Enfin, le texte a pour objet de dynamiser les négociations salariales grâce à un mécanisme de conditionnalité des allégements de cotisations sociales.
La commission a approuvé sans réserve le dispositif qui prévoit de réduire ces allégements de charges dans les entreprises qui ne procéderont pas à la négociation annuelle obligatoire sur les salaires.
Certains de nos collègues ont regretté que l’on n’aille pas plus loin et que le bénéfice des allégements de charges ne soit pas conditionné à la conclusion d’un accord salarial. Cependant, respectueuse de l’autonomie des partenaires sociaux, la commission n’a pas souhaité, dans sa majorité, que le législateur menace de sanctions les entreprises qui ne concluraient pas d’accord. L’obligation d’un accord risquerait aussi de fausser les conditions de la négociation.
La mobilisation des syndicats et le sens des responsabilités des chefs d’entreprise, qui savent que la motivation de leurs équipes passe par un partage équitable des fruits de la croissance, suffiront, selon nous, à donner son plein effet à cette mesure.
Je profite de l’occasion qui m’est donnée pour interroger le ministre sur une question plus ponctuelle, qui concerne les entreprises de travail temporaire. Elles s’inquiètent des conséquences que pourrait avoir pour elles l’application de ce nouveau dispositif de conditionnalité des allégements de charges. Elles se demandent notamment si elles devront tenir compte de la situation de chacune de leurs entreprises clientes ou si c’est le respect, par l’entreprise d’intérim, de son obligation de négocier sur les salaires qui sera pris en considération. Il semble que la deuxième option est la bonne, mais il serait bon que le ministre puisse nous le confirmer.
J’en viens à la question des accords salariaux négociés au niveau des branches professionnelles.
Certaines grilles de salaires comportent, vous le savez, des minima inférieurs au SMIC. Cela n’a, bien sûr, aucune incidence sur le salaire effectivement versé puisque le SMIC est d’ordre public. En revanche, cela peut avoir un impact sur le montant de certaines primes calculées par référence aux minima conventionnels et entraîne un « écrasement » du bas de l’échelle des rémunérations : des salariés qui se situent à des niveaux différents de la grille salariale parce qu’ils sont plus ou moins qualifiés se retrouvent, en pratique, tous rémunérés au niveau du SMIC.
Notre président, Gérard Larcher, a lancé, lorsqu’il était ministre délégué aux relations du travail, une politique volontariste destinée à résoudre ce problème des minima conventionnels inférieurs au SMIC. Cette politique a eu des résultats très positifs puisque le nombre de branches concernées est passé de dix-huit, à la fin de l’année dernière, à six seulement aujourd’hui.
Le Gouvernement souhaite cependant aller plus loin et propose de rendre moins favorable le barème de l’allégement Fillon lorsqu’il s’appliquera à des entreprises qui relèvent d’une branche dont les minima salariaux sont inférieurs au SMIC.
Cependant, le mécanisme proposé présente, selon nous, monsieur le ministre, l’inconvénient de pénaliser financièrement des entreprises vertueuses en matière salariale mais qui dépendent d’une branche dans laquelle la négociation n’a pas abouti. On peut, certes, estimer, comme le fait le Gouvernement, que les entreprises feront alors pression sur les représentants patronaux qui négocient, en leur nom, au niveau de la branche, mais cette vision des choses nous paraît assez théorique. En effet, de quels moyens de pression peut bien disposer une PME dans une branche où dominent quelques grands groupes ?
Par ailleurs, il est tout de même singulier de donner une telle portée à l’accord de branche, alors que la loi portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail vient, au contraire, de donner la priorité à l’accord d’entreprise, plus adapté aux réalités du terrain, comme pourrait nous le confirmer notre collègue Alain Gournac, rapporteur de ce récent texte !
Nous ferons des propositions pour résoudre le paradoxe qui conduirait à pénaliser les entreprises vertueuses. D’autres collègues iront aussi dans ce sens. Nul doute que, du débat que nous aurons sur ce point, monsieur le ministre, surgira une solution satisfaisante.
Cette réserve ne remet pas en cause l’appréciation globalement positive de la commission sur l’ensemble de ce projet de loi, qui agit sur plusieurs leviers pour soutenir le pouvoir d’achat des ménages. Nous vous demandons, en conséquence, de l’adopter, mes chers collègues.