Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la musique est l’art démocratique par excellence, la première pratique culturelle des Français, la deuxième industrie culturelle ; et pourtant, la musique demeure jusqu’à présent dépourvue de centre national.
Après huit ans de réflexion, nous ne pouvons donc que nous réjouir de la création d’une maison commune de la musique.
Cette maison commune va devoir répondre aux attentes de la filière, être un outil efficace, une instance de dialogue et de cohésion entre les acteurs du secteur de la musique et des variétés.
La création du CNM intervient à un moment clé de l’évolution du monde de la musique, avec l’adaptation du marché au numérique, notamment au streaming, qui à la fois offre des possibilités immenses aux artistes et fragilise une partie des acteurs.
Pour rester dans le jeu, nous devons renforcer les moyens financiers, mais également progresser en matière de compréhension et de capacité d’anticipation, condition sine qua non pour faire face à la concurrence d’autres pays, en particulier les États-Unis et la Chine.
Le CNM doit répondre à la volonté déterminée de maintenir la création et la production françaises dans une énergie et une vitalité qui permettent à chacun des acteurs d’en vivre, et ce sur tous nos territoires.
Ces moyens sont autant un soutien financier qu’un soutien à la structuration et au développement par du conseil et de l’expertise fondés sur une observation la plus fine possible de l’écosystème, anticipant ses transformations itératives.
N’oublions pas que la musique est une industrie culturelle qui pèse et représente de très nombreux emplois ailleurs que dans les métropoles. Au moment où la fracture territoriale est reconnue comme un problème central, ce point a toute son importance.
Quatre grands enjeux doivent être au cœur des missions du CNM.
Il s’agit en premier lieu de garantir la diversité musicale et le pluralisme des genres musicaux : tous les genres musicaux doivent avoir leur place au sein du CNM. Une attention particulière devra être portée à la musique classique et aux musiques improprement appelées « savantes ». Le financement des orchestres et des conservatoires, en région notamment, doit donc être conforté. Ceux-ci sont partout sur le terrain des vecteurs importants d’une grande part de la culture musicale. Ils n’ont pas le poids économique de formations et de groupes plus populaires, mais ils occupent néanmoins une place essentielle.
Au cœur du CNM figurera aussi le répertoire historique du CNV : les musiques actuelles, le jazz et la variété, y compris l’humour. Parce que le CNM est un établissement public au service de l’intérêt général, il aura pour mission de garantir la diversité dans toutes les dimensions du secteur musical.
Il s’agit en deuxième lieu de garantir la diversité des acteurs, au travers des différents types de pratiques, du professionnel à l’amateur, de maintenir la vie des labels indépendants, encore très présents sur nos territoires, et de permettre, via des lieux et des festivals, l’accès à une autre offre que celle des blockbusters et des grands équipements.
La diversité prend en compte les contributions de tous les acteurs, professionnels ou non, participant à la vie musicale en tant que créateurs, producteurs, diffuseurs, praticiens, spectateurs, auditeurs.
La pratique musicale en amateur contribue aussi au développement de l’art musical français, à l’économie musicale et même au dynamisme des territoires. Mais cette vitalité tient également à la dynamique associative musicale. Les très nombreuses associations du secteur ont développé de multiples activités dans tous les territoires, de la création à la formation, hybridant les pratiques, inventant des modes de faire ensemble. Leur rôle est essentiel.
Il s’agit en troisième lieu de promouvoir la diversité de la production et de la création musicales dans le monde, par le rayonnement français.
La contribution française doit être accompagnée, aidée, encouragée. Il importe de favoriser le développement d’œuvres françaises et francophones éclectiques à travers le monde.
C’est tout l’intérêt d’intégrer le Burex, le Bureau export de la musique française : à l’heure où l’exposition internationale des artistes et des productions français est une question cruciale pour la filière, cela permettra sans doute d’être plus efficace en matière d’export. La promotion de la chanson francophone est nécessaire. Nous la devons au monde, auquel la langue française apporte des valeurs et des façons de penser différentes, singulières.
Enfin, il s’agit de promouvoir la diversité dans tous les territoires, pour tous, par le biais de partenariats avec les collectivités et les acteurs locaux : cela renvoie au sujet des droits culturels, dont le CNM devra être le garant. Les droits culturels sont fondés sur la diversité musicale, les libertés d’expression musicale, l’accessibilité intégrale. Par leur biais est consacré le droit de toutes les personnes à participer et à accéder à la vie musicale.
Le CNM devra réguler le poids des censures et des rationalités, qu’elles soient économiques ou institutionnelles. Je me réjouis par conséquent que nous ayons, en commission de la culture, intégré la garantie des droits culturels dans les missions du CNM.