Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il est des « habitudes éducatives » qui font mal, au sens propre comme au sens figuré. Il est des coups, des brimades, des insultes qui semblent ne pas laisser de traces, mais qui peuvent faire des ravages.
Tous les spécialistes et neuroscientifiques le confirment : fessées et « petites » gifles ne sont pas anodines pour la santé et le développement psychologique de nombreux enfants. Elles favorisent l’agressivité, fragilisent l’estime de soi, peuvent avoir une incidence sur les performances scolaires et compliquer la socialisation. Elles sont aussi, parfois, le terreau de châtiments plus graves.
Par ce texte, il ne s’agit pas de se donner « bonne conscience », ni de multiplier les procureurs vertueux stigmatisant certains parents qui auront eu un geste regrettable ou une parole inappropriée. Que celui qui n’a jamais péché jette la première pierre…
Le métier de parents est ô combien difficile. Les violences sont souvent synonymes de faiblesse, d’échec. Elles interviennent lorsqu’on n’a pas eu la patience, lorsqu’on n’a pas su trouver les mots.
Mais il est aisé, confortablement installé dans ce bel hémicycle, de donner des leçons de morale, de prôner la pédagogie par l’explication, la compréhension, l’affection.
Le cœur de cette proposition de loi, sa raison d’être, ce qu’elle peut et doit apporter, c’est une prise de conscience : la violence n’est jamais la solution, ce qui n’exclut pas la sanction.
Depuis des années, certaines de nos collègues, d’Edwige Antier à Laurence Rossignol, ont mené ce combat, avec le succès relatif que l’on sait. Espérons que leur persévérance soit récompensée.
Néanmoins, soyons bien conscients des lacunes et des limites de cette proposition de loi. Si un coup ou une insulte peut blesser profondément et pour longtemps un enfant, il est une maltraitance sournoise, parfois plus dangereuse et plus destructrice : l’indifférence. Les coups sont condamnables, mais les silences s’ignorent.
Certes, la loi ne peut pas tout. Mais toutes les graines de bienveillance qu’elle aura pu semer seront toujours des victoires et des progrès.
Pour conclure, permettez-moi, monsieur le secrétaire d’État, de revenir sur votre double référence à Jean-Jacques Rousseau : il a peut-être bien écrit, mais il a bien mal agi ! L’auteur de l’Émile a abandonné ses enfants ! Il n’est pas inutile de le rappeler. À chacun ses modèles et ses guides spirituels !