Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je souhaite essayer de rassurer un peu.
La commission des lois a eu, au cours de deux séances successives, des débats approfondis sur ce texte. La semaine dernière, nous n’étions pas parvenus à un accord avec l’auteur de la proposition de loi, l’amendement qui avait été adopté en commission n’ayant pas paru suffisant à la majorité des membres de la commission.
L’auteur de la proposition de loi, Jean-Noël Cardoux, que je salue, a accepté, à la suite de cette réunion, de poursuivre son travail. Il s’est rapproché d’un certain nombre de collègues, notamment de M. Prince et de M. le rapporteur, qui a fait un travail considérable sur cette question, afin d’essayer de trouver une solution.
Ce travail n’a pas été inutile, car il nous a permis de parvenir à un bon équilibre, ce qui n’avait pas été le cas la semaine dernière. De mon point de vue, monsieur le secrétaire d’État, le délit est désormais caractérisé de manière suffisante. Le code pénal sanctionne déjà les violences et les atteintes aux biens ; la proposition de loi que nous allons, je l’espère, amender dans un instant n’a donc pas à le faire.
Pour éclairer le contexte général, nous pouvons rappeler que les actes de violence et de destruction se multiplient, ce qui est intolérable. Récemment encore – cela a été porté à votre connaissance –, un élevage de volailles a été incendié dans l’Orne. Un tel acte exige une répression très ferme, mais il n’est pas visé par la proposition de loi. Ce texte caractérise le nouveau délit qu’il s’agit de mettre en place par l’obstruction ou l’intrusion. Ces activités devront avoir été pacifiques, car, en cas de violences, elles pourraient être poursuivies en vertu des dispositions actuelles afférentes du code pénal.
On parle d’obstruction lorsque, par exemple, des personnes empêchent l’accès à une boucherie ou font stationner des véhicules afin d’empêcher le démarrage d’une chasse, mais d’autres activités pourraient être visées de la même manière. « Obstruction » et « intrusion » sont des termes précis.
L’amendement que la commission des lois a adopté ce matin vise également les actes faisant obstruction à des activités sportives ou de loisirs, ce qui est nouveau. Lorsque nous disons que nous voulons sanctionner l’obstruction à une activité commerciale, nous explicitons en fait la règle de la liberté du travail. Cette liberté s’applique aussi au commerce, à l’agriculture. On peut considérer que, en mentionnant la liberté du travail, expression qui peut paraître désuète à certains, ces secteurs sont couverts, mais cela va mieux en le disant. C’est pourquoi nous comptons bien le dire.
De cette manière, nous couvrons non seulement les activités professionnelles auxquelles il serait fait obstruction pacifiquement, mais dont on empêcherait réellement la mise en œuvre, mais aussi les activités sportives ou de loisirs.
Bien sûr, nous ne plaçons pas au même niveau les activités sportives ou de loisirs et les activités professionnelles. C’est la raison pour laquelle l’amendement que nous avons accepté tend à prévoir des peines nettement plus légères en cas d’obstruction à une activité de loisirs qu’en cas d’obstruction à une activité économique ou à la liberté du travail.
Enfin, bien sûr, la liberté d’expression et la liberté de manifestation sont pour la commission des lois des exigences très importantes, auxquelles je suis particulièrement sensible, croyez-le bien. Je le dis à l’intention d’Esther Benbassa, mais aussi de Loïc Hervé, qui s’est longuement exprimé en commission sur ce point. Nous avons d’ailleurs à cœur de défendre ces libertés constamment, et non uniquement dans le cadre de cette proposition de loi.
Nous pensons que, si vous adoptez l’amendement que nous avons accepté en commission des lois ce matin et sur lequel notre rapporteur a émis un avis favorable, la liberté d’expression et la liberté de manifestation seront évidemment préservées. À titre personnel, je refuserais, comme beaucoup d’entre nous, de souscrire à des dispositions qui les remettraient en cause.