Intervention de Jean-Pierre Leleux

Réunion du 9 juillet 2019 à 21h30
Création du centre national de la musique — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Jean-Pierre LeleuxJean-Pierre Leleux :

Apparu une première fois en 2011, monsieur le ministre, sous l’impulsion de votre quadrisaïeul au ministère de la culture, puis disparu des radars sous la gouvernance de votre arrière-arrière-grand-mère pour trois générations, on l’a revu resurgir sous votre prédécesseur, Françoise Nyssen. Aujourd’hui, nous le tenons enfin, grâce à vous – personne ne le conteste – et au député Pascal Bois, que vous avez encouragé à déposer cette proposition de loi pour mettre fin à cette douche écossaise des espoirs et des déceptions, particulièrement mal ressentie par la filière musicale, qui demande depuis tant d’années à être considérée au même titre que les autres filières culturelles, comme la danse, le livre, le théâtre, les arts de la rue et le cirque et, bien entendu, le cinéma.

Il faut dire que vous y teniez, à ce Centre national de la musique ! Vous aviez autrefois émis un rapport très favorable à sa création. À la commission de la culture du Sénat, nous étions en phase avec vos propositions. D’entrée de jeu, nous exprimons notre satisfaction devant cette proposition de loi tant attendue.

La musique étant une amie de la vie quotidienne de chacun de nous, on finit par oublier qu’elle n’existe que dans le cadre d’une vraie filière, certes culturelle, mais aussi économique et industrielle. Il était temps de structurer cette filière, d’autant que la révolution numérique a fait souffler sur elle la tempête que nous connaissons.

Le nouveau CNM absorbera le CNV en bénéficiant de ses ressources, qui proviennent de la taxe sur les spectacles de variétés. Il se verra adjoindre d’autres organismes existants, fortement encouragés à se fondre dans le futur CNM : le Fonds pour la création musicale, le Burex, le Club action des labels et des disquaires indépendants et le Centre d’information et de ressources pour les musiques actuelles. Ces derniers organismes pourront transférer leurs ressources au futur CNM et se fondre en lui dès qu’ils auront entériné leur dissolution, selon une procédure qui, je le rappelle, repose sur le volontariat.

Le texte est peu précis sur la gouvernance ; ce sujet ayant été largement traité par notre rapporteur, Jean-Raymond Hugonet, je concentrerai mon propos sur trois points qui me paraissent intéressants.

D’abord, l’article 3 confère au président du CNM la mission de délivrer, au nom du ministre de la culture, les agréments fiscaux pour le bénéfice du crédit d’impôt pour la production d’œuvres phonographiques et du crédit d’impôt pour les dépenses de productions de « spectacle vivant musical ». Il s’agit là d’une des mesures proposées dans le rapport de M. Roch-Olivier Maistre. Cette habilitation octroyée au président du CNM constitue une marque de confiance envers le nouveau centre national et lui confère d’emblée une certaine crédibilité auprès du secteur de la musique, en le positionnant comme un acteur incontournable. Elle permettra au CNM de mieux assurer sa mission d’observation de la filière. Il s’agit là, à mon avis, d’une bonne mesure.

Ensuite, l’article 4 bis permettra au CNM de percevoir des fonds de la part des organismes de gestion collective, ou OGC, destinés aux actions culturelles. Je rappelle que la loi impose aux OGC de consacrer 25 % des sommes provenant de la rémunération pour copie privée à des actions d’aides à la création, à la diffusion du spectacle vivant et au développement de l’éducation artistique et de la formation des artistes. Le rapprochement entre les OGC et le CNM est légitime et souhaitable. Le montant total de ces ressources s’est élevé, en 2017, à 183 millions d’euros, somme dont la commission de contrôle des organismes de gestion des droits d’auteurs et des droits voisins a souligné qu’elle n’était consommée qu’à 70 %. Cela soulève quelques interrogations.

Bien entendu, cette contribution des OGC ne pourra intervenir que sur une base strictement volontaire, les fonds étant de nature privée. Les OGC ne sont pas opposés à cette mesure sur le principe, mais ils attendent de connaître les moyens que mettra l’État à la disposition du CNM, en complément de leur contribution, et les éléments de la gouvernance, afin que leur représentation soit cohérente et équilibrée avec la gestion de leurs fonds.

Enfin, j’évoquerai les moyens dont disposera le CNM. Jusqu’à présent, la proposition de loi ne prévoit qu’une mutualisation de ressources déjà existantes. Il faudra donner du carburant au CNM, par exemple en lui affectant une part du produit de la taxe YouTube ou de la TOCE. Je trouve intéressante la proposition figurant dans le rapport Bois-Cariou d’affecter au CNM une part de la recette de la TOCE, laquelle a été totalement détournée de sa vocation initiale et littéralement confisquée par le budget général.

Le groupe Les Républicains aborde l’examen de ce texte dans un esprit très positif.

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