Intervention de Daniel Gremillet

Commission des affaires économiques — Réunion du 2 juillet 2019 à 17h30
Projet de loi relatif à l'énergie et au climat — Audition de M. François de Rugy ministre d'état ministre de la transition écologique et solidaire

Photo de Daniel GremilletDaniel Gremillet, rapporteur :

Je partage les propos de la présidente. Mener des auditions dans un contexte aussi compliqué, en passant de 8 à plus de 55 articles... J'aurais souhaité que le Sénat ait la même capacité que l'Assemblée nationale d'enrichir ce texte stratégique. Nous n'avons pas attendu, avec les rapporteurs de l'Assemblée, pour nous rencontrer car nous sommes animés de la même volonté.

Les assemblées ont déploré l'absence de débat de fond en amont de la PPE. Inscrire dans la loi qu'elles se prononceront tous les cinq ans sur une loi de programmation est très important.

Mes deux premières questions porteront sur les objectifs de développement des deux filières renouvelables. Tout d'abord, le Gouvernement envisage-t-il de revoir à la hausse les objectifs de développement du biogaz ? Alors que le législateur avait fixé l'objectif de 10 % de gaz renouvelable en 2030, le projet actuel de PPE prévoit des niveaux plus faibles, entre 7 et 10 %, et les conditionne à des baisses de coûts importantes, que tous les acteurs de la filière jugent inatteignables. Ne va-t-on pas détruire la montée en puissance ? Comptez-vous revenir sur ce point et faire en sorte que la PPE respecte effectivement la loi ?

La réforme des garanties d'origine du biogaz risque de déstabiliser toute l'économie de cette filière naissante. Pourquoi le Gouvernement a-t-il ajouté cette réforme dans l'urgence, sans aucune concertation avec la filière, alors que le droit européen offre d'autres possibilités ?

Sur l'éolien en mer, le Premier ministre a annoncé, dans son discours de politique générale du 12 juin, sa volonté de porter le volume des appels d'offres à 1 gigawatt par an. Mais nous ne savons toujours pas comment cette annonce se concrétisera. Allez-vous réviser la PPE et sur quelle période porte l'engagement ?

Sur le volet relatif au bâtiment, pouvez-vous nous préciser le champ et les intentions du Gouvernement dans le cadre de l'habilitation à légiférer par ordonnance pour redéfinir les bâtiments énergivores ?

Pouvez-vous nous expliquer comment l'interdiction de réviser les loyers et de demander une contribution pour travaux aux locataires pour les logements classés F et G s'articule avec le droit en vigueur ? Ne risque-t-on pas de bloquer les rénovations ? Le rapport du député Nogal comme celui de l'Inspection générale des finances (IGF) et du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) préconisaient d'accompagner et d'assouplir, notamment en prenant l'exemple allemand d'une augmentation jusqu'à 11 % du loyer en cas de rénovation énergétique. Qu'en pensez-vous ? Où est le volet incitatif dans la loi ?

J'en viens à l'Arenh. La Commission européenne, en 2012, a dit qu'elle n'accepterait pas que l'on fixe un prix supérieur aux 42 euros actuels tant qu'une méthode de calcul ne serait pas définie et approuvée par elle. Comment espérez-vous augmenter le prix de l'Arenh sans l'approbation de la Commission sur une telle méthode ? Je rappelle qu'un premier projet de décret lui avait été soumis il y a quelques années et qu'elle l'avait refusé. En l'état actuel du texte, nous sommes certains que le plafond de l'Arenh sera relevé, mais tout indique que le prix n'évoluera pas, alors qu'il n'a pas bougé depuis 2012. N'est-ce pas un jeu de dupes que de laisser croire le contraire ? Qu'aurait-on gagné si la baisse attendue des factures des consommateurs devait aboutir à augmenter la facture des contribuables, en tant qu'actionnaires d'EDF, si d'aventure l'entreprise n'était plus capable de financer tous ses investissements ?

Le texte renforce les moyens de lutter contre les fraudes aux CEE. C'est un bon point mais qui ne suffira sans doute pas. Comme vous le savez, du fait des cibles trop élevées fixées par le Gouvernement, le marché des CEE est aujourd'hui en tension et quand les prix montent, c'est aussi le risque de fraude qui augmente, de même que le coût du dispositif pour les ménages. On ignore bien souvent que les CEE représentent déjà 3 à 4 % des factures. Pour faire baisser la tension, et donc les prix, pourquoi ne voulez-vous pas prolonger d'un an la quatrième période sans augmenter le volume des obligations, comme les organisations de consommateurs et de fournisseurs vous l'ont demandé ? À quoi bon gagner quelques pourcents sur la facture en relevant le plafond de l'Arenh si c'est pour les reperdre du fait de la hausse des CEE, qui aura des effets dès la prochaine révision des tarifs ?

Un autre moyen de lutter contre les fraudes est de renforcer les moyens de l'administration chargée de les contrôler : le pôle national des CEE. Quelque 21 personnes seulement contrôlent 3,5 à 4 milliards d'euros de CEE par an. Ce n'est pas sérieux. Prenez l'engagement, devant nous, de renforcer les moyens humains.

Encore une fois, c'est un sujet ô combien important pour notre économie et pour nos concitoyens.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion