Intervention de Michèle André

Réunion du 23 novembre 2009 à 10h00
Loi de finances pour 2010 — Articles additionnels après l'article 4

Photo de Michèle AndréMichèle André :

Cet amendement vise en fait à moduler le taux de l’impôt sur les sociétés en fonction de l’affection du bénéfice réalisé.

En mai dernier, M. de Montesquiou évoquait, en présentant sa proposition de loi, deux solutions pour obtenir de la part des grands groupes français des contributions significatives : l’une, contraignante, résidait dans l’établissement d’une contribution additionnelle exceptionnelle – nous en discuterons en examinant un amendement à venir ; l’autre, plus partenariale, consistait en une incitation fiscale – tel est l’objet du présent amendement.

La création d’un tel système de « bonus-malus » a déjà été envisagée au Sénat, par voie d’amendement, lors de la discussion du deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2009. Vous aviez alors relevé, monsieur le ministre, qu’un tel débat méritait d’être approfondi – vous venez de le redire –et vous vous étiez engagé à interroger le Trésor public et la direction de la législation fiscale pour bénéficier de leur expertise, en précisant que nous pourrions peut-être en reparler lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2010. Aujourd’hui, nous y sommes : où en êtes-vous, monsieur le ministre ?

Il est impératif de donner des marques de justice aux citoyens, aux consommateurs, aux ménages, aux contribuables, aux PME. En effet, nos compatriotes subissent lourdement les conséquences de la crise, que ce soit la hausse des prix ou le chômage, quand ce n’est pas les deux, alors qu’ils assistent, parallèlement, à la distribution de parachutes dorés, de retraites chapeau, de dividendes mirifiques. Pourquoi devraient-ils subir une double peine tout en étant régulièrement nargués par l’annonce de dividendes et autres super-revenus qui se chiffrent en millions d’euros ?

Certaines entreprises persistent dans une logique très peu vertueuse en temps de crise, poursuivant leur politique de maximisation du retour aux actionnaires, jumelée à une politique des prix que supportent seuls les consommateurs, que ce soit les ménages ou les PME.

Les stratégies d’optimisation fiscale développées par les grandes firmes et leurs armadas d’experts financiers font feu de tout bois, plus encore en France que dans des pays comme l’Espagne ou le Royaume-Uni. Les pratiques d’optimisation fiscale sont favorisées par la complexité de notre système fiscal et social, en particulier par la multiplication des régimes et dispositions dérogatoires. Le Conseil des impôts relevait, dans son rapport de 2007, les difficultés méthodologiques auxquelles étaient confrontés les États pour les évaluer. En France, ces difficultés demeurent, car notre pays a accumulé, en matière d’évaluation, des retards qu’elle n’a pas résorbés. Aux États-Unis, le seul tax gap, c’est-à-dire l’insuffisance des rentrées fiscales par rapport à la situation normale où tous les contribuables respecteraient pleinement la législation, a été chiffré sur dix ans à 210 milliards de dollars.

Monsieur le ministre, vous avez annoncé une réforme destinée à améliorer le rendement de l’impôt sur les sociétés. Il s’agissait de lutter contre les ingénieux montages fiscaux que les juristes de la direction générale des impôts qualifient d’abus de droit et qui consistent à exploiter toutes les finesses des procédures légales pour réduire l’addition payée par l’entreprise, contribution pourtant juste et nécessaire.

Osons enfin mettre en œuvre un dispositif vertueux qui incite les entreprises à réinvestir une fraction importante de leur bénéfice imposable ! Je ne peux manquer de rappeler, à cet instant, les propos suivants, tenus par le Président de la République lui-même : « Il faut que chacun comprenne que si l’on demande aux salariés de porter une partie du fardeau dans la crise, il est normal que les mêmes salariés bénéficient du fruit de leur travail quand cela va bien. »

Or on a constaté que, souvent, l’explosion des profits financiers s’est faite au détriment de l’investissement dans le capital productif et s’est accompagnée d’une croissance exponentielle des plus hautes rémunérations.

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