Intervention de Elisabeth Borne

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 19 novembre 2019 à 18h30
Projet de loi de finances pour 2020 — Audition de Mme élisabeth Borne ministre de la transition écologique et solidaire

Elisabeth Borne, ministre de la transition écologique et solidaire :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, plus que le budget, ce sont les politiques publiques que nous menons que je voudrais vous présenter. Si je me place du point de vue de la norme des dépenses pilotables, ce qui exclut la dette et les pensions, l'effort budgétaire réel pour 2020 est en hausse de plus de 2,6 %, traduisant l'engagement du Président de la République. C'est une attente forte des Français, comme est venu le souligner le grand débat.

Le défi de la transition écologique pose des questions simples, mais les réponses peuvent être complexes. Comment se loger, se nourrir, se déplacer ? Vers quels emplois s'orienter pour le futur ? Ce défi se décline bien sûr dans les territoires, et le Président de la République a eu l'occasion de le souligner lors du Congrès des maires voilà quelques heures.

La transition écologique n'est pas du ressort de mon seul ministère. C'est un objectif transversal pour tous les ministères, qui doit irriguer toutes nos politiques publiques, donc tous les budgets. C'est ce que nous appelons le green budgeting.

L'eau et la biodiversité reçoivent 2,572 milliards d'euros. Les agences de l'eau ont démarré en 2019 leur onzième programme. La priorité porte sur l'adaptation au changement climatique pour préserver les ressources et accompagner les activités économiques qui en dépendent. Nous créons au 1er janvier 2020 l'Office français de la biodiversité (OFB), afin de simplifier notre organisation de préservation de la biodiversité. Ce nouvel établissement renforcera l'efficacité des politiques publiques en coordonnant les actions et en développant ses partenariats territoriaux.

Nous créons également un onzième parc national, le Parc national des forêts de Champagne et Bourgogne. L'Assemblée nationale a accordé aux parcs huit équivalents temps plein (ETP) supplémentaires, notamment pour la création de ce parc en particulier. Grâce à la diversité des outils de classement et de protection, les aires protégées françaises couvrent aujourd'hui environ 29,5 % des terres et 22 % des eaux françaises. Le Président de la République a réaffirmé, à l'occasion du dernier Conseil de défense écologique, l'objectif de 30 % pour les terres et les eaux. Nous poursuivons aussi le plan biodiversité lancé en juillet 2018.

Nous accueillerons en juin, à Marseille le congrès de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), qui traduira, avant la COP 15 en Chine, à l'automne, le positionnement moteur de la France au niveau international sur ce sujet.

Notre politique en faveur de l'énergie et du climat mobilisera 12,128 milliards d'euros en 2020. Nous poursuivrons le soutien aux énergies renouvelables financé dans le cadre du compte d'affectation spéciale sur la transition énergétique, qui est notre premier poste de dépenses. Tous nos programmes ont permis la progression constante de la part des énergies renouvelables au sein de notre mix énergétique, puisqu'elle est passée de 19,6 % à 22,7 % entre 2016 et 2018. Le dispositif du chèque énergie, bénéficiant à plus de 5,8 millions de ménages, est adopté par les Français, son taux d'utilisation après 2 ans dépassant désormais les 80 %.

Le Président de la République s'était également engagé à retirer de la circulation 500 000 véhicules polluants grâce à la prime à la conversion. Cet objectif est d'ores et déjà rempli, et même largement dépassé, avec presque 680 000 dossiers prévus fin 2019. Nous poursuivrons cette mesure en 2020 avec des crédits de 405 millions d'euros, ainsi que 395 millions d'euros pour le bonus des véhicules électriques. L'objectif est désormais de retirer un million de véhicules polluants de la circulation au cours du quinquennat.

Le crédit d'impôt pour la transition énergétique, qui oblige aujourd'hui les ménages les plus modestes à faire l'avance de trésorerie, sera transformé pour eux en prime directement touchée au moment des travaux dans un souci de justice fiscale et d'efficience. Les ménages les plus aisés ne bénéficieront plus du dispositif.

Grâce aux certificats d'économie d'énergie, les ménages peuvent, par exemple, remplacer leur chaudière pour un équipement plus performant en percevant une prime, qui peut aller jusqu'à 4 000 euros, et limiter le reste à charge au strict minimum. Quand j'entends dire que le Gouvernement baisserait le montant des aides à la rénovation thermique de l'habitat, je m'inscris en faux. En 2020, l'effort consacré à cette politique, essentielle pour l'efficacité énergétique, pour le confort, pour la qualité de vie et pour le budget des ménages atteindra 3,5 milliards d'euros.

La politique de prévention des risques sera dotée de 532 millions d'euros, en très légère hausse par rapport à 2019. L'accident de Lubrizol rappelle que notre action dans ce domaine est une priorité. Une attention est tout particulièrement portée aux effectifs dédiés à ces missions : les effectifs de contrôle des inspecteurs des installations classées seront maintenus l'an prochain et les effectifs de l'Agence de sûreté nucléaire seront en hausse en 2020. La prévention des risques naturels majeurs est, de son côté, conduite en lien avec les collectivités. Le fonds Barnier, dont les interventions sont estimées à 180 millions d'euros en 2020, a été pleinement mobilisé lors des inondations dans l'Aude et il est prêt à apporter son soutien lors d'aléas de grande ampleur en 2020.

Nous poursuivons également la mise en oeuvre de la feuille de route pour une économie circulaire. Le projet de loi qui en est issu, et que vous connaissez bien, s'articule autour de quatre orientations : stopper le gaspillage pour préserver nos ressources ; mobiliser les industriels pour transformer nos modes de production ; informer pour mieux consommer ; améliorer la collecte des déchets pour lutter contre les dépôts sauvages. Nos priorités budgétaires iront au renforcement des soutiens accordés par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) aux projets des collectivités pour valoriser leurs déchets et au contrôle des transferts transfrontaliers de déchets. Sur le sujet spécifique de la consigne, nous avons, avec Brune Poirson et Sébastien Lecornu, reçu les différentes parties prenantes. Il en ressort qu'un consensus se dégage autour de la consigne pour réemploi. Pour le reste, nous avons donné rendez-vous à tous le 25 novembre pour une nouvelle réunion. Je suis frappée de voir que des chiffres très différents circulent sur le même sujet, donc j'ai souhaité que l'on puisse au moins se mettre d'accord sur l'état des lieux de départ.

Je n'entrerai pas dans le détail des crédits consacrés aux transports, car je sais que vous avez déjà auditionné Jean-Baptiste Djebbari, mais je tiens à souligner la forte hausse de ce budget en 2020, qui permettra de décliner les engagements pris dans le cadre de la loi d'orientation des mobilités.

Un mot, pour conclure, sur les ponts. On peut penser, sans anticiper sur les conclusions de l'enquête, que le poids lourd impliqué dans cet accident était en surcharge considérable. Le pont était surveillé, entretenu, en bon état. Du reste, c'est un ouvrage du conseil départemental, qui ne manque ni de capacité d'ingénierie ni de ressources pour entretenir son patrimoine. Par ailleurs, je me suis aussi interrogée sur le phénomène des camions mal guidés par des GPS, et qui peuvent s'aventurer sur des voies qu'ils ne devraient pas emprunter. Ce n'était pas le cas en l'occurrence, puisque ce camion venait d'une entreprise voisine, mais je ne voudrais pas en dire plus, compte tenu de l'enquête judiciaire en cours. Avec Jean-Baptiste Djebbari, nous avons également sollicité le Bureau d'enquêtes sur les accidents de transports terrestres.

Il n'en reste pas moins, monsieur le président, que nous avons bien évidemment lu avec grand intérêt l'excellent rapport que vous avez fait sur les ponts et les ouvrages d'art. C'est un sujet sur lequel nous avons certainement à progresser. Il y a, d'une part, la connaissance des ouvrages et, d'autre part, l'accompagnement et le soutien aux collectivités. De façon schématique, on peut dire que les conseils départementaux, les grandes villes en général, connaissent bien et entretiennent bien leur patrimoine. Le problème vient sans doute des petites communes, comme vous l'avez relevé dans votre rapport. Il faut poursuivre la réflexion, en concertation avec les associations d'élus, sur la façon de mieux les accompagner, mais cela ne relève pas forcément de ma compétence.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion