Intervention de Bernard Jomier

Réunion du 12 novembre 2019 à 9h30
Questions orales — Campagnes conduites par les industries de l'alcool auprès des très jeunes enfants et adolescents

Photo de Bernard JomierBernard Jomier :

Madame la secrétaire d’État, selon les chiffres rapportés par la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives, 85 % des adolescents ont déjà consommé de l’alcool, 44 % d’entre eux ont déclaré une alcoolisation ponctuelle importante dans le mois et près de 9 % ont une consommation régulière d’alcool.

Ces chiffres appellent à reconsidérer en profondeur les politiques de prévention, en particulier celles qui visent à protéger la jeunesse. Mais notre socle législatif en la matière semble bien en peine.

Les alcooliers débordent d’imagination pour contourner la loi Évin : « marques alibis » pour parrainer des événements destinés aux jeunes, publicité directe – toujours pour viser les jeunes – via des influenceurs sur les réseaux sociaux… Les exemples illustrant la nécessité de compléter cette loi ne manquent pas.

Face à un constat que nous partageons sans doute, vous avez préféré confier la prévention aux alcooliers eux-mêmes. Nous avons alors vu apparaître les campagnes d’apprentissage au goût conduites par les alcooliers auprès de très jeunes enfants et d’adolescents.

Sous couvert d’une volonté de jouer un rôle préventif, les alcooliers font valoir qu’une « bonne éducation » dans l’enfance protège de tous les excès de consommation à l’âge adulte. D’importants moyens de communication sont déployés au moyen de kits pédagogiques, de jeux s’adressant à des enfants de 4 à 14 ans, visant à leur faire découvrir l’univers de la vigne, les goûts et les terroirs. Cet « apprentissage du goût » dès le plus jeune âge favoriserait un comportement responsable chez les adultes « avertis » de demain…

Madame la secrétaire d’État, comme vous le savez, la santé est une affaire non pas d’opinion ou de goût, mais de science. La justification scientifique de ces programmes « d’éducation » est nulle et les arguments qui les soutiennent sont d’ordre culturel ou se réfèrent à la tradition. La science, elle, appuyée par de nombreuses études, montre que cette prétendue « éducation à bien boire » est en réalité une incitation à boire.

Comment comptez-vous mettre enfin un terme à ces pratiques en contradiction totale avec les objectifs de santé publique ? Qu’envisagez-vous pour créer un réel environnement protecteur pour notre jeunesse où l’alcool ne serait pas ainsi banalisé ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion