Vous me posez sept questions très différentes, et assez vastes.
Sur les spécialisations, vous me demandez si le principe évoqué va entrer en vigueur au 1er janvier 2020, c'est-à-dire au moment où nous allons créer les tribunaux judiciaires, ou bien plus tard, comme je l'avais évoqué. Il s'agit de contentieux plutôt techniques et de faibles volumes, ce qui permet à des magistrats de se spécialiser. J'ai assorti ce principe de spécialisation d'un principe d'équilibre entre les juridictions. Nous avons demandé aux juridictions de terrain de nous faire des propositions, qui nous sont transmises par les chefs de cours d'appel. Nous avons souhaité aussi que les conseils de juridiction soient saisis pour rendre un avis sur ces propositions. Ce n'est qu'après que nous prendrons les décisions. Comme je n'ai pas encore reçu toutes les propositions des cours d'appel, il me paraît difficile que ce principe entre en vigueur au 1er janvier prochain. Ce sera donc plutôt au 1er septembre.
Concernant la suppression de certains cabinets d'instruction, vous me demandez quels critères seront utilisés. Dans la loi de réforme pour la justice, j'ai insisté sur la proximité et sur la spécialisation, c'est-à-dire sur les compétences, qui sont mieux exercées lorsque les magistrats travaillent en équipe, ou bien sur des contentieux qu'ils ont l'habitude de manier. L'instruction, ce n'est pas de la justice de proximité, et cela ne concerne que 3 % à 4 % des affaires. Il n'est donc pas absurde que, dans certains cas, lorsque c'est possible, plutôt que d'avoir un juge chargé de l'instruction qui gère moins de 30 dossiers par an, on propose un regroupement sur un pôle départemental. Comme c'est sensible symboliquement, nous sommes très attentifs à ce que nous proposent les juridictions et à une approche globale des territoires. C'est pourquoi les décisions ne sont pas encore prises. Et il y aura aussi un passage devant les conseils de juridiction. Le premier critère sera le nombre de dossiers : en dessous de cinquante ouvertures par an - cela peut être trente -, on peut avoir des interrogations. Et bien sûr, la spécificité du territoire devra également être prise en compte.
Vous m'interrogez également sur le statut de la magistrature, comme l'a fait le président Bas. Oui, certains points peuvent faire l'objet d'une rénovation. Ainsi, du délai passé par les juges sur leur poste, qui est actuellement de deux ans : ne faut-il pas le faire passer à trois ans ? On peut aussi travailler sur la question de l'évaluation dans la magistrature : comment ? par qui ? Plusieurs autres sujets, encore, supposeraient une révision de l'ordonnance de 1958. Pour autant, rien n'est arrêté, et nous réfléchissons aussi à des évolutions de la formation, même si, bien sûr, l'École nationale de la magistrature sera maintenue. Tout cela doit être traité de manière globale. Dans Le Monde, Jean-Baptiste Jacquin évoquait l'idée de scinder la révision constitutionnelle pour proposer au Congrès des éléments ne concernant que la justice. Nous n'en sommes pas là : un projet global de révision constitutionnelle a été déposé, c'est le seul projet que je connaisse.