Intervention de Victorin Lurel

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 6 novembre 2019 à 16h35
Projet de loi de finances pour 2020 — Compte d'affectation spéciale cas « participations financières de l'état » - examen du rapport spécial

Photo de Victorin LurelVictorin Lurel, rapporteur spécial :

Pourtant, les défis à relever seront nombreux et cruciaux pour l'avenir de notre pays - je pense en particulier à la transition énergétique et à ses conséquences pour EDF. L'entreprise fait face à des difficultés importantes, ce qui porte fortement atteinte à la performance du portefeuille de l'État. Le Gouvernement attend de l'entreprise qu'elle fasse des propositions de réorganisation au cours du premier semestre 2020. La question essentielle tient à la refonte de la régulation du nucléaire. Je sais les inquiétudes que suscite ce projet, comptez sur moi pour être vigilant.

De ce point de vue, je ne peux cautionner le choix du Gouvernement de mobiliser le compte pour le désendettement de l'État. Certes, je mesure le caractère symbolique de cette contribution. Mais le symbole ne doit pas s'opérer à rebours des intérêts patrimoniaux de l'État alors que les conditions de marché sont exceptionnelles. Permettez-moi de citer un ancien ministre, qui indiquait en 2016 devant notre commission que « patrimonialement, ce serait se tirer une balle dans le pied que d'utiliser le capital du compte pour se désendetter ». Entretemps, l'ancien ministre a quitté Bercy pour l'Élysée et son regard a, semble-t-il changé, alors que le contexte macroéconomique demeure similaire.

Quel est le risque ? Une utilisation opportune du compte, en faisant fi des considérations patrimoniales. La dette publique tutoie désormais le seuil hautement symbolique des 100 % du PIB. La contribution au désendettement prévue explique à elle seule le reflux de 0,1 point de PIB du ratio attendu par le Gouvernement en 2020. Aussi, je vous propose un amendement pour réduire la contribution au désendettement de 2 milliards d'euros à 1 milliard d'euros, montant traditionnellement inscrit sur le compte au stade du projet de loi de finances.

Je terminerai mon propos par quelques remarques sur le fonds pour l'innovation et l'industrie. C'est, vous le savez, l'objectif des cessions : doter un fonds pour l'innovation de rupture à hauteur de 10 milliards d'euros. Dans l'attente, il bénéficie d'une dotation transitoire, intégrant des titres EDF et Thalès confiés par l'État, ce qui lui permet d'être effectif en 2019.

Vous êtes nombreux dans cette commission à avoir parcouru le projet de loi de finances à la recherche du « budget vert ». Je dois concéder que je ne saurai vous éclairer sur ce point. En revanche, je suis en mesure de vous faire part de « l'usine à gaz » budgétaire que met en oeuvre le Gouvernement. Le schéma que je vous propose dans mon rapport atteste de la complexité du mécanisme, comme me l'a concédé Martin Vial.

L'enrobage est volontiers moderniste, convoquant nombre d'anglicismes pour étayer ce qui reste une opération de débudgétisation, au détriment des capacités d'analyse du Parlement. Surtout, ses conséquences sont préjudiciables aux finances publiques. En 2019 et 2020, le versement en actions du dividende d'EDF conduira l'État à racheter au fonds les actions perçues par le fonds au titre de son dividende. Ce sont ainsi 125 millions d'euros qui seront déboursés de façon inutile par le budget général. Dans un contexte budgétaire contraint, cela vient grever les marges d'action de véritables politiques publiques.

Sous réserve de l'adoption de l'amendement que je vous propose, je vous recommanderai d'adopter les crédits du compte.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion