Intervention de Nicole Bonnefoy

Réunion du 29 octobre 2019 à 22h00
Catastrophes climatiques : mieux prévenir mieux reconstruire — Débat organisé à la demande d'une mission d'information

Photo de Nicole BonnefoyNicole Bonnefoy :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme vous le savez, notre pays est exposé à une grande diversité de risques climatiques. Ainsi, un Français sur quatre fait face à un risque d’inondation, tandis que la sécheresse concerne plus de 60 % des sols métropolitains, si bien que presque toutes les communes de France ont déjà été frappées par un tel phénomène.

Les inondations survenues la semaine dernière ont encore illustré de manière tragique la vulnérabilité de notre territoire. Or cette exposition aux catastrophes naturelles va s’amplifier dans les prochaines années à cause du dérèglement climatique : les pluies extrêmes augmenteront et les vagues de chaleur deviendront plus nombreuses et plus fortes, engendrant, tous les deux à trois ans, des sécheresses comparables à celle de 2003.

Devant l’accroissement prévisible du nombre de sinistrés, notre mission a examiné l’efficacité du régime d’indemnisation des catastrophes naturelles. Malgré des fondamentaux pertinents, force est de constater que le système actuel est incompréhensible et injuste pour de nombreux sinistrés.

Les remontées du terrain dont nous avons été destinataires conduisent à dresser un bilan sans appel : opacité de la procédure de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, inintelligibilité des critères utilisés, manque d’explications quant aux décisions prises, délais d’instruction extrêmement longs… Les griefs des sinistrés à l’encontre du régime d’indemnisation sont légion et conduisent souvent à une remise en cause de la légitimité des décisions de non-reconnaissance.

Il n’est effectivement pas acceptable qu’après avoir tout perdu lors d’une catastrophe nos concitoyens n’aient d’autre choix que de s’engager, pendant plusieurs années, dans un véritable parcours du combattant pour tenter, souvent en vain, d’obtenir une aide des pouvoirs publics ou des assureurs.

Notre mission a également pu constater que tous les sinistrés n’étaient pas placés sur un pied d’égalité, dans la mesure où il existe des difficultés supplémentaires pour l’indemnisation des dommages liés à la sécheresse. Les particularités du phénomène de retrait-gonflement des argiles, notamment le décalage entre la sécheresse et l’apparition des fissures, rendent l’indemnisation plus complexe.

De plus, nous avons observé que les critères retenus pour apprécier l’intensité de ces épisodes ne tiennent compte ni de la réalité de terrain ni de la fréquence croissante de cet aléa. Ces critères sont également à l’origine d’inégalités de traitement difficilement justifiables entre des territoires voisins, ce qui alimente un vif sentiment d’injustice chez les sinistrés. J’ajoute que les techniques de réparation proposées par les experts des compagnies d’assurances ne sont pas toutes efficaces : certaines aggravent même la vulnérabilité des habitations !

Enfin, le monde agricole est particulièrement vulnérable face aux aléas climatiques : en témoignent les ravages subis lors des récents épisodes de grêle. Nous avons pu constater un véritable déficit de protection des agriculteurs, résultant notamment d’une mauvaise articulation entre la couverture assurantielle et le régime des calamités agricoles.

Dans ce contexte, nous appelons à une modernisation durable des systèmes d’indemnisation des dommages résultant des catastrophes naturelles. L’arsenal juridique français constitue un modèle unique de solidarité. Néanmoins, des évolutions sont indispensables pour garantir sa pérennité et son efficacité.

Dans un premier temps, il nous paraît indispensable de répondre aux faiblesses structurelles de nos dispositifs de solidarité en réformant le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles, dans un souci d’équité, d’efficacité et de transparence. Je pense notamment à la méthodologie retenue pour qualifier un phénomène de catastrophe naturelle, aux dispositifs de franchise, qui pénalisent excessivement certains sinistrés, ou encore aux relations entre les assurés et les assureurs, qu’il convient de clarifier. Un effort global de pédagogie à destination des sinistrés est nécessaire, par une information claire et intelligible quant aux critères et aux seuils d’intervention du régime. Notre mission s’interroge également sur l’opportunité de créer, à moyen terme, un dispositif spécifique, plus adapté, pour traiter les sinistres provoqués par les sécheresses.

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