Aujourd'hui, un magistrat qui voudrait se rendre sur le site de l’Ile Longue, au centre de la direction des applications militaires de Bruyères-le-Châtel, où s’effectuent des recherches dédiées à la dissuasion, ou au centre de planification et de conduite des opérations militaires risquerait, en vertu de la législation actuelle, de s’exposer à l’infraction de compromission du secret de la défense nationale.
J’ajoute que les militaires ou les membres du personnel de la DGA qui laisseraient le juge d’instruction ou les enquêteurs pénétrer dans ces lieux seraient eux-mêmes, en vertu du code pénal en vigueur, complices du délit de compromission et encourraient une peine d’emprisonnement de cinq ans et une amende de plusieurs dizaines de milliers d’euros.
Pour aller au bout du raisonnement, imaginons que le juge d’instruction ait accès à des documents classifiés. In fine, la procédure serait automatiquement annulée, puisque le magistrat ne se serait pas adressé à la CCSDN.
Vous reprochez à ce texte de fermer les portes alors que, au contraire, il les ouvre, comme l’a très bien montré M. le rapporteur pour avis de la commission des lois : une liste limitative recensera dix-neuf lieux et une procédure judiciaire pourra désormais se dérouler en présence du président de la CCSDN.
Je ne peux pas décider à la place du Conseil d’État, d’autant que, comme vous, je suis respectueux de la séparation des pouvoirs. Toutefois, ayant enseigné le droit administratif, j’ai encore quelques souvenirs qui font que je ne vois pas en vertu de quoi l’arrêté du Premier ministre qui établit cette liste et qui sera publié au Journal officiel ne pourrait pas faire l’objet d’un recours en premier et dernier ressort devant le Conseil d’État, sauf si celui-ci considère qu’il s’agit d’un acte de Gouvernement, ce que je ne crois pas si je me rappelle bien la jurisprudence administrative. En tout cas, il appartiendra à la haute juridiction administrative d’en décider.