existence de ce dispositif dédié, l'importance des flux migratoires a conduit à la création, souvent en urgence, de places d'hébergement pour l'accueil des migrants au sein du parc généraliste, financées par le programme 177. Des clarifications progressives ont été opérées entre les financements des deux dispositifs.
Toutefois, la saturation du parc dédié aux demandeurs d'asile et le principe d'accueil inconditionnel qui gouverne l'hébergement généraliste n'ont pas fait disparaître la porosité entre les deux dispositifs. Lors d'une enquête réalisée par l'État en mars 2019, 11 400 demandeurs d'asile ont été comptabilisés dans l'hébergement généraliste, soit 8 % des places du parc.
Il résulte de cette situation d'importantes difficultés de gestion. Les services de l'État sur le territoire doivent agir sous la responsabilité de deux tutelles : le ministre de l'intérieur et le ministre chargé du logement. Par ailleurs, l'accueil de demandeurs d'asile ou de réfugiés complexifie le financement des structures d'hébergement généraliste, au regard du principe de spécialité budgétaire. En effet, les services déconcentrés ont pour instruction d'identifier la présence de demandeurs d'asile dans l'hébergement généraliste afin que les places occupées par ce public soient facturées au programme « asile et immigration ». Enfin, les centres d'hébergement d'urgence accueillant des demandeurs d'asile doivent accompagner ces personnes dans des démarches pour lesquelles les centres d'accueils pour demandeurs d'asile (CADA) sont plus à même d'offrir un accompagnement satisfaisant.
Nous proposons donc de mettre fin à l'accueil de publics relevant du dispositif national d'accueil au sein du parc généraliste, en poursuivant l'accroissement du nombre de places dédiées aux demandeurs d'asile et en renforçant la coordination interministérielle.
Pour les personnes en situation irrégulière, qu'elles soient déboutées du droit d'asile ou hors du parcours de l'asile, la situation est différente. Ces personnes relèvent de l'accueil inconditionnel et peuvent donc être hébergées au sein du parc généraliste. Plusieurs opérateurs nous ont d'ailleurs indiqué qu'au sein de leur parc d'hébergement généraliste, la présence de personnes en situation irrégulière représentait environ 50 % du public accueilli.
Or, ces personnes ne peuvent prétendre à un logement social ou à un emploi : leur sortie de l'hébergement d'urgence est donc très compliquée, ce qui contribue à la saturation du parc et à l'allongement des durées de séjour. Nous estimons que les personnes en situation irrégulière ont besoin d'un accompagnement spécifique pour les aider à sortir de l'hébergement. Elles peuvent être orientées vers les dispositifs d'aide au retour ou être accompagnées dans des démarches de régularisation de leur situation lorsqu'il existe des perspectives d'obtention d'un titre de séjour.
Par conséquent, nous considérons que le public en situation irrégulière doit faire l'objet d'un accueil et d'un accompagnement spécifiques. Certains centres sont déjà dédiés à l'accueil prioritaire de publics particulièrement vulnérables tels que les femmes victimes de violences ou les sortants de détention, pour leur apporter un suivi spécifique. Nous proposons donc que certaines structures de l'hébergement généraliste soient identifiées pour l'accueil prioritaire de ce public, afin de lui assurer un accompagnement adapté.