Intervention de Jean-Marc Boyer

Réunion du 8 octobre 2019 à 14h30
Engagement dans la vie locale et proximité de l'action publique — Motion d'ordre

Photo de Jean-Marc BoyerJean-Marc Boyer :

Madame la présidente, madame, monsieur les ministres, chers collègues, les premiers mots de l’intitulé de ce projet de loi mettent en valeur « l’engagement dans la vie locale ».

Au regard de ce réel engagement quotidien, le premier constat est que nos élus locaux ne sont pas entendus, voire qu’ils sont méprisés : je pense, par exemple, au hashtag #BalanceTonMaire… Mes propositions visent à rendre hommage à nos maires, à nos élus locaux, afin de les valoriser et de susciter des vocations. Ils sont avant tout enracinés dans leurs territoires, dévoués à leurs concitoyens et passionnés par la vie publique. Donnons-leur la reconnaissance qu’ils méritent !

Le deuxième constat est que les élus dans leur ensemble sont fustigés sur les réseaux sociaux et par certains médias. Ces dernières années, une médiatisation à outrance de quelques affaires a terni l’engagement quotidien et désintéressé des quelque 35 000 maires de France. Il est impératif de communiquer sur cet engagement au service du bien commun.

Troisième constat, face aux grandes intercommunalités, nos élus se sentent exclus, privés de parole, et donc démotivés. Il faut redonner la parole aux maires des petites communes, leur accorder la place qui doit être la leur pour qu’ils puissent répondre au mieux aux besoins de leur territoire.

Le quatrième constat est relatif aux transferts de compétences. Nos maires se sentent déshabillés. Il est essentiel de redonner du pouvoir de décision à nos élus. Je salue à cet égard le travail de nos rapporteurs. Fidèle à l’esprit du Sénat et à sa connaissance du terrain, la commission a supprimé le transfert obligatoire de la compétence en matière d’eau et d’assainissement – une aberration que nous n’avons de cesse de dénoncer. Le Gouvernement entendra-t-il raison à ce sujet ?

Le cinquième constat concerne les indemnités et leur caractère dérisoire au regard des responsabilités des maires de nos petites communes, taillables et corvéables à merci vingt-quatre heures sur vingt-quatre. La reconnaissance passe aussi par la revalorisation de leurs indemnités, que je demandais déjà au travers de la proposition de loi de septembre 2018 pour une juste indemnisation des élus municipaux des petites communes.

De nombreux élus locaux vivent, selon leurs propres mots, un « véritable malaise » et une « crise des vocations ». En effet, le poids des responsabilités et la complexité de leurs missions n’ont cessé de croître, alors que leur statut, notamment leur indemnisation, n’a pas évolué en parallèle. Ce projet de loi peut nous permettre d’y remédier, et je remercie les rapporteurs pour leur travail sur ce sujet. Garder les trois premières strates actuelles, telles qu’adoptées en commission, me paraît aussi nécessaire pour la cohérence et l’acceptation de la valorisation indemnitaire.

Cette reconnaissance passe aussi par certains symboles, notamment quand d’autres élus locaux et nationaux en bénéficient déjà. Je pense ici à la cocarde tricolore, que nos maires ne peuvent rendre visible dans leur véhicule sous peine d’être verbalisés, comme le fut le plus ancien maire de mon département, après cinquante ans de mandat… Madame la ministre, il s’agit ici du champ réglementaire : pourriez-vous faire évoluer cette pratique afin de bien marquer le respect dû à la fonction de maire ?

Mon sixième constat est celui de l’impunité ou en tout cas du sentiment d’impunité des agresseurs de nos maires. La récente consultation sénatoriale auprès de nos édiles montre que ces faits divers sont une réalité trop répandue. Nos maires, pourtant officiers de police judiciaire, vivent mal le classement sans suite de plaintes et les procédures judiciaires sans fin, alors que la responsabilité pénale du maire est trop souvent engagée. Madame la ministre, pouvez-vous vous saisir du sujet avec votre collègue Mme la garde des sceaux, afin que les plaintes soient prises en considération, que les sanctions soient exemplaires, que justice soit faite ?

Mon septième constat est celui du manque de sécurité, qui entraîne une crise des vocations. Certes, être élu n’est pas un métier ; toutefois, pour susciter des vocations, il faut rendre la fonction plus respectée et attractive. Le sujet de la formation des élus est primordial : il importe de permettre à l’élu de poursuivre une carrière professionnelle qu’il a sacrifiée ou ébréchée pendant son mandat. Il faut aussi faciliter la mise en disponibilité, pour l’exercice de leur mandat, aux élus salariés du privé, sur les mêmes bases que pour les agents de la fonction publique. La problématique est abordée dans le projet de loi, mais celui-ci renvoie à des ordonnances.

Enfin, à propos de proximité, on ne peut que déplorer, en tant qu’élu de la Nation, la fin du cumul entre un exécutif local, particulièrement dans une petite commune, et un mandat de parlementaire. Ce cumul permettait, comme le dit si justement mon collègue Rémy Pointereau dans sa proposition de loi visant à garantir une République de proximité en rendant possible le cumul de mandats, de renforcer le lien unissant les territoires à leurs représentants nationaux.

Madame, monsieur les ministres, mes chers collègues faisons en sorte que le texte qui sortira des travaux du Sénat soit à la hauteur des attentes de nos maires ! C’est l’intérêt général qui guide l’action de nos élus locaux : leur engagement mérite une reconnaissance pleine ; cela est légitime et juste !

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