Intervention de Michel Boutant

Réunion du 16 juillet 2009 à 22h30
Programmation militaire pour les années 2009 à 2014 — Article 8

Photo de Michel BoutantMichel Boutant :

L’article 8 du projet de loi qui nous est soumis est, en apparence, d’une importance secondaire par rapport au reste du projet de loi dont notre assemblée est saisie. Loin des débats fondamentaux relatifs à la définition de notre doctrine de défense nationale, de sécurité intérieure, au financement de nos armées, ou encore aux frontières du secret défense, ne s’agit-il pas, en effet, de la simple prolongation d’un régime dérogatoire dont bénéficient déjà et depuis le 1er janvier 1987, les immeubles appartenant au ministère de la défense au moment de leur cession par l’État ?

C’est effectivement le cas, mais il me semble que cette prolongation offre justement l’opportunité idéale de s’interroger sur la pertinence d’un dispositif qui permet au ministère de la défense de contourner un système qui s’impose pourtant à l’ensemble des autres administrations.

Le code général de la propriété des personnes publiques prévoit, en effet, que lorsqu’un ministère souhaite vendre un immeuble dont il n’a plus besoin, il doit proposer aux autres services de l’État ledit immeuble avant de pouvoir procéder à la vente.

Ce n’est que lorsque l’immeuble est reconnu inutile par tous les services de l’État que le ministère peut le remettre au service chargé des domaines afin que celui-ci procède à la vente effective.

En 1986, le législateur a jugé cette procédure trop longue et a estimé que la spécificité des immeubles détenus par le ministère de la défense devait autoriser ce ministère à déroger à ces règles et à pouvoir remettre les immeubles concernés au service chargé des domaines sans pour autant devoir consulter au préalable les autres services de l’État. Cette dérogation était, toutefois, limitée à une durée de vingt-deux ans commençant au 1er janvier 1987.

Vous l’aurez compris, c’est cette dérogation que l’article 8 vise à prolonger car, à compter du 1er janvier 2010, le ministère de la défense sera de nouveau soumis au droit commun des ventes d’immeubles par l’État, au moment même où la réorganisation du ministère va le conduire à libérer de très nombreuses emprises.

Le Gouvernement estime que, pour assurer au mieux la reconversion des sites concernés, il est absolument indispensable de prolonger le régime dérogatoire qui permet au ministère de la défense de céder des immeubles appartenant à l’État sans se soucier des besoins des autres administrations. Il me semble, pourtant, qu’une bonne gestion des biens publics impose cette concertation, y compris s’il s’agit d’immeubles affectés au ministère de la défense.

Au vu de certaines mésaventures intervenues ces dernières années - je pense, par exemple, au rachat par l’État du bâtiment de l’Imprimerie nationale pour 376 millions d’euros après l’avoir vendu 85 millions d’euros quelques années auparavant -, il me semble qu’en réalité chaque cession d’un immeuble appartenant à l’État devrait être mûrement réfléchie au regard des besoins de l’ensemble des administrations et services de l’État ou de ses satellites. Car s’il est une leçon à retenir de la mésaventure de la vente de l’Imprimerie nationale, c’est bien que la vente précipitée d’un immeuble ne rapporte rien à l’État et risque même, au contraire, de lui coûter très cher !

C’est la raison pour laquelle le groupe socialiste refuse la prolongation du système dérogatoire dont bénéficie le ministère de la défense et demandera la suppression de cet article.

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