Nous devons donc éviter d’en faire l’alpha et l’oméga de toute notre politique salariale. Ce n’est que l’arbre qui cache la forêt, cette forêt dans laquelle se trouvent la majorité des salariés.
On a, du coup, oublié précisément ceux qui gagnent juste un peu plus que le SMIC. Or les autres salaires n’ont pas suivi la même progression. L’écart entre le SMIC et le salaire des classes moyennes modestes s’est ainsi resserré année après année.
Le résultat est simple.
L’économie française présente une particularité très nette : 15% des salariés sont rémunérés au SMIC, contre 5 % seulement en moyenne dans les autres pays européens. Ce phénomène ne serait pas inquiétant en soi si ne s’y ajoutait un autre paramètre : les perspectives pour ces salariés de sortir du SMIC ont été pratiquement divisées par deux depuis vingt ans. Le SMIC joue donc comme une trappe : une fois au SMIC, un salarié voit ses chances d’en sortir se réduire année après année.
Cette situation est inacceptable, notamment pour les jeunes, qui sont payés au SMIC deux fois plus souvent que leurs aînés et auxquels on promet toute une vie de travail sans perspective de progression et sans véritable stimulation.
Le projet de loi qui vous est soumis tend clairement à rompre avec cette tendance et à récréer des perspectives de rémunération et de progression salariale, notamment à l’échelle des bas salaires. Il faut pour cela une action à tous les niveaux : salaires dans les entreprises, grilles salariales des branches et compléments de rémunération, comme l’intéressement et la participation.
Je ne reviendrai ni sur l’intéressement et la participation, dont a parlé Xavier Bertrand, avec lequel j’ai travaillé de façon très complémentaire, ni sur le mode de fixation du SMIC.
Je souhaite en revanche m’attarder sur l’articulation entre le SMIC et les minima de branche, d’une part, et sur la conditionnalité des allégements de charges, d’autre part.
Permettez-moi auparavant, mesdames, messieurs les sénateurs, de revenir sur la méthode que nous avons retenue. Celle-ci consiste à faire le pari du dialogue social, tout en veillant à ne pas faire de celui-ci un simple mot ou un simple appel à la négociation : il s'agit de fixer un délai pour la négociation et des contraintes claires.
La conditionnalité des allégements de cotisations doit permettre de stimuler les négociations de salaires de manière à recréer des perspectives salariales.
Disons-le clairement : il n’est pas normal que des lois votées par la représentation nationale et qui sont celles de la République ne soient pas appliquées.