Intervention de Jean Arthuis

Réunion du 16 juillet 2009 à 15h00
Orientation des finances publiques pour 2010 — Débat sur une déclaration du gouvernement

Photo de Jean ArthuisJean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

Notre séance d’aujourd’hui nous permet de débattre des grandes orientations des finances publiques, la loi organique relative aux lois de finances l’a prévu, l’a programmé, et je m’en réjouis. Ainsi, nous pouvons entendre les contributions respectives de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, et nous sommes heureux de pouvoir en débattre avec le ministre chargé de l’ensemble des comptes publics.

Nous débattons aujourd'hui sur la base du rapport que le Gouvernement nous a transmis relatif à l’évolution de l’économie nationale et des finances publiques.

Mes chers collègues, je n’ai pas vraiment trouvé dans ce document la « description des grandes orientations de [notre] politique économique et budgétaire au regard des engagements européens de la France », pour reprendre les termes de la LOLF. Au fond, ce n’est peut-être pas plus mal, car, même si la France fait toujours l’objet d’une procédure pour déficit excessif, de tels développements auraient pu paraître artificiels, voire tout bonnement irréels.

En effet, lorsque l’on extrait des documents préparatoires les principaux chiffres, le vertige saisit : un déficit des administrations publiques de 7 % ou 7, 5 % du PIB, c’est deux fois plus que le maximum autorisé par nos engagements européens et trois points de plus que l’objectif que nous avons voté en février dans la loi de programmation des finances publiques !

Pour l’État, le Gouvernement envisage un déficit de l’ordre de 130 milliards d’euros en 2009 et en 2010, contre 56 milliards d’euros en 2008.

Côté recettes, celles de l’impôt sur les sociétés, qui rapporte théoriquement à l’État environ un cinquième de ses ressources fiscales annuelles, soit une cinquantaine de milliards d’euros, le produit sera divisé par deux cette année ! C’est une moins-value de 25 milliards d’euros.

Dernier exemple pour illustrer la profondeur de la crise, on constate un déficit de 20 milliards d’euros du régime général de la sécurité sociale, alors même que 27 milliards d’euros ont été transférés l’année dernière à la CADES, la Caisse d’amortissement de la dette sociale !

L’addition des deux déficits, 130 milliards d’euros pour l’État et 20 milliards d’euros pour la protection sociale, nous amène, mes chers collègues, à un total de 150 milliards d’euros !

Dans la tourmente, il nous faut un cap, un horizon au-delà de la préparation des textes financiers de l’automne. Nous devons évaluer l’impact durable de la crise une fois l’onde de choc passée, et nous demander quelle conduite tenir dans la situation nouvelle qui nous attend.

Mes réflexions me conduisent toujours vers les deux mêmes constats.

Premièrement, avec la crise, notre pays s’appauvrit. La question est de savoir comment on peut inverser la tendance et retrouver compétitivité et attractivité.

Deuxièmement, le poids de la dette risque d’asphyxier nos finances publiques. Comment retrouver des marges de manœuvre ?

La thématique de la dette a beaucoup occupé nos travaux préparatoires, mais, lorsque son montant dépasse les 1000 milliards d’euros, lorsque la perspective d’une France qui vivrait durablement avec un endettement stabilisé autour de 100 % du PIB n’est plus un scénario de science-fiction, il n’est pas étonnant que les parlementaires s’intéressent de plus près encore à son mode de financement.

Lorsque la dette atteint un tel volume, sans que cela – miracle de « l’insoutenable légèreté de la dette publique » – provoque la moindre tension sur le niveau des dépenses, il est légitime que nous recherchions les instruments qui permettraient une plus grande pédagogie sur les conséquences de l’endettement.

Je veux le souligner, ces préoccupations ont été partagées par les membres de la commission des finances bien au-delà des limites de la majorité sénatoriale.

Sans refaire le débat que nous avons eu hier à l’occasion de l’examen des amendements portant sur le projet de loi de règlement, je veux réaffirmer ici ma conviction qu’il faut assumer les conséquences de ses choix.

Nous avons fait le choix collectif, depuis 1975, de dépenser chaque année un montant supérieur à celui des recettes. Je rappelle que le dernier budget présenté en équilibre par un ministre des finances l’a été, à l’époque, par Jean-Pierre Fourcade !

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