La séance est ouverte à dix heures.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2010, adopté par l’Assemblée nationale (nos 100 et 101).
Dans la discussion des articles, nous en revenons à l’article 1er, les articles 2 à 3 et 13 à 20 ayant été examinés en priorité.
TITRE IER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
I. – IMPÔTS ET RESSOURCES AUTORISÉS
A. – Autorisation de perception des impôts et produits
I. – La perception des impôts, produits et revenus affectés à l’État, aux collectivités territoriales, aux établissements publics et organismes divers habilités à les percevoir continue d’être effectuée pendant l’année 2010 conformément aux lois et règlements et aux dispositions de la présente loi.
II. – Sous réserve de dispositions contraires, la présente loi s’applique :
1° À l’impôt sur le revenu dû au titre de 2009 et des années suivantes ;
2° À l’impôt dû par les sociétés sur les résultats des exercices clos à compter du 31 décembre 2009 ;
3° À compter du 1er janvier 2010 pour les autres dispositions fiscales.
L'article 1 er est adopté.
L'amendement n° I-283, présenté par M. P. Dominati et Mlle Joissains, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les documents émanant du gouvernement et engageant les fonds publics, les rapports budgétaires ministériels et les formulaires d'envoi concernant les déclarations d'impôt doivent être assortis de la mention suivante : « Le crédit nous engage, il doit être remboursé. L'État vérifie ses capacités de remboursement avant de s'engager ».
La parole est à M. Philippe Dominati.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, de nombreux orateurs l’ont souligné, l’année à venir s’annonce exceptionnelle par l’ampleur de l’emprunt qu’il sera nécessaire d’émettre pour combler le déficit de nos finances publiques.
Par exemple, pour protéger les consommateurs des difficultés liées au surendettement, le législateur, lors de la réforme du crédit à la consommation, a prévu de faire figurer un message d’avertissement sur les publicités concernées.
Par analogie, je propose que l’État informe, d’une manière ou d’une autre, ses agents de la situation particulièrement délicate dans laquelle se trouvent nos finances publiques.
Pour cette action de sensibilisation, quelles mesures comptez-vous prendre, monsieur le ministre ? Avez-vous l’intention, comme le ministre de l’intérieur pour les questions de sécurité ou le ministre de la santé pour les problèmes de santé publique, d’organiser des réunions semestrielles, trimestrielles, mensuelles ou hebdomadaires ?
Il serait particulièrement ardu, j’en suis bien conscient, de sélectionner les documents administratifs concernés par une telle mention. Au demeurant, en déposant cet amendement, je me suis contenté de reprendre une idée de M. le président de la commission des finances.
La commission estime qu’une telle initiative relève d’une heureuse pédagogie, bien que l’on puisse douter de sa valeur juridique. Pour autant, la prise de conscience des méfaits et des risques de la dette étant une nécessité, la commission considère cet amendement avec sympathie. Elle s’en remet toutefois à l’avis du Gouvernement sur les aspects opérationnels notamment.
Pour ma part, je ne suis pas favorable à votre amendement, monsieur Dominati.
Bien entendu, on ne peut être hostile à l’état d’esprit qui le gouverne. Le crédit tue, pour reprendre les propos de M. le rapporteur général.
Mais, au fond, envers qui devons-nous faire œuvre de pédagogie ? La pédagogie n’est-elle pas d’abord à faire entre nous ?
La véritable question est de savoir si les responsables publics prendront, à un moment donné, le taureau par les cornes, en adoptant un discours pédagogique sur le problème de la dette.
Bien sûr, c’est d’ores et déjà ce que nous nous efforçons de faire ; la crise masque les choses. Au fur et à mesure du temps, nous devrons le faire par obligation, comme la plupart des pays du monde très endettés. Le recours à l’endettement massif appelle une réponse massive des gouvernants.
Je pense que l’on se trompe de pédagogie, monsieur le sénateur. Des coups de tampon portant la mention « Attention ! Le crédit nous engage tous ! » sur les documents publics permettront-ils de changer la situation ? Bien que je partage votre état d’esprit, je ne suis pas sûr qu’une telle mesure soit appropriée.
Monsieur le ministre, peut-être n’est-ce pas le bon moment, la bonne méthode ? Mais, avant de retirer mon amendement, j’attends votre réponse sur les mesures que vous comptez prendre. Je le répète, des réunions seront-elles organisées dans le courant de l’année avec les principaux agents de l’État, comme lorsque le ministre de l’intérieur réunit les préfets sur un sujet particulier ? Quelle action comptez-vous mener, en cette année historique, pour mettre en place un mécanisme de prévention ?
Comme nous l’avons d’ailleurs estimé en commission, l’intention me paraît tout à fait louable.
Simplement, cela relève du domaine réglementaire ! Après tout, le ministre du budget, depuis de très nombreuses années, envoie une lettre explicative de deux pages à l’appui des formulaires de déclarations de revenus, dans laquelle il donne toute une série d’explications et d’indications. Il suffirait que le Gouvernement s’engage à apporter, à cette occasion, les mentions nécessaires aux documents concernés.
À mon avis, cela donnerait satisfaction à la commission, qui a examiné cet amendement dans un esprit favorable, tout en jugeant qu’il était difficile d’insérer une telle disposition dans une loi de finances.
M. Charasse a raison, il est parfaitement envisageable d’ajouter cette mention au document qui sera transmis l’année prochaine.
Pour les rendez-vous prévus, le Président de la République a indiqué aux maires, réunis à l’Élysée, qu’il souhaitait organiser une conférence nationale des finances publiques, qui rassemble les différents acteurs des finances publiques. Cette instance ne s’étant pas réunie depuis l’année dernière, nous allons préparer sa tenue.
Je pense également aux prochaines échéances parlementaires, particulièrement importantes.
La première, c’est le moment où nous allons débattre ensemble du grand emprunt faisant l’objet du collectif budgétaire qui sera présenté en conseil des ministres dans le courant du mois de janvier prochain. Ce sera aussi l’occasion de nous pencher de nouveau sur l’endettement de notre pays. Nous nous apprêtons à structurer le débat.
La seconde échéance à laquelle je tiens beaucoup, c’est lorsque nous allons revoir la projection trisannuelle de nos finances publiques. Les questions de l’endettement et de l’assainissement des finances publiques seront posées dans des termes nouveaux, du moins je l’espère, comme la réduction de la dépense publique et les règles de finances publiques.
L'amendement n° I-223, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 278 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 278. - À compter du 1er janvier 2009, le taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée est fixé à 17, 60 %. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par le relèvement du taux de l'impôt sur les sociétés.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
La taxe sur la valeur ajoutée, véritable impôt indirect, est sans doute l’une des taxes les plus injustes, car elle s’applique à tous les consommateurs, c'est-à-dire à tous les contribuables, quels que soient leurs revenus. On pourrait même dire que la TVA est un impôt proportionnel à la consommation, mais paradoxalement dégressif, puisque cette taxe représente en moyenne 10 % à 12 % du salaire pour une personne au SMIC, alors qu’elle n’affecte que 6 % à 7 % des revenus d’une personne gagnant 10 000 euros, mais n’en consommant pas l’intégralité.
Cette situation de fait explique sans doute les raisons pour lesquelles la TVA rapporte au budget de la nation le double du produit de l’impôt sur le revenu, notamment à cause du bouclier fiscal.
Déjà, en 2008, M. Fillon avait refusé de baisser le taux de la TVA, au motif que, en période de crise, il ne fallait se priver d’aucune ressource. On ne saurait qu’être d’accord avec cette analyse, à la condition que toutes les ressources soient incluses, y compris celles des plus riches.
Selon le Premier ministre, pour faire baisser les prix, il fallait faire jouer la concurrence entre les acteurs de la grande distribution. Aujourd’hui, on sait ce qu’il en est : les prix des produits de première nécessité n’ont pas baissé et les prix des marques des distributeurs ont explosé, alors même qu’elles sont achetées par les ménages les plus modestes. Il semblerait même que les acteurs vers lesquels le Gouvernement renvoyait les consommateurs se seraient entendus entre eux pour ne pas baisser leurs prix, conserver leurs marges et rémunérer grassement leurs actionnaires. Voilà les conséquences du libéralisme !
C’est pourquoi, loin d’une logique qui renvoie la hausse du pouvoir d’achat à des comportements individuels, nous entendons, par cet amendement, permettre un mouvement collectif, fondé sur l’action de l’État.
Monsieur Foucaud, je ne vous surprendrai pas en vous disant que l’analyse économique et politique de la majorité de la commission est diamétralement opposée à la vôtre. La commission est donc tout à fait défavorable à cet amendement.
Monsieur le ministre, il est rare que les sénatrices et sénateurs du groupe CRC-SPG vous invitent à reproduire en France les mesures prises Outre-Manche.
Sourires
Nous ferons toutefois une exception, puisque, l’année dernière, le 20 novembre pour être précis, le Premier ministre britannique Gordon Brown avait précisément consenti à une baisse de la TVA de 2, 5 points, qu’il annonçait vouloir accompagner d’une hausse de 5 % de l’imposition des plus hauts revenus.
Nous considérons qu’il faut impérativement réformer cet outil de taxation pour le rendre plus juste, d’autant plus que, depuis sa création en 1954, les choses ont bien changé. Tout le monde reconnaîtra que la valeur ajoutée n’est plus répartie de la même manière. Il suffit pour s’en convaincre de constater le glissement progressif des salaires vers les dividendes des actionnaires, qui, rappelons-le, ne sont pas assujettis à l’impôt, comme cela devrait être le cas.
Par ailleurs, comment refuser une baisse généralisée de la TVA sur l’ensemble des produits alors que votre majorité a consenti, sans aucune contrepartie obligatoire, une réduction de la TVA au secteur de la restauration ?
Rien ne justifierait ce refus, et cette mesure de baisse de la TVA que nous proposons est, je crois, attendue par l’immense majorité de nos concitoyens, à commencer par les ménages les plus modestes.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° I-436, présenté par M. Cambon et Mme Procaccia, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au huitième alinéa du 1° de l'article 1382 du code général des impôts, après les mots : « les hospices », sont insérés les mots : « à hauteur de 90 % de leur base d'imposition »
La parole est à M. Christian Cambon.
Monsieur le ministre, après avoir, samedi soir, attiré votre attention sur la situation fiscale des communes proches des aéroports, je voudrais, à travers cet amendement, vous intéresser à la fiscalité, à vrai dire inexistante, qui relie les hôpitaux – particulièrement les anciens hospices convertis en hôpitaux publics – et les communes.
Vous connaissez les sujétions qui pèsent sur les communes accueillant sur leur territoire des équipements hospitaliers. Dans le département du Val-de-Marne, c’est notamment le cas de villes comme Le Kremlin-Bicêtre, Villejuif ou Limeil-Brévannes. Quant à ma commune, elle est occupée à plus de 33 % par des hôpitaux.
Or, depuis la suppression de la taxe sur les salaires, les collectivités accueillant des hôpitaux ont vu les quelques recettes générées par cette taxe disparaître, alors qu’elles supportent des charges importantes. Elles doivent répondre aux demandes de logements – plus de deux cents chaque année dans ma commune qui ne peuvent être affectés ni sur le 1 % logement, ni sur les quotas du préfet – offrir des places en crèches, entretenir la voierie, etc.
Mon propos est évidemment non pas de remettre en cause le principe d’exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties, mais de l’atténuer légèrement, pour prendre en compte ce phénomène nouveau qui consiste, pour les hôpitaux – souvent d’ailleurs dans le cadre de la RGPP –, à céder des terrains à des opérateurs privés ou à percevoir des subventions lorsqu’ils sont traversés par des canalisations ou des équipements de ce genre. Certains hôpitaux vendent une partie de leur foncier pour y accueillir des résidences hôtelières, voire des PME ou des laboratoires. Ces terrains ont donc une valeur vénale, et ne peuvent pas seulement être considérés comme une propriété publique.
C’est pourquoi cet amendement vise à limiter à 90 % de la base imposable l’exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties. Cela permettrait de générer une ressource qui, bien que modeste, constituerait malgré tout un encouragement pour les collectivités confrontées à cette lourde charge.
Les différents contacts que nous avons pris avec les hôpitaux montrent, à l’évidence, qu’ils sont disposés à participer sous cette forme à la vie publique locale. Il faudrait simplement que les textes leur en offrent la possibilité.
En tant que maire d’une commune dotée d’un centre hospitalier, je ne peux qu’être sensible à la démarche de notre collègue. Comme lui, je connais bien ce problème.
Cela étant, le Gouvernement avancera probablement l’argument des vases communicants, cette charge nouvelle pour l’assurance maladie devant, selon les règles en vigueur, être compensée par le budget de l’État.
Nous devrions peut-être attendre que les comptes de la sécurité sociale soient revenus à l’équilibre pour envisager l’application du droit commun.
Je comprends votre préoccupation, mon cher collègue, mais la vision consolidée des finances publiques semble rendre difficile cette approche, du moins dans l’immédiat.
Bien entendu, si le Gouvernement émettait un avis différent, je m’y rallierais bien volontiers.
Des explications ont été données avec beaucoup de mesure par le rapporteur général.
Bien évidemment, le Gouvernement n’a pas d’opposition de principe à votre argumentation, monsieur Cambon. Je comprends bien le problème qui se pose aux collectivités locales concernées. La présence de ce type d’établissements sur leur territoire les prive d’une base foncière importante, alors même que leurs charges continuent de courir.
Cependant, je ne peux pas être favorable à cet amendement. En dernier ressort, il faut bien que quelqu’un paye. Si l’on impose les hôpitaux, le prix de journée, qui, selon les cas, est pris en charge par le conseil général ou par l’assurance maladie, va augmenter. On ne peut pas faire porter une charge sur des établissements qui, eux aussi, ont des difficultés à équilibrer leur budget.
J’ai été sensible aux propos de M. le rapporteur général, et je comprends la logique comptable développée par M. le ministre.
Il s’agissait surtout d’un amendement d’appel. Je ne m’attendais pas à ce qu’une solution sorte comme par magie du chapeau ce matin, mais je voulais évoquer ce phénomène nouveau qui consiste, pour des établissements hospitaliers, à vendre leurs terrains pour en tirer des bénéfices. Je ne vois pas pourquoi le profit que les hôpitaux tirent directement de la vente de ces terrains ne pourrait pas être versé indirectement, sous la forme d’une contribution, au budget des collectivités locales. Il s’agit de ressources considérables.
Je suis d’ailleurs à votre disposition pour établir la liste de tous les terrains que les hôpitaux ont vendus à des acquéreurs privés, y compris pour réaliser des opérations immobilières. Il s’agit de terrains à bâtir et il est choquant de voir que les collectivités n’y trouvent aucun intéressement.
Cela étant dit, je retire cet amendement.
L'amendement n° I-436 est retiré.
L'amendement n° I-82, présenté par M. Hérisson, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 1595 quater du code général des impôts est abrogé.
II. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la majoration du prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale.
III. - la perte de recettes résultant pour l'État du II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° I-228, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - A compter du 1er janvier 2010, pour les exercices clos ou la période d'imposition arrêtée conformément au deuxième alinéa de l'article 37 du code général des impôts, les personnes morales sont assujetties à une contribution égale à 10 % de l'impôt sur les sociétés, calculé sur leurs résultats imposables aux taux mentionnés au I de l'article 219 du même code.
II. - La contribution est payée spontanément au comptable du Trésor chargé du recouvrement des impôts directs, au plus tard à la date prévue au 2 de l'article 1668 du code général des impôts pour le versement du solde de liquidation de l'impôt sur les sociétés.
Pour les entreprises dont l'exercice est clos en 2010 avant le 1er juin, la contribution due au titre de cette année est payée au plus tard le 15 septembre 2010.
Pour les exercices arrêtés au cours des mois de mars à décembre ou pour la période d'imposition mentionnée au I, la contribution donne lieu, au préalable, à un versement anticipé à la date prévue pour le paiement du dernier acompte d'impôt sur les sociétés, avant la clôture dudit exercice ou la fin de ladite période ; la somme due est alors égale à 10 % du montant de l'impôt sur les sociétés calculé sur les résultats de l'exercice ou de la période qui précède, imposables aux taux mentionnés au I de l'article 219 du code général des impôts.
Lorsque la somme due au titre d'un exercice ou d'une période d'imposition en application de l'alinéa précédent est supérieure à la contribution dont l'entreprise prévoit qu'elle sera finalement redevable au titre de ce même exercice ou de cette même période, l'entreprise peut réduire ce versement à concurrence de l'excédent estimé. Elle remet alors au comptable du Trésor chargé du recouvrement des impôts directs, avant la date d'exigibilité du versement anticipé, une déclaration datée et signée.
Si la déclaration mentionnée à l'alinéa précédent est reconnue inexacte à la suite de la liquidation de la contribution, la majoration prévue au 1 de l'article 1762 du code général des impôts est appliquée aux sommes non réglées.
III. - La contribution est établie, contrôlée et recouvrée comme l'impôt sur les sociétés et sous les mêmes garanties et sanctions.
IV. - Pour les personnes mentionnées au I qui sont placées sous le régime prévu à l'article 223 A du code général des impôts, la contribution est due par la société mère. Elle est assise sur l'impôt sur les sociétés afférent au résultat d'ensemble et à la plus-value nette d'ensemble définis aux articles 223 B et 223 D du même code.
V. - Pour les personnes mentionnées au I qui sont placées sous le régime prévu à l'article 209 quinquies du code général des impôts, la contribution est calculée d'après le montant de l'impôt sur les sociétés, déterminé selon les modalités prévues au I, qui aurait été dû en l'absence d'application de ce régime. La contribution n'est ni imputable ni remboursable.
Les avoirs fiscaux ou crédits d'impôt de toute nature ainsi que la créance visée à l'article 220 quinquies du code général des impôts et l'imposition forfaitaire annuelle mentionnée à l'article 223 septies du même code ne sont pas imputables sur cette contribution.
VI. - Un décret fixe les modalités d'application du présent article.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
La proposition que nous formulons à travers cet amendement s’appuie sur l’analyse de la situation réelle des comptes publics et de la nécessité de concevoir des solutions adaptées en la matière.
Nous avons, dans le passé, maintes fois discuté de la pertinence des baisses d’impôts dont ont bénéficié les entreprises dans notre pays. Aujourd’hui, l’état des lieux n’est pas satisfaisant, qu’il s’agisse de la situation des comptes publics ou de celle des prélèvements obligatoires.
Disons les choses clairement : la réduction continue, depuis plus de vingt ans, de la contribution des entreprises au financement des dépenses de l’État et de la sécurité sociale a conduit, dans les deux cas, à aggraver les déficits.
De ce point de vue, l’exercice 2009 n’est pas en reste, bien au contraire. Il a fallu attendre le 1er juillet pour que l’État commence à percevoir effectivement des recettes d’impôt sur les sociétés.
Des milliards d’euros ont été distribués aux entreprises, dans le cadre du plan de relance, sous toutes les formes possibles et imaginables, et l’on a remboursé des acomptes d’impôt sur les sociétés sans limite et sans contrôle excessif ; il semble que des instructions en ce sens aient été données aux services de la direction générale des finances publiques.
Faisons le bilan : 24 milliards d’euros d’acomptes d’impôt sur les sociétés remboursés, 4 milliards d’euros de crédits d’impôt, plus de 20 milliards d’euros en deux ans d’exonérations d’impôt au titre de la suppression de la taxation des plus values de long terme… Certes, toutes ces mesures ont amélioré la trésorerie des entreprises. En revanche, elles ne semblent ni avoir résolu les questions de sous-emploi en France, ni avoir enrayé la chute des investissements productifs, alors même qu’elles ont dégradé profondément la situation des comptes publics.
L’ampleur du déficit budgétaire, qui excède largement le coût du seul service de la dette, appelle des décisions importantes, parmi lesquelles figure la nécessité de relever le taux d’imposition sur les bénéfices des sociétés, en réinstaurant le dispositif que la majorité sénatoriale avait dû voter, en des temps tout aussi troublés, à l’été 1995.
Le redressement des comptes publics est nécessaire, et la mesure que nous proposons permettrait de dégager plus de 6 milliards d’euros de ressources nouvelles, ce qui n’est pas négligeable.
Vous connaissez par avance notre réponse, monsieur Foucaud.
J’apprécie certes la constance et la cohérence des positions doctrinales du groupe CRC-SPG. Mais vous savez que celles de majorité de la commission sont tout aussi établies, monsieur le sénateur.
En conséquence, l’avis est très défavorable.
Notre taux d’imposition sur les bénéfices des sociétés est déjà plus élevé que dans la plupart des pays voisins et, de manière générale, le taux de prélèvement qui pèse sur les entreprises est supérieur de plusieurs points à celui que supportent les entreprises des États membres de l’Union européenne.
En conséquence, le Gouvernement ne peut qu’être défavorable à cet amendement.
Avec les 6 milliards d’euros de recettes fiscales nouvelles que nous lui proposons d’engranger, l’État pourrait davantage lutter contre le chômage, notamment en renonçant aux réductions massives d’emplois publics que prévoit ce projet de loi de finances.
Il pourrait également éviter d’émettre de nouveaux titres de dette publique destinés à lui procurer des ressources de trésorerie. Alors que l’on parle de plus en plus du grand emprunt, on semble oublier que, durant le seul mois de juin 2009, plus de 50 milliards d’euros de bons du Trésor à court terme ont été émis.
Je voterai en faveur de cet amendement, mais je souhaiterais également poser une question à M. le ministre.
Vous prétendez que vous ne pouvez pas augmenter l’impôt sur les sociétés en raison de la concurrence des autres pays européens. Mais votre ministère a-t-il engagé des démarches pour encourager une harmonisation fiscale au niveau européen ?
Je rappellerai que l’Union européenne travaille déjà depuis plusieurs années à l’harmonisation des assiettes des impôts sur les sociétés.
Bien n’étant pas un farouche défenseur du fédéralisme fiscal, il me semble qu’il faut se rapprocher progressivement d’une même méthode d’appréciation des bases d’imposition.
Alors que l’Europe est maintenant dotée d’un président et d’une gouvernance plus claire qu’auparavant, on peut espérer que le nouveau commissaire en charge de la fiscalité sera une force d’impulsion et de proposition pour s’approcher du résultat.
Je peux donc souhaiter, en faisant au moins un peu de chemin dans le même sens que M. Desessard, que cette démarche reparte et devienne enfin opérationnelle.
L’article 199 ter B du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Les huitième et neuvième alinéas du I sont supprimés ;
2° Il est complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. – Par exception à la troisième phrase du premier alinéa du I :
« 1° Les entreprises ayant fait l’objet d’une procédure de sauvegarde, d’un redressement ou d’une liquidation judiciaires peuvent demander le remboursement de leur créance non utilisée à compter de la date du jugement qui a ouvert ces procédures. Ce remboursement est effectué sous déduction d’un intérêt appliqué à la créance restant à imputer. Cet intérêt, dont le taux est celui de l’intérêt légal applicable le mois suivant la demande de l’entreprise, est calculé à compter du premier jour du mois suivant la demande de l’entreprise jusqu’au terme des trois années suivant celle au titre de laquelle la créance est constatée ;
« 2° La créance constatée par les petites et moyennes entreprises mentionnées à l’article 220 decies au titre des années au cours desquelles elles bénéficient de la réduction d’impôt prévue au même article ou celle constatée par les jeunes entreprises innovantes mentionnées à l’article 44 sexies-0 A est immédiatement remboursable ;
« 3° Le crédit d’impôt pour dépenses de recherche engagées au titre de l’année 2009 s’impute sur l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2009 et l’excédent est immédiatement remboursable.
« Les entreprises peuvent obtenir, sur demande, le remboursement immédiat d’une estimation de la différence positive entre, d’une part, le montant du crédit d’impôt calculé à raison des dépenses de recherche engagées au titre de l’année 2009 et, d’autre part, le montant de l’impôt sur le revenu dû au titre de 2009.
« Le montant de crédit d’impôt calculé à raison des dépenses de recherche engagées au titre de l’année 2009 et utilisé pour le paiement de l’impôt sur le revenu dû au titre de cette année est diminué du montant du remboursement mentionné au deuxième alinéa du présent 3°.
« Si le montant du remboursement mentionné au même deuxième alinéa excède le montant du crédit d’impôt prévu au troisième alinéa, le montant de l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2009 est majoré de cet excédent.
« Lorsque le montant du remboursement mentionné au même deuxième alinéa excède de plus de 20 % la différence positive entre, d’une part, le montant du crédit d’impôt à raison des dépenses de recherche engagées au titre de l’année 2009 et, d’autre part, le montant de l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2009, cet excédent fait l’objet :
« a) De la majoration prévue, selon le cas, à l’article 1730 ou à l’article 1731 ;
« b) D’un intérêt de retard dont le taux correspond à celui mentionné à l’article 1727. Cet intérêt de retard est calculé à partir du premier jour du mois qui suit le remboursement mentionné au deuxième alinéa du présent 3° jusqu’au dernier jour du mois du dépôt de la déclaration de crédit d’impôt calculé à raison des dépenses engagées au titre de 2009. »
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-186, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Les articles 69 et 70 de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008 sont abrogés.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
Cet amendement vise à supprimer les dispositions adoptées en décembre 2007 réformant le crédit d’impôt recherche, le CIR.
Pour rappel, depuis le 1er janvier 2008, l’assiette du CIR est étendue à l’intégralité des dépenses de recherche des entreprises. De même n’est désormais plus prise en compte la part en accroissement des dépenses en recherche et développement. Enfin, le taux de crédit d’impôt a été majoré jusqu’à 50 %, puis de 40 % la deuxième année pour les entreprises qui en bénéficiaient pour la première fois et pour celles qui n’en avaient pas bénéficié depuis cinq ans.
Si la Cour des comptes soulignait que la réforme du CIR allait « dans le sens de ses recommandations, en assurant la simplification du système et en améliorant sa sécurité juridique », elle demandait une évaluation sérieuse des effets du CIR, notamment sur les PME.
Force est de constater que les premières études d’impact du CIR étaient peu probantes quant au caractère incitatif du dispositif. Outre les ratios extrêmement limités - un euro de CIR ne générait qu’un euro de dépenses en recherche et développement supplémentaires - ces études démontrent que le dispositif profite essentiellement aux entreprises de plus de 250 salariés, et ne suscite guère la prise de risques, l’engagement de recettes sur le moyen ou long terme, ou l’embauche de docteurs.
Par ailleurs, les seules évaluations économétriques dont nous disposons portent sur le dispositif antérieur à 2008 et ne peuvent être légitimement extrapolées au CIR dans sa forme actuelle.
Autant dire qu’une nouvelle fois le Parlement est invité à voter une mesure dont on ignore totalement les effets.
Plus préoccupant encore, le rapport de M. Carrez, rapporteur général de l’Assemblée nationale, établissait que les deux tiers du CIR profitaient au secteur tertiaire, notamment aux banques, assurances et conseils en entreprise. Selon le Gouvernement, ce constat serait faussé par un changement de nomenclature de l’INSEE depuis 2008. Il n’en reste pas moins qu’une analyse de la ventilation sectorielle du CIR sur les années 2004 et 2007 permet de conclure que la recherche industrielle, qui réalise 90% de la recherche privée en France, ne bénéficie qu’à la marge du dispositif, tandis que la recherche tertiaire a vu son crédit d’impôt recherche tripler!
En fait, le droit fiscal permet de faire remonter le CIR des filiales industrielles d’un groupe à sa tête. Le soutien financier à la recherche privée se transforme alors en subventions aux holdings financières, sans maintenir de lien avec le terrain où se mène réellement la recherche. Je n’ai pas le temps de développer les avis exprimés par les instances européennes, mais je pense avoir résumé la philosophie de notre amendement.
M. Jean Desessard applaudit.
L'amendement n° I-281, présenté par M. P. Dominati, Mlle Joissains et M. Revet, est ainsi libellé :
I. - Alinéas 7, 8, 9, 10 et 11
Supprimer l'année :
II. - Alinéas 8 et 13, seconde phrase
Remplacer les mots :
au titre de 2009
par les mots : au titre de l'année
III. - Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
Le crédit d’impôt recherche est un incontestable succès. Non seulement il sert d’amortisseur pendant la crise, mais il servira de tremplin pour la relance. C’est ainsi que le Gouvernement nous a proposé dans le plan de relance un dispositif particulier pour l’année 2009, notamment pour les PME.
J’ai eu l’occasion, dans la discussion générale, d’évoquer les effets extrêmement positifs de ce dispositif sur l’économie nationale au cours de l’année 2009. Forte de ce succès, cette mesure incitative doit être prorogée pour l’année 2010, mais également, il me semble, être pérennisé dans l’avenir. C’est l’objectif de cet amendement, monsieur le ministre.
En vérité, la commission n’est convaincue par aucune des deux approches qui viennent d’être exposées. In medio stat virtus.
La réforme du crédit d’impôt recherche a été globalement efficace. Quant aux mesures du plan de relance, il n’est pas souhaitable, en tant que telles, qu’elles soient pérennisées.
Sur ces deux amendements et pour des raisons opposées, la commission souhaite un retrait.
Le Gouvernement n’est favorable ni à l’un ni à l’autre des amendements, pour des raisons différentes.
Le crédit d’impôt recherche a tenu ses promesses. À ce jour, nombre d’entreprises en ont bénéficié, ce qui montre en réalité que nous avons encouragé la recherche française. Certaines entreprises projettent même aujourd’hui de relocaliser leurs activités de recherche en France, parce que le bénéfice fiscal est très important. Nous sommes donc très compétitifs sur ce plan.
Si des holdings ont bénéficié de la mesure, c’est simplement parce qu’à un moment donné le crédit remonte des filiales vers la holding à la tête du groupe, et apparaît par la suite dans les comptes de celle-ci.
Les holdings dont il est question ne sont donc pas uniquement financières ; elles détiennent des parts d’entreprises éligibles au CIR, lesquelles sont souvent, en principe, des entreprises du secteur industriel. On trouve également des activités de recherche dans certaines entreprises du secteur des services, dans le domaine de l’informatique, par exemple.
Il n’y a donc pas de détournement ou d’abus de droit dans le domaine du crédit d’impôt recherche. Il y a bien une incitation, une émulation pour le secteur économique. Cela est reconnu par presque tous les milieux économiques, et important pour les entreprises qui en bénéficient.
L’amendement de M. Dominati vise à rendre pérenne le dispositif du plan de relance. Nous avons également un avis défavorable sur ce point, puisqu’une telle mesure aurait un coût très lourd pour les finances de l’État.
Nous avons adopté ce dispositif en 2009, nous le reconduisons, monsieur le sénateur, vous le savez, en 2010, pour mettre du carburant dans la machine économique !
Pérenniser le dispositif, faire en sorte d’écraser la période de quatre ans - une année plus trois - définitivement, c’est différent. C’est évidemment un débat que nous aurons à la sortie de crise, à un moment donné, comme toujours sur les dispositifs fiscaux.
Pour ces deux raisons, je ne suis pas favorable à ces deux amendements.
M. le ministre est bien allant sur le bénéfice qu’apporterait le crédit d’impôt recherche.
C’est un vieux dispositif, qui remonte aux années 1980, même peut-être avant…
… et qui a été remodelé à l’occasion de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, au nom de la compétitivité et de l’attractivité du territoire.
Rapporteur spécial pour la recherche et l’enseignement supérieur, notre collègue Christian Gaudin s’intéresse évidemment au CIR. Il nous a fait la semaine dernière, en commission des finances, un point d’étape. Il est quand même moins allant que vous ne l’êtes pour la bonne raison qu’avec le retard nous n’avons pas d’évaluation de ce qui va représenter en année de croisière quatre milliards d’euros de dépenses fiscales.
C’est une dépense très importante ! J’attire donc votre attention, monsieur le ministre, sur le sujet général des dépenses fiscales.
Nous ne sommes pas systématiquement opposés à un tel type de dépenses, mais il faut que celles-ci aient une utilité économique ou une utilité sociale.
Dans la mesure où l’on retarde une telle évaluation, nous sommes bien obligés de constater que certaines entreprises qui devraient bénéficier du CIR n’en profitent pas, quand d’autres en bénéficient alors qu’elles ne se sont pas particulièrement investies dans le domaine industriel ou dans l’innovation.
Dans les modalités du CIR tel qu’il a été reformaté en 2007 avec début d’effet en 2008, certaines dépenses prises en compte par le dispositif sont des dépenses de marketing, par exemple, et ne sont donc pas forcément des dépenses utiles à l’innovation et à la recherche.
Il faut donc être beaucoup plus prudent sur cette dépense fiscale. Je souhaite qu’à un moment donné, monsieur le ministre, nous ayons un débat sur ce sujet, afin de savoir si ce qu’on nous dit est vrai.
Dans le département que j’ai l’honneur de représenter, les nouvelles dispositions sur le CIR ont permis d’attirer des très grandes ou des très petites entreprises ; très grandes, Microsoft ; très petites, une douzaine d’entreprises de biotechnologie qui étaient situées dans la région de Londres et qui sont venues s’installer dans le département des Hauts-de-Seine.
Cela étant dit, je crois que l’effet de rattrapage de 2009 était un élément de relance, mais qu’il ne faut pas toucher trop vite aux réglementations sur le crédit d’impôt recherche dans ce domaine si important. Nous avons là un élément d’attractivité du territoire.
Une fois de plus, la stabilité de la législation me paraît nécessaire. On n’arrive à rien en matière fiscale si on change les règles du jeu tous les ans. Je suis donc, comme M. le ministre, défavorable à ces deux amendements.
Je suis également défavorable à ces deux amendements.
Cependant, monsieur le ministre, à l’occasion d’une communication de notre collègue Christian Gaudin, qui est le rapporteur spécial pour la recherche et l’enseignement supérieur, nous avons constaté que ce crédit d’impôt recherche est un puissant levier pour développer les activités de recherche.
Nous voudrions évaluer la corrélation entre la recherche et la production. Autrement dit, avoir sur son territoire des sites accueillant des activités de recherche est formidable. Mais, si toutes les transformations industrielles, si tout le développement doit se faire en Europe centrale ou en Asie, il y a alors un vrai sujet de discussion. Nous souhaiterions que les dispositions prises par le Gouvernement prennent en compte l’ensemble des activités.
Je suis content de savoir que ces deux amendements suscitent un débat et d’entendre notre collège M. Fourcade dire qu’une douzaine d’entreprises qui étaient à Londres se sont établies dans son département.
La majorité sénatoriale change de position en fonction de ce qui l’arrange. Elle défend une mesure en prétendant que celle-ci attire les entreprises ; elle prend prétexte des délocalisations pour demander plus d’argent afin de dissuader les entreprises de s’installer à l’étranger.
Bien sûr, nous ne sommes pas dupes, et nous avons compris la manœuvre.
J’en reviens à l’amendement n °I-186. Dans son rapport annuel, le Conseil des prélèvements obligatoires écrit : « L’OCDE sur la base d’études empiriques juge que les CIR ont un impact faible sur le niveau des dépenses de recherche et de développement et la productivité globale des facteurs ». Il précise également : « Alors qu’entre 2002 et 2006 le montant du crédit impôt recherche a doublé en France, […] la part du financement privé de la recherche et du développement dans le PIB a fortement baissé en France – 54, 2% en 2002 contre 52, 22% en 2006 – alors même que cette part est déjà inférieure de 10 points, en France, à la moyenne des pays de 1’OCDE. »
Ainsi l’effort de l’État pour augmenter les dépenses de recherche et de développement en France - soit plus deux points de financements publics supplémentaires dans la dépense totale de la recherche et du développement entre 2002 et 2006 - ne parvient-il pas à contrebalancer la diminution de ces dépenses, alors qu’en moyenne, dans les pays de l’OCDE, ces dernières augmentent.
Se pose alors pleinement la question de la pertinence d’un dispositif qui, d’année en année, voit son coût augmenter. Faut-il rappeler que, en tenant compte du plan de relance, le crédit d’impôt recherche progressera, en 2010, de 1, 53 milliard d’euros ?
Au regard des divers rapports et études qui ont été publiés, il apparaît de manière évidente que le crédit d’impôt recherche est utilisé par les grandes entreprises comme un outil d’optimisation fiscale. D’ailleurs, nombre d’entre elles ont supprimé des postes de chercheurs au cours de l’année 2009 et continuent pourtant à toucher leur part du crédit d’impôt recherche.
Je voterai l’amendement de M. Foucaud. Le crédit d’impôt recherche représente un cadeau de 4 milliards d’euros aux entreprises et son efficacité n’est pas prouvée.
Monsieur Fourcade, vous affirmez que ce dispositif a produit des effets positifs dans votre département ; or aucune étude précise ne démontre en quoi ce cadeau aux entreprises a bénéficié à la collectivité nationale.
Je retire mon amendement, puisque le dispositif sera prorogé en 2010.
Je voudrais revenir sur les propos qu’ont tenus notre collègue Jean-Pierre Fourcade et M. le président de la commission.
J’ai suivi attentivement le dossier Microsoft, puisque cette entreprise compte plusieurs sites dans Paris intra-muros. Cette société voulait développer à l’échelle mondiale, d’une part, son centre de recherche, d’autre part, ses activités commerciales. Or Paris était en compétition avec des villes allemandes ou avec Londres. Sachez, monsieur le président de la commission, que c’est grâce au crédit d’impôt recherche que Microsoft, au terme de deux ans de compétition au niveau européen, a finalement décidé d’implanter ces différentes activités sur le territoire français, et non au Royaume-Uni ou en Allemagne. Grâce à cet avantage fiscal, 1 700 emplois ont été créés non dans le secteur de la production, mais dans le secteur commercial.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 4 est adopté.
L'amendement n° I-300, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 2 bis de l'article 38 du code général des impôts, il est inséré un 2 ter ainsi rédigé :
« 2 ter. Pour l'application du 1 et du 2 de cet article, les charges d'intérêts liées à l'émission d'emprunts par une société sont admises, en déduction pour le calcul du bénéfice net, à condition que le rapport entre les capitaux propres et la dette financière ne soit pas inférieur à 66 %.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Chacun sait que la pratique du leveraged buy-out, le LBO, permet de racheter une entreprise, souvent beaucoup plus importante que celle qui sert de base à l’opération, sans moyens correspondants, d’où le recours à l’emprunt.
Généralement, ce type de rachat n’est pas motivé par un projet industriel, mais, plus souvent, par le seul projet financier qui consiste à rémunérer les investisseurs au taux le plus fort, le plus vite possible, afin de dégager une forte rentabilité à très court terme.
Ce type de financement a largement contribué à détruire le tissu industriel de notre pays. Nous avions dénoncé le caractère périlleux de ces opérations dès avant la crise, et, depuis que celle-ci a éclaté, nous nous sentons moins solitaires dans cette dénonciation.
Depuis l’éclatement de la crise, le LBO a eu pour effet d’entraîner de nombreuses sociétés dans des situations de surendettement, souvent insupportables.
Si les premiers bénéficiaires de ces opérations sont les fonds d’investissement, les banques n’oublient pas de se faire généreusement rétribuer, au détriment de leurs activités, plus restreintes, de financement de l’économie réelle.
Selon l’assureur crédit COFACE, sur les 1 600 entreprises en LBO en France, 900 d’entre elles sont en zone de surveillance et plusieurs en zone d’alerte. Certes, les LBO ne sont pas, en soi, à l’origine des difficultés des entreprises, mais ils en constituent bel et bien un facteur aggravant.
Les banques ont octroyé des crédits allant jusqu’à 70 % à 80 % de la valeur de la société cible. L’entreprise rachetée par un fonds est censée rembourser la dette grâce au résultat qu’elle génère ; mais, avec le ralentissement de l’économie, cette dette devient insupportable.
Notre amendement vise donc à décourager les opérations de LBO les plus risquées, en supprimant l’avantage fiscal dû à la déductibilité des intérêts d’emprunts lorsque le rapport entre les capitaux propres et la dette financière est inférieur à 66 %.
Tout le monde constate les dégâts causés par cette pratique. Notre amendement est raisonnable, car il ne vise pas à supprimer le LBO, mais à le limiter dans sa partie la plus risquée, dont la nocivité n’est plus à démontrer.
Mme Bricq soulève un sujet intéressant, mais la commission ne pense pas que la solution qu’elle préconise soit vraiment opérationnelle.
Si l’on traduit autrement l’idée qui sous-tend cet amendement, il faudrait considérer que, pour une dette d’un montant de 66, on devrait disposer au bilan de capitaux propres d’un montant de 33.
Vous avez raison.
Poser que le rapport entre les capitaux propres et la dette financière ne doive pas être inférieur à 66 % ne me paraît pas très clair.
Si je comprends bien, pour un montant total de 100 de capitaux propres et de dettes inscrits au passif d’un bilan, votre amendement vise à imposer un ratio de 60 en dettes et de 40 en capitaux propres.
Cette norme de portée générale conviendrait-elle à tous les secteurs d’activité ? Je n’en suis pas certain. Surtout, d’où proviendront les 40 de capitaux propres ? L’adoption de votre amendement, me semble-t-il, n’empêcherait aucunement que ces capitaux propres soient, entièrement ou partiellement, apportés par une holding, qui elle-même peut s’endetter pour être en mesure de souscrire au capital d’une autre entreprise.
Madame Bricq, le dispositif que vous nous proposez d’adopter est à la fois trop global et trop rigide et n’est pas verrouillé. Aussi, la commission ne peut l’accepter en l’état.
Toutefois, nous devons continuer à étudier la question de l’avantage fiscal dont bénéficient les LBO. Faut-il être complètement malthusien en la matière ? Je ne le crois pas. Faut-il restreindre les avantages fiscaux dont bénéficient les opérations les plus risquées ?
Pour ma part, je le crois et, à cet égard, j’écouterai avec attention l’analyse de M. le ministre.
En tout état de cause, la commission ne peut qu’émettre un avis défavorable sur cet amendement.
Il est évidemment fort utile de soulever la question des LBO, et d’ailleurs elle l’a déjà été dans le passé.
D’une part, un dispositif dit « anti sous-capitalisation » est entré en vigueur le 1er janvier 2008, qui limite la déductibilité des charges financières supportées par les entreprises sous-capitalisées. Néanmoins, je reconnais que ce mécanisme est compliqué et qu’il devra probablement être évalué.
D’autre part, le dispositif dit « amendement Charasse », aménagé en 2005 et en 2006, qui est un bon dispositif, limite aussi cette déductibilité en cas d’achat de titres à soi-même et dans certaines conditions.
M. le rapporteur général ayant très bien expliqué que cet amendement vise à imposer un ratio entre les capitaux propres et la dette financière, je n’y reviendrai pas. Toutefois, force est de constater qu’il soulève un certain nombre de difficultés, notamment parce que ses auteurs ont prévu qu’il soit applicable à tout type d’entreprise. Or les entreprises ont une structure financière très différente selon les secteurs auxquels elles appartiennent ; elles sont plus ou moins endettées et disposent de plus ou moins de capitaux propres.
Le LBO n’est pas contestable en tant que tel et il faut continuer à le développer. Ce qui l’est, c’est l’utilisation abusive qu’en font certains. D’ailleurs, c’est souvent les abus de droit ou les abus d’un mécanisme qui sont condamnables.
Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, tout en reconnaissant que la question soulevée par Mme Bricq mérite réflexion.
Mme Bricq soulève un vrai problème, car c’est un fait que, compte tenu des taux d’intérêt historiquement faibles, il a été abusivement fait recours aux LBO et que les entreprises, souhaitant bénéficier au maximum de l’effet de levier qu’ils procurent, se sont endettées au-delà du raisonnable.
Afin de maîtriser cet emballement, monsieur le ministre, il conviendrait sans doute de revoir le régime fiscal du carried interest, car, bien souvent, ces opérations ont été réalisées par des filiales ou des sous-filiales de banque dans des conditions assez contestables.
Vous vous souvenez du régime fiscal introduit par la circulaire ministérielle du 28 mars 2002, que nous nous sommes efforcés de corriger voilà un an, avec votre concours bienveillant, monsieur le ministre. Depuis lors, votre collègue Christine Lagarde, ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi, a publié un décret qui, si perfectible soit-il, devrait calmer le jeu. Il faut être conscient que, dans ces opérations de LBO, interviennent des acteurs très déterminés, à savoir les gérants des fonds.
Aussi, nous devons être très vigilants à l’égard de ce type de mécanisme.
Personne ne conteste la nocivité de ce mécanisme qui, utilisé de manière excessive et dans un laps de temps très court, conduit au surendettement des entreprises.
M. le rapporteur général et M. le président de la commission reprochent à notre amendement d’être d’une portée trop générale. J’accepte cet argument, mais il devrait nous inciter à approfondir notre réflexion. C’est précisément l’intérêt du débat budgétaire.
Monsieur le président de la commission, puisque vous vous êtes beaucoup mobilisé sur cette question, ne pensez-vous pas qu’il conviendrait de bien mesurer les effets du décret du 16 octobre 2009 relatif au carried interest, d’examiner dans quel secteur cette pratique s’est révélée la plus nocive et d’envisager des solutions ?
Ce travail d’évaluation relève précisément de la commission des finances. Dans la mesure où le ministère du budget dispose évidemment de moyens d’investigation bien supérieurs à ceux dont disposent non seulement l’opposition, mais encore la commission des finances, il lui appartient de nous communiquer les chiffres et l’état qualitatif de ces pratiques.
Madame Bricq, je vous invite à retirer votre amendement.
Le décret de Mme Lagarde me semble bien inspiré, notamment par les acteurs du carried interest…
Sourires
J’ai moi-même déposé un amendement, qui sera discuté ultérieurement, visant à mieux distinguer entre les opérations qui concernent les jeunes entreprises innovantes en phase de démarrage, dont il faut encourager le développement, avec tous les risques qu’il comporte – c’est au moins aussi important que le crédit d’impôt recherche –, et le LBO strictement financier, ou private equity, pratique qui doit manifestement être encadrée de manière beaucoup plus rigoureuse.
Madame Bricq, sachez que Mme Lagarde est tout à fait disposée à travailler sur ce sujet du rapport entre capital et poids de la dette.
Il s’agit de se montrer pragmatiques, sans diaboliser aucun système. Nous savons que la sous-capitalisation est un des handicaps des entreprises françaises. L’essentiel est que les entreprises puissent fonctionner. Le LBO ne devient une mauvaise chose que s’il y est recouru dans une mesure excessive ou en cas d’abus de droit.
En tout état de cause, le Gouvernement est favorable à ce que l’on approfondisse la réflexion sur le rapport entre capitaux propres et dette.
Si le ratio de 66 % prévu dans notre amendement pose problème, nous ne serions pas opposés à ce que la commission modifie notre rédaction pour clarifier les choses et bien faire apparaître que si la dette est de 60, les capitaux propres devront être de 40 au moins.
Ce dispositif est trop complexe pour qu’il soit envisageable de le modifier dans l’instant !
Cela étant, il semble qu’un tel ajustement ne suffirait pas à modifier l’avis de la commission ni celui du Gouvernement ! Néanmoins, pour des raisons de principe, il nous paraît important de maintenir l’amendement, car l’effet de levier, qui a engendré des profits importants pour un certain nombre d’opérateurs, peut aussi jouer dans un sens négatif et contribuer alors à une désagrégation totale du système. Il nous semble donc important d’établir des garde-fous contre la spéculation dérégulée, car les LBO présentent un risque considérable pour l’avenir.
Pour ma part, je souhaite vraiment que cet amendement soit rejeté. Certes, la préoccupation exprimée par ses auteurs est parfaitement légitime et nous condamnons nous aussi les très nombreux excès qui ont été commis, mais il faut tenir compte de l’extrême diversité des situations économiques.
Les opérations de LBO, qui permettent la cession d’entreprises, sont une nécessité absolue pour la vitalité du tissu économique. Ce qui est choquant, c’est que certains incitent les autres à prendre des risques sans vouloir en courir eux-mêmes aucun. Cependant, c’est un problème qui se pose pour l’ensemble de l’économie : les conseilleurs ne sont pas toujours les payeurs.
Cet adage vaut notamment en matière de LBO, où il arrive que les acheteurs soient incités à s’endetter dans une mesure excessive. Néanmoins, on a le droit d’être intelligent, y compris dans une économie de marché ! Si l’on anticipe des résultats irréalistes, on en supporte les conséquences, conformément à l’esprit d’une économie libérale. Ce qui est anormal, c’est que la puissance publique vienne pallier les conséquences de défaillances de raisonnement souvent dues à une cupidité extrême ou à un suivisme aveugle.
En tout état de cause, l’amendement en question ne permettra pas de remédier à de tels comportements. C’est la raison pour laquelle je conseille à mon groupe de ne pas le voter.
M. Alain Gournac applaudit.
Comme l’a indiqué M. Marc, nous maintenons cet amendement. J’ajoute que nous serons très attentifs à celui qui sera présenté par M. Arthuis. L’important est non pas de détruire un dispositif, mais de faire progresser la réflexion.
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.
Qu’il n’y ait pas d’ambiguïté : nous allons continuer de travailler sur ce sujet très complexe, mais la commission des finances ne présentera pas d’amendement dans le cadre de l’examen du présent projet de loi de finances. Nous ne sommes pas encore en mesure de le faire.
Dans l’immédiat, ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain : recourir au levier de l’emprunt se révèle parfaitement utile et légitime dans nombre de situations économiques. Nous allons poursuivre la réflexion avec l’administration et les professionnels afin de pouvoir proposer, le moment venu, un dispositif équilibré et raisonnable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° I-303, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 206 du code général des impôts, il est inséré un article 206 bis ainsi rédigé :
« Art. 206 bis. - Il est établi une taxe additionnelle à l'impôt sur les sociétés pour l'année 2010. Son taux est fixé à 10 %. Sont redevables de cette taxe les établissements de crédit agréés par le Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement. ».
La parole est à M. François Marc.
Cet amendement vise à instituer, pour la seule année 2010, une taxe additionnelle à l’impôt sur les sociétés, qui pèserait sur les établissements de crédit.
En effet, l’État ayant joué le rôle d’assureur de dernier ressort au cours de la crise bancaire de l’automne 2008, il est normal qu’il reçoive la contrepartie de cette couverture exceptionnelle apportée dans l’intérêt général.
L’État est intervenu pour soutenir les établissements bancaires et financiers à concurrence de 75 milliards d’euros de titres de dette émis par la Société de financement de l’économie française afin de prêter aux banques. Il s’agissait de pallier le manque de liquidités dû à la crise de confiance interbancaire que nous avons connue.
Par ailleurs, des opérations de renforcement de fonds propres à hauteur de 20 milliards d’euros ont été financées par le biais de la Société de prises de participation de l’État.
C’est ce soutien qui a permis aux banques de réaliser des bénéfices au titre de l’année 2009. Or, si les banques ne sont pas directement à l’origine de la crise financière, elles ont allègrement pris part à un système qui a favorisé, et qui favorise encore, la prise de risques excessifs. Elles n’ont pas totalement évité les actifs toxiques et les contribuables ont payé – et payent encore – au prix fort les conséquences de leurs pratiques aventureuses. La crise financière a provoqué une crise économique sans précédent, dont le coût est particulièrement élevé : 500 000 chômeurs supplémentaires en un an, un déficit public représentant 8, 7 % du PIB, une dette publique atteignant 84 % du PIB en 2010 !
Les clauses contractuelles négociées à l’occasion de la souscription d’actions de préférence ont laissé à la seule initiative des emprunteurs le remboursement des prêts de l’État, en privant celui-ci de toute rémunération automatique –contrairement à ce qui se passe pour les titres subordonnés –, le versement d’une rémunération à l’État dépendant en effet de la décision des banques d’en accorder une, ou pas, à leurs actionnaires ordinaires.
Les banques ont donc, de ce fait, rétabli rapidement leur situation et font de nouveau d’importants bénéfices : la presse financière s’en est largement fait l’écho ces derniers jours. Elles disposent en effet d’une garantie totale d’intervention des pouvoirs publics et n’encourent par conséquent aucun risque de faillite : c’est l’assurance tous risques ! En outre, elles ont relevé leurs marges sur les crédits qu’elles accordent. Enfin, elles considèrent que les marchés sont revenus à une situation « normale » et qu’elles peuvent de nouveau avoir recours à certains mécanismes bien connus…
Notre proposition d’instituer une taxe additionnelle à l’impôt sur les sociétés qui pèserait sur les établissements de crédit apparaît donc parfaitement raisonnable. Si nous avons prévu pour l’heure qu’elle devrait rester exceptionnelle et ne porter que sur l’exercice 2010, c’est pour ménager l’avenir, par définition incertain, de la situation financière des banques.
Cette taxe doit avoir le caractère d’une participation de l’État et, partant, du contribuable aux bénéfices retrouvés des établissements bancaires et financiers.
La commission n’est pas favorable à cet amendement, essentiellement parce que si l’on pénalise les banques en exerçant une pression sur leurs fonds propres, on réduira le volume des crédits qu’elles consentiront. Cela aura un effet malthusien sur l’économie, ce qui me semble contraire à l’objectif que vous visez, mes chers collègues.
L’intérêt de notre économie est que nos banques aient une structure financière saine et prospère.
Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
L’amendement n° I-303 vise à instituer, pour la seule année 2010, une taxe qui rapporterait entre 500 millions et 600 millions d’euros. Nous proposons, pour notre part, la création d’une taxe pérenne pour financer la nouvelle autorité de régulation des marchés. Son produit s’établira entre 100 millions et 150 millions d’euros par an.
On ne peut opposer la contribution des banques au financement de la nouvelle autorité de régulation des marchés à la contrepartie que nous proposons d’instituer à l’aide qu’elles ont reçue de l’État, donc des contribuables. Ce n’est pas une question de montant, c’est une question de principe.
Je considère qu’il est de notre mission de parlementaires d’envoyer un signal clair à tous ceux, entreprises ou particuliers, qui éprouvent des difficultés à obtenir un crédit, alors que les banques ont bénéficié d’une aide de grande ampleur de l’État. Voilà pour le passé ; nous évoquerons l’avenir par le biais d’un amendement ultérieur.
Nous devons également adresser un message aux banques, qui ont pu bénéficier de liquidités abondantes grâce à l’action de la Banque centrale européenne, liquidités dont elles se sont servies pour reconstituer leurs marges. Une bulle pourrait en chasser une autre, alors même que l’emballement de la dette publique risque de provoquer une remontée des taux, donc une pression sur le crédit.
Si les banques doivent bien entendu contribuer au financement de la nouvelle autorité prudentielle, elles doivent aussi être conscientes du fait que le Parlement ne saurait laisser se reproduire des épisodes similaires à ceux que nous avons connus dans la période récente.
Je suis en désaccord avec M. le rapporteur général de la commission des finances. Alors que c’est la puissance publique qui a consolidé et sécurisé le système bancaire, à qui vont les profits dégagés grâce à cette action, sinon aux actionnaires dans une très large mesure ?
Des fonds publics ont servi à soutenir des entreprises privées, mais lorsque ces dernières renouent avec les profits, l’État n’en bénéficie pas de façon automatique, car les actionnaires sont servis avant lui. Nous ne pouvons être favorables à un système où, alors que la puissance publique, c’est-à-dire le contribuable, apporte une garantie tous risques, ce sont les actionnaires qui bénéficient du retour des profits.
Cet amendement a une dimension symbolique. Alors que l’on a beaucoup parlé d’éthique ces derniers temps, il vise précisément à restaurer la crédibilité du système financier.
M. Jean Desessard applaudit.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° I-301, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 209 du code général des impôts est complété par un IX ainsi rédigé :
« IX. Le montant de l'imposition due par l'entreprise au titre de la contribution économique territoriale visée à l'article 1447-0 du présent code n'est pas déductible des bases retenues pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés ou de l'impôt sur le revenu. »
La parole est à M. François Marc.
Cet amendement est étroitement lié aux dispositions relatives à la taxe professionnelle que nous avons examinées vendredi et samedi derniers. En effet, il vise à rendre non déductible, au titre de l’impôt sur les sociétés, la contribution économique territoriale qui sera désormais versée par les entreprises. Nous n’étions pas, pour notre part, favorables à ce dispositif, mais dès lors qu’il est inscrit dans le projet de loi de finances, nous essayons d’y apporter les ajustements qui nous paraissent indispensables.
Alors que le déficit public dépasse 8, 5 % du PIB et que la dette publique avoisine les 90 % de ce dernier, il serait à nos yeux totalement irresponsable de proposer une réforme non financée, dont le coût sera proche de 5 milliards d’euros en régime de croisière. Un tel choix conduirait inévitablement à une hausse de la charge fiscale des ménages.
Nous proposons de prévoir au contraire une forme d’autofinancement d’une partie du coût de la réforme, consistant à rendre non déductible de l’impôt sur les sociétés la contribution économique territoriale. Cela permettrait de limiter à quelque 1, 5 milliard d’euros le coût de la suppression de la taxe professionnelle et présenterait également l’avantage de faire reposer, pour l’essentiel, le financement sur les entreprises qui réalisent des bénéfices. Ainsi, les finances des entreprises en difficulté ne seraient pas obérées. Cette logique nous paraît tout à fait défendable.
La commission considère que cet amendement n’est pas acceptable.
En effet, un principe général de notre droit fiscal veut que soient déductibles l’ensemble des charges qui se rapportent à l’exploitation de l’entreprise. Le nouvel impôt local, comme la taxe professionnelle, relève bien de cette catégorie. Il n’est pas possible de charcuter les charges à sa convenance pour aboutir à un système fiscal qui deviendrait incompréhensible.
Monsieur le rapporteur général, vous nous accusez de vouloir charcuter les charges des entreprises, mais je vous rétorquerai que nous avons assisté, trois jours durant, au désossage des collectivités locales, pour employer un autre terme de boucherie.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-187, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa du I de l'article 219 du code général des impôts est complété par les mots : « et à 46 % sur les dividendes versés aux actionnaires ».
La parole est à M. Thierry Foucaud.
La France, on le sait, est un pays de bas salaires. Des études ont été menées à ce sujet, notamment par le Centre d’études des revenus et des coûts, le CERC, en 2002. Cet organisme a mis en évidence que la moitié des salariés du secteur privé gagnaient moins de 1 220 euros nets par mois – 1 360 euros pour les hommes et 1 054 euros pour les femmes –, que plus d’un tiers d’entre eux gagnaient moins que le SMIC et que plus de la moitié se trouvaient sous le seuil fatidique de 1, 6 SMIC, en deçà duquel les employeurs ont droit à des allégements de cotisations. De là à dire que les employeurs maintiennent les salaires au plus bas pour bénéficier d’exonérations, il n’y a qu’un pas, que nous franchissons d’ailleurs… N’est-ce pas pour cette raison que la Cour des comptes définit les mécanismes d’exonération de cotisations sociales comme étant de véritables trappes à bas salaires ?
Notre pays n’est donc pas, soulignons-le pour tordre une fois encore le cou à certaines idées reçues, celui où le travail coûte le plus cher. Selon Eurostat, le coût du travail dans l’industrie était, en 2005, inférieur en France de 4 % par rapport au Royaume-Uni et de 2 % par rapport à la Belgique, et un peu plus élevé qu’aux Pays-Bas ou en Allemagne, à hauteur respectivement de 2 % et de 4 %.
La part des salaires dans la valeur ajoutée est en diminution. Ainsi, avant la récession de 1974-1975, elle était supérieure de cinq points à ce qu’elle est aujourd’hui, et l’écart atteint dix points par rapport au pic de 1982.
Il est, en revanche, une part de la valeur ajoutée qui ne cesse de croître : celle des dividendes.
Ils en représentent aujourd’hui environ 25 %, contre 5 % seulement en 1985. Cette explosion des dividendes est assise sur la faiblesse des salaires, mais les salariés sont en réalité deux fois perdants, puisqu’ils sont aussi victimes des politiques de délocalisation de l’emploi. Plus les dividendes versés aux actionnaires croissent, plus le réinvestissement, notamment dans les nouvelles technologies ou la réorientation industrielle, diminue. En effet, l’effort d’investissement ne représente plus aujourd’hui que 19 % de la valeur ajoutée, contre près de 24 % dans les années soixante.
Pour notre part, nous sommes convaincus que, plutôt que de geler les salaires, l’heure est venue de geler les dividendes à leur niveau actuel et de les transférer à un fonds de mutualisation destiné à d’autres usages, qui serait placé sous le contrôle des salariés.
Notre amendement, dont l’objet se limite à porter le taux d’imposition des dividendes à 46 %, s’inscrit dans cette logique de valorisation de l’emploi face à la spéculation. Si vous refusez, pour des raisons qui n’échappent à personne, d’augmenter les salaires et de reconnaître réellement le travail, alors vous devez taxer les dividendes en conséquence, c’est-à-dire davantage que le travail, afin d’inciter les entreprises à repenser leurs politiques salariale et d’investissement. Les millions versés aux actionnaires sont précisément des millions qui échappent à l’investissement, c’est-à-dire à l’entreprise, donc au maintien de l’emploi qualifié et adapté aux exigences nouvelles. (
L'amendement n° I-302, présenté par M. Rebsamen, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le troisième alinéa de l'article 219 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ... Le taux fixé au présent article est fixé à 31 % pour la fraction du bénéfice imposable mise en réserve ou incorporée au capital au sens de l'article 109, à l'exclusion des sommes visées au 6° de l'article 112. Il est fixé à 49 % pour la fraction du bénéfice imposable distribuée. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. François Marc.
Cet amendement a pour objet de moduler les taux de l’impôt sur les sociétés en fonction de l’affectation du bénéfice réalisé.
La référence à des concepts bien ancrés dans le code général des impôts, depuis 1979, rend ces dispositions aisément applicables. Une telle distinction entre bénéfices réinvestis et bénéfices distribués est, au demeurant, pratiquée par certains de nos voisins de l’Union européenne.
Il s’agit d’un outil pertinent de politique fiscale pour orienter les choix des entreprises dans un sens plus favorable à l’économie productive et pour favoriser la redistribution des bénéfices sous forme non pas de dividendes aux actionnaires, mais d’investissements dans l’activité, donc au bénéfice des salariés et, partant, des consommateurs.
Il s’agit en fait de privilégier les entreprises qui participent à la relance et à la défense du pouvoir d’achat par rapport à celles qui, par leur politique d’optimisation des profits au bénéfice des actionnaires, ne contribuent pas à réduire le marasme économique actuel.
L’économie française connaît un problème récurrent de sous-capitalisation de ses PME, qui bride leur développement, mais la « distribution de capitaux » n’est pas forcément le moyen le plus efficace pour y remédier : si une telle stratégie – je pense notamment aux interventions d’OSEO et aux différentes actions menées en faveur du renforcement des fonds propres des PME – a permis de faire de la France le quatrième marché mondial pour les capitaux investis et les fonds empruntés, ainsi que le deuxième marché européen pour les LBO, elle n’a pas été suffisante pour entraîner une augmentation des fonds propres des sociétés productives nouvelles. Ce sont les cessions et les successions d’entreprise, plus que la création et le développement d’activités, qui ont bénéficié de cet afflux de capital-investissement. Une incitation fiscale au réinvestissement des bénéfices est peut-être une voie meilleure, moins spectaculaire, certes, mais plus régulière et plus constante.
Il faut donc modifier le système fiscal, car il incite les entreprises à la sous-capitalisation, les entrepreneurs ayant intérêt à ne pas réinvestir les bénéfices et à s’endetter afin de réduire l’assiette de leur impôt sur les sociétés. La redéfinition de l’impôt sur les sociétés doit être le moyen privilégié de répondre au manque de fonds propres.
C’est la raison pour laquelle nous proposons, avec cet amendement, une modalité de réforme. Il est tout à fait souhaitable de réorienter le système fiscal, en réduisant l’impôt sur les sociétés pour les bénéfices réinvestis. Ce serait un bon moyen de réduire le coût de constitution de fonds propres et d’éviter les effets pervers induits par l’ouverture d’un guichet de distribution de capitaux.
Il conviendrait également que le renforcement des fonds propres soit endogène, car ce sont les chefs d’entreprise qui sont le plus à même de décider du montant à affecter pour consolider leur entreprise et du moment opportun pour procéder à une telle opération.
En conclusion, je rappellerai que, depuis quelques années, la part des bénéfices redistribués aux actionnaires est en forte croissance. Il faut donner aujourd’hui une incitation forte pour que ces capitaux soient réinvestis dans l’entreprise et permettent une relance efficace, avec des créations d’emplois. §
La commission est évidemment tout à fait hostile à cette disposition, qui figurait d’ailleurs déjà dans la proposition de loi du groupe socialiste fort bien rapportée par M. Arthuis voilà quelques mois et dont M. Rebsamen était le premier signataire.
Mis à part l’Estonie, seul pays de l’Union européenne à différencier, en matière d’imposition des bénéfices, les taux selon l’affectation du résultat, tous les pays de l’OCDE pratiquent un seul et même taux d’imposition des profits, qu’ils soient distribués ou réinvestis. L’Allemagne opérait autrefois une telle distinction, mais celle-ci a été abolie, madame Bricq, en 2000 ou en 2001, et je ne suis pas certain que ce n’ait pas été sur l’initiative d’un ministre social démocrate.
Il est même vraisemblable que les choses se sont passées ainsi ! En tout cas, le taux de l’impôt sur les sociétés en Allemagne, quelle que soit l’affectation du profit, est désormais de 25 %. La référence que vous utilisez est donc fausse, ou en tout cas obsolète depuis déjà de longues années.
Vous pouvez vérifier, ce sont des données législatives à la disposition de tous !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Différencier les taux d’imposition est une mauvaise idée sur le fond, car les actionnaires ont besoin d’être rémunérés, lorsque les résultats sont bons, pour participer à une heureuse évolution de l’entreprise, et, lorsque les résultats sont mauvais, pour être remerciés de rester au capital alors qu’ils devraient se retirer.
M. Jean Desessard s’exclame.
Votre vision des choses est totalement erronée ; elle reflète une méconnaissance complète de l’économie de marché. Par conséquent, la commission émet un avis très défavorable sur ces amendements.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
La disposition que vous préconisez, madame Bricq, a déjà été mise en œuvre, avant d’être supprimée au début de la décennie parce que trop complexe. Il faut notamment vérifier que les fonds mis en réserve ne sont pas affectés par la suite. En ce qui concerne le capital, il faut certes privilégier son renforcement, mais, d’un autre côté, les entreprises n’ont pas forcément besoin d’augmenter leurs fonds propres. Il peut alors être souhaitable de distribuer des dividendes aux actionnaires, afin qu’ils les réinvestissent dans d’autres entreprises.
Du reste, l’investissement dans les entreprises est déjà assorti d’avantages. Par exemple, le crédit d’impôt recherche est une forme de défiscalisation qui vise à inciter l’entreprise à investir plutôt qu’à distribuer ses bénéfices.
La parole est à Mme Michèle André, pour explication de vote sur l’amendement n° I-187.
Cet amendement vise en fait à moduler le taux de l’impôt sur les sociétés en fonction de l’affection du bénéfice réalisé.
En mai dernier, M. de Montesquiou évoquait, en présentant sa proposition de loi, deux solutions pour obtenir de la part des grands groupes français des contributions significatives : l’une, contraignante, résidait dans l’établissement d’une contribution additionnelle exceptionnelle – nous en discuterons en examinant un amendement à venir ; l’autre, plus partenariale, consistait en une incitation fiscale – tel est l’objet du présent amendement.
La création d’un tel système de « bonus-malus » a déjà été envisagée au Sénat, par voie d’amendement, lors de la discussion du deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2009. Vous aviez alors relevé, monsieur le ministre, qu’un tel débat méritait d’être approfondi – vous venez de le redire –et vous vous étiez engagé à interroger le Trésor public et la direction de la législation fiscale pour bénéficier de leur expertise, en précisant que nous pourrions peut-être en reparler lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2010. Aujourd’hui, nous y sommes : où en êtes-vous, monsieur le ministre ?
Il est impératif de donner des marques de justice aux citoyens, aux consommateurs, aux ménages, aux contribuables, aux PME. En effet, nos compatriotes subissent lourdement les conséquences de la crise, que ce soit la hausse des prix ou le chômage, quand ce n’est pas les deux, alors qu’ils assistent, parallèlement, à la distribution de parachutes dorés, de retraites chapeau, de dividendes mirifiques. Pourquoi devraient-ils subir une double peine tout en étant régulièrement nargués par l’annonce de dividendes et autres super-revenus qui se chiffrent en millions d’euros ?
Certaines entreprises persistent dans une logique très peu vertueuse en temps de crise, poursuivant leur politique de maximisation du retour aux actionnaires, jumelée à une politique des prix que supportent seuls les consommateurs, que ce soit les ménages ou les PME.
Les stratégies d’optimisation fiscale développées par les grandes firmes et leurs armadas d’experts financiers font feu de tout bois, plus encore en France que dans des pays comme l’Espagne ou le Royaume-Uni. Les pratiques d’optimisation fiscale sont favorisées par la complexité de notre système fiscal et social, en particulier par la multiplication des régimes et dispositions dérogatoires. Le Conseil des impôts relevait, dans son rapport de 2007, les difficultés méthodologiques auxquelles étaient confrontés les États pour les évaluer. En France, ces difficultés demeurent, car notre pays a accumulé, en matière d’évaluation, des retards qu’elle n’a pas résorbés. Aux États-Unis, le seul tax gap, c’est-à-dire l’insuffisance des rentrées fiscales par rapport à la situation normale où tous les contribuables respecteraient pleinement la législation, a été chiffré sur dix ans à 210 milliards de dollars.
Monsieur le ministre, vous avez annoncé une réforme destinée à améliorer le rendement de l’impôt sur les sociétés. Il s’agissait de lutter contre les ingénieux montages fiscaux que les juristes de la direction générale des impôts qualifient d’abus de droit et qui consistent à exploiter toutes les finesses des procédures légales pour réduire l’addition payée par l’entreprise, contribution pourtant juste et nécessaire.
Osons enfin mettre en œuvre un dispositif vertueux qui incite les entreprises à réinvestir une fraction importante de leur bénéfice imposable ! Je ne peux manquer de rappeler, à cet instant, les propos suivants, tenus par le Président de la République lui-même : « Il faut que chacun comprenne que si l’on demande aux salariés de porter une partie du fardeau dans la crise, il est normal que les mêmes salariés bénéficient du fruit de leur travail quand cela va bien. »
Or on a constaté que, souvent, l’explosion des profits financiers s’est faite au détriment de l’investissement dans le capital productif et s’est accompagnée d’une croissance exponentielle des plus hautes rémunérations.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Je ne paraphraserai pas l’excellente argumentation de Michèle André, mais je voudrais revenir sur des propos tenus tout à l’heure par M. le rapporteur général, que je trouve tout à fait inappropriés, pour ne pas dire inadmissibles.
Selon lui, il y aurait ceux qui comprennent l’économie de marché et les autres.
Mes chers collègues, nous avions déjà entendu ce genre de discours avant le déclenchement de la crise économique, notamment, depuis 2003, à l’occasion de différents débats sur les marchés financiers et la nécessaire régulation de la sphère économique. Chaque fois que nous avons argumenté en faveur d’une amélioration de celle-ci, on nous a opposé notre incompréhension supposée de l’économie de marché : tous ces mécanismes financiers, tous ces dispositifs spéculatifs étaient nécessaires, car c’était grâce à eux que l’on allait pouvoir créer de la richesse… Et puis est survenue cette crise terrible, qui illustre à quel point nos propos étaient fondés quand nous réclamions, alors qu’il était encore temps, une anticipation suffisante et la mise en place de garde-fous.
Aujourd’hui, nous constatons les dégâts. Devant cette situation, nous avons le sentiment qu’il existe deux catégories d’investisseurs : d’un côté, les entrepreneurs, de l’autre, les spéculateurs, je dirais même les prédateurs. Les premiers sont prêts à réinvestir les bénéfices dans l’entreprise au lieu de percevoir des dividendes, dont la part dans la répartition des résultats est en très forte augmentation depuis plusieurs années. Il faut donc favoriser une économie d’entrepreneurs plutôt qu’une économie de spéculateurs et de prédateurs. L’argument essentiel qui motive cet amendement est bien le suivant : il s’agit de donner la primauté à l’esprit d’entreprise en faisant en sorte que l’argent reste au service de l’entreprise au lieu d’alimenter une spéculation toujours plus intense.
Je partage l’analyse de mes collègues, mais je crois que la question n’est même plus celle de l’économie de marché : nous sommes véritablement face à une politique de classe, qui donne tout aux uns et rien aux autres.
Pour répondre aux propos de M. le rapporteur général et de M. le ministre sur le versement de dividendes aux actionnaires, je me bornerai à citer l’exemple de Renault, dont les salariés ont été mis au chômage technique en début d’année, alors qu’il aurait suffi de garder dans l’entreprise 1 % des dividendes distribués aux actionnaires pour l’éviter ! Voilà qui est tout de même éloquent !
De surcroît, l’État a prêté de l’argent à Renault mais laisse maintenant cette entreprise établir des plans sociaux et détruire des milliers d’emplois. J’ai d’ailleurs rappelé, au cours de la discussion générale, que M. Ghosn a déclaré au mois d’avril dernier dans le Financial Times qu’il fallait profiter de la situation de crise pour dégraisser les entreprises… Bientôt, il en ira de même chez Peugeot.
Pour toutes ces raisons, il ne me paraît pas abusif d’affirmer que nous sommes véritablement face à une politique de classe, qui vise à tout donner aux uns et à tout retirer aux autres, politique qui a notamment conduit à supprimer la taxe professionnelle.
M. Thierry Foucaud. Mais nous savons bien que, jusqu’à la fin de l’examen de ce projet de loi de finances, nous entendrons les mêmes arguments de la part tant de la commission des finances que du Gouvernement.
M. Jean Desessard applaudit.
Mes chers collègues, cette discussion, tout à fait intéressante, se fonde sur des arguments que l’on retrouve dans le compte rendu des débats sur la proposition de loi de notre collègue M. Rebsamen. Le sujet est de première importance, mais il reste encore 240 amendements à examiner et nous progressons à un rythme de 7 amendements à l’heure. Dans ces conditions, il faudrait que nous changions de braquet pour avoir quelque chance de tenir le rendez-vous du vote sur la première partie du projet de loi de finances, fixé à mercredi soir…
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n’est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-203 rectifié bis, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l’article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les deuxième et troisième alinéas du a. du I de l’article 219 du code général des impôts sont supprimés.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
J’ai bien entendu l’exhortation du président de la commission des finances : je vais essayer de lui donner satisfaction pour ce qui concerne les temps de parole, mais pour ce qui est du fond, en revanche, je ne bougerai pas tant que le Gouvernement ne bougera pas !
Cet amendement a pour objet de revenir sur l’amendement, déposé par M. Marini, qui a permis à 6 200 entreprises de bénéficier d’une exonération quasiment totale de l’impôt sur les sociétés, et ce en pleine crise financière, c’est-à-dire précisément au moment où notre pays ne pouvait se priver d’aucune recette fiscale.
Cette mesure doit impérativement être abrogée, car ce n’est pas d’une explosion des dépenses dont souffre notre pays, mais d’un manque de financement, qu’il s’agisse des comptes de l’État ou des comptes sociaux.
L’amendement n° I-427 rectifié, présenté par MM. Collin, Mézard, Vall, Charasse et Tropeano, est ainsi libellé :
Après l’article 4, insérer un article additionnel rédigé comme suit :
Le I de l’article 219 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa du a. est supprimé.
2° Le a quinquies est ainsi rédigé :
« a quinquies Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2010, le montant net des plus-values à long terme afférentes à des titres de participation fait l’objet d’une imposition séparée au taux de 10 %.
« Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2011, une quote-part de frais et charges égale à 5 % du résultat net des plus-values de cession est prise en compte pour la détermination du résultat imposable.
« Les titres de participation mentionnés au premier alinéa sont les titres de participation revêtant ce caractère sur le plan comptable, les actions acquises en exécution d’une offre publique d’achat ou d’échange par l’entreprise qui en est l’initiatrice et les titres ouvrant droit au régime des sociétés mères si ces actions ou titres sont inscrits en comptabilité au compte titres de participation ou à une subdivision spéciale d’un autre compte du bilan correspondant à leur qualification comptable, à l’exception des titres des sociétés à prépondérance immobilière définis au troisième alinéa du a.
« La fraction des moins-values à long terme existant à l’ouverture du premier des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2010 afférente à des éléments exclus du bénéfice des taux définis au premier alinéa demeure imputable sur les plus-values à long terme imposées au taux visé au a, sous réserve de justifier la ou les cessions de ces éléments. Elle est majorée, le cas échéant, des provisions dotées au titre de ces mêmes éléments et non réintégrées à cette date, dans la limite des moins-values à long terme reportables à l’ouverture du premier des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2010.
« La fraction des moins-values à long terme existant à l’ouverture du premier des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2010, non imputable en vertu des dispositions du quatrième alinéa, peut être déduite des plus-values à long terme afférentes aux titres de participation définis au troisième alinéa imposables au titre des seuls exercices ouverts en 2010. Le solde de cette fraction et l’excédent éventuel des moins-values à long terme afférentes aux titres de participation définis au troisième alinéa constaté au titre des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2010 ne sont plus imputables ou reportables à partir des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2011. »
La parole est à M. Michel Charasse.
Il s’agit de limiter les effets de la disposition votée en 2004, sur proposition de la commission des finances, concernant le taux d’imposition à l’impôt sur les sociétés des plus-values à long terme.
Il est apparu en effet que les intentions manifestées au moment où cette disposition a été adoptée ont été tellement au-delà des espérances que la perte de recettes pour le Trésor public tournerait autour de 20 milliards d’euros, dans une situation de totale impécuniosité de l’État.
Ce résultat n’a manifestement pas été voulu par les auteurs de la disposition en cause, et le président du groupe du RDSE, mon ami Yvon Collin, a donc souhaité que nous proposions, à l’occasion de l’examen de ce projet de loi de finances, un aménagement du système pour en limiter quelque peu la portée pour les finances publiques.
L’amendement n° I-419 rectifié bis, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l’article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le a quinquies du I de l’article 219 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, après le mot : « participation » sont insérés les mots : « détenus depuis plus de cinq ans ».
2° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2011, une quote-part de frais et charges égale à 20 % du résultat net des plus-values de cession est prise en compte pour la détermination du résultat imposable. »
3° À la première phrase du dernier alinéa, le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « cinquième ».
4° Aux première et dernière phrases du dernier alinéa, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « quatrième ».
II. - Après le a quinquies du I du même article, il est inséré un a quinquies A ainsi rédigé :
« a quinquies A. Le montant net des plus-values à long terme mentionnées au a quinquies est soumis aux dispositions du deuxième alinéa du I lorsque celui-ci porte sur les titres d’une entreprise ou d’une entité juridique établie ou constituée hors de France et que cette entreprise ou entité juridique est soumise à un régime fiscal privilégié au sens de l’article 238 A, ou que cette entreprise ou entité juridique est établie ou constituée dans un État ou un territoire qui n’a pas conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales permettant l’accès aux renseignements bancaires. »
III. - Le I s’applique aux cessions réalisées à compter du 1er janvier 2011.
La parole est à M. François Marc.
Nous allons en parler, monsieur Charasse, car ce chiffre de 20 milliards d’euros est vraiment sujet à caution, c’est le moins que l’on puisse en dire !
L’objet du premier amendement est de supprimer le régime dont bénéficient les plus-values à long terme sur titres de participation et de revenir au régime antérieur à 2005, soit à un taux de taxation de 19 %. L’amendement qu’a défendu M. Charasse tend à fixer ce taux à 10 %, cependant que l’amendement n° I-419 rectifié bis présente un dispositif plus complexe mais de même esprit.
Je voudrais rappeler, mes chers collègues, pourquoi il est inopportun de revenir sur la réforme du régime fiscal des plus-values à long terme. Compte tenu de l’exploitation qui a été faite de ce sujet, en particulier, récemment, par le magazine Marianne, …
… je voudrais d’abord revenir sur les conditions dans lesquelles nous avons réalisé cette réforme à l’époque.
La mesure dont il s’agit avait été préconisée par le Conseil des impôts dans son rapport de 2004. Outre qu’elle facilitait la restructuration du capital des grands groupes, elle constituait avant tout – et avait d’ailleurs été présentée comme telle – une mesure d’alignement sur ce que faisaient déjà nos principaux partenaires européens : l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et la Suède. La France était isolée dans la compétition fiscale, et il fallait bien en tirer les conséquences.
Au demeurant, le Conseil des prélèvements obligatoires, qui a succédé au Conseil des impôts, a rappelé, en octobre 2009, dans son rapport intitulé Les prélèvements obligatoires des entreprises dans une économie globalisée, que ce régime d’exonération est aujourd’hui appliqué dans quelque vingt et un pays de l’OCDE sur vingt-neuf.
De plus, le régime français n’est clairement pas le plus favorable, puisqu’une quote-part de 5 % est imposée au taux normal de l’impôt sur les sociétés, soit un taux d’imposition effectif de 1, 67 % sur la plus-value. Il prévoit un niveau minimal de participation de 5 %, alors que l’Allemagne, la Belgique et l’Italie n’en imposent pas, ainsi qu’une condition de durée de détention de deux ans, plus contraignante que dans la plupart des autres pays, où elle est en général d’un an, l’Allemagne et la Belgique n’en prévoyant même aucune.
Le dispositif a été conçu par la commission des finances du Sénat en étroite concertation avec le gouvernement de l’époque avant d’être consacré, après plusieurs aller-retour, dans un collectif budgétaire. Je m’inscris donc en faux contre les assertions selon lesquelles il aurait été porté par un parlementaire pour le compte du Gouvernement : ce fut un travail conjoint, voulu comme tel ; tous les documents de l’époque en attestent.
Ce dispositif était assorti d’une période de transition entre 2005 et 2007 et d’une taxe libératoire exceptionnelle, ou exit tax, qui a rapporté environ 1, 5 milliard d’euros à l’État en 2006-2007. Je relève que les sommes exonérées représentent davantage un manque à gagner qu’une perte nette de recettes. §
D’ailleurs, la manière dont on a jeté en pâture le chiffre de 21 milliards d’euros à l’opinion publique est tout à fait critiquable, car il n’est pas du tout certain que toutes les transactions réellement constatées auraient eu lieu sous le régime fiscal antérieur ; l’assiette de l’imposition aurait très vraisemblablement été inférieure. Il est en effet très probable que si le régime antérieur d’imposition à 19 % avait perduré, les plus-values n’auraient été que partiellement réalisées et n’auraient donc pas engendré de recettes d’un tel montant.
Enfin, il faut bien avoir à l’esprit que revenir dès à présent au régime antérieur aboutirait, en fait, à créer un double avantage. En effet, sur les stocks de plus-values existantes, qui se reconstituent notamment du fait de la remontée des cours de bourse, viendraient s’imputer les moins-values – sur ce plan, un encadrement existe dans le régime actuel –, ce qui permettrait d’échapper en partie à l’impôt.
Le régime en question constitue non pas un cadeau accordé aux groupes financiers, mais bien la mise en œuvre d’une mesure de compétitivité rendue indispensable pour éviter que les sièges des holdings ne désertent encore davantage notre territoire.
En conséquence, la commission a émis un avis défavorable sur ces trois amendements.
Le Gouvernement a également émis un avis défavorable sur ces trois amendements, pour les raisons que M. le rapporteur général a très bien exposées.
Tout d’abord, les modalités du calcul qui permet à certains d’aboutir au chiffre de 20 milliards d’euros doivent être examinées. Le document sur l’évaluation des voies et moyens rédigé par le ministère en fait état. Ce calcul est fondé sur des conventions à mon sens hautement discutables : on applique à une base le taux de l’impôt sur les sociétés, soit 33 %, mais les plus-values à long terme sur cessions de titres de participation étaient taxées au taux de 8 %, ce qui réduit déjà considérablement l’ordre de grandeur.
Par ailleurs, quand on parle de haute fiabilité, c’est de l’assiette qu’il s’agit, et non des modalités de calcul. Peut-être devra-t-on d’ailleurs faire évoluer celles-ci, maintenant que vous avez attiré notre attention sur ce point.
En tout état de cause, pour en revenir aux 20 milliards d’euros – 12, 5 milliards d’euros en 2008 et 8 milliards d’euros en 2009 – qui ont été évoqués dans la presse, notamment dans le magazine Marianne, …
… je ne crois pas une seconde que l’État aurait encaissé, d’une façon ou d’une autre, une telle somme s’il avait maintenu le régime de taxation antérieur : d’une part, je le redis, le taux appliqué était de 8 %, et non de 33 % ; d’autre part, ainsi que l’a expliqué M. le rapporteur général, une bonne partie de l’assiette aurait probablement disparu, puisque dans tous les autres pays les plus-values à long terme de cessions de titres de participation sont exonérées. On peut toujours jouer à se faire peur… Le régime d’exonération est soumis à des conditions bien précises, en termes notamment de durée de détention des titres, souvent plus sévères que dans d’autres pays européens et qui excluent de son bénéfice les entreprises se livrant à des jeux de trésorerie ou de spéculation.
L’ancien Conseil des impôts avait fortement incité les gouvernements de l’époque à modifier le régime d’imposition des plus-values à long terme. La Cour des comptes a d’ailleurs indiqué que si le nouveau régime choisi par la France la plaçait parmi les pays compétitifs sur ce plan, il n’était cependant pas hors norme. À ma connaissance, seuls un ou deux pays ne l’ont pas adopté. Dans ce domaine, nous avons, à mon sens, fait ce que nous devions faire, en suivant les recommandations de la Cour des comptes. Le rapport remis en 2000 par le sénateur Charzat comportait la même préconisation, motivée par des considérations d’attractivité : les holdings, en particulier, sont extraordinairement mobiles, et peuvent se déplacer assez aisément d’un pays à un autre. Il s’agissait donc vraiment de défendre l’attractivité de la France.
(Mme Nicole Bricq s’exclame.) Si le régime d’imposition antérieur avait été maintenu, jamais l’État n’aurait perçu une telle somme !
Applaudissements sur certaines travées de l ’ UMP.
Mesdames, messieurs les sénateurs, si cette mesure fiscale coûtait 20 milliards d’euros, vous auriez devant vous un ministre du budget autrement plus énervé qu’il ne l’est ! Ces 20 milliards d’euros, c’est de la fausse monnaie ! §
Je ferai simplement observer que la France était dans l’obligation de se mettre à parité avec les autres États. Mais en l’absence d’imposition sur ces plus-values, on peut imaginer que certains groupes pourraient être tentés, dans un climat d’exubérance irrationnelle, de surévaluer les titres qu’ils détiennent. Tout cela est sans doute regrettable, mais un peu d’harmonisation européenne serait souhaitable.
J’ai oublié de préciser que, dans le régime actuel, il n’y a pas non plus de déductibilité des moins-values. Or, dans une période où les titres se sont largement effondrés, si l’on se mettait à taxer les plus-values, il faudrait, parallèlement, admettre la déductibilité des moins-values, ce qui coûterait cher !
M. le rapporteur général a indiqué qu’il s’agissait non pas d’une perte de recettes, mais d’un manque à gagner : en définitive, cela pèse le même poids !
En outre, M. le ministre a mis en question la fiabilité des modalités de calcul. Or ce que nous demandons au travers de notre amendement, c’est bien une évaluation de la dépense fiscale. Si les chiffres annoncés sont exacts, cette dépense est énorme : 12 milliards d’euros en 2008, cela correspond à plus du tiers du produit net de l’impôt sur les sociétés la même année ; en 2009, le rendement de cet impôt s’est effondré… La crise a bon dos, mais les niches fiscales, très importantes en matière d’impôt sur les sociétés, jouent leur rôle !
À cet égard, je maintiens, monsieur le rapporteur général, qu’en Allemagne le taux de l’impôt sur les sociétés diffère selon que les bénéfices sont ou non réinvestis.
Cela étant, notre amendement n’a pas pour objet d’obtenir des justifications de votre part pour ce qui s’est passé lors de l’élaboration du collectif budgétaire de 2004. Certes, M. Copé était alors ministre délégué du budget et à la réforme de l’État, mais il ne parlait pas encore à l’époque, comme il le fait volontiers aujourd’hui, de « coproduction législative ». Votre amendement avait été sous-amendé par le Gouvernement pour lisser les effets de son dispositif dans le temps. Nous ne contestons pas que votre préoccupation était de maintenir l’attractivité de notre pays et d’éviter que les grands groupes n’implantent leur siège hors de nos frontières, avec les conséquences sur l’emploi que cela implique. Il est également exact que, en contrepartie de ce régime fiscal, une taxe exceptionnelle avait été instaurée, qui a rapporté 1, 4 milliard d’euros. Cependant, si l’on rapporte ce chiffre à celui de 20 milliards d’euros, le compte n’y est pas !
Il s’agit pour nous de soulever la question de la légitimité de cette niche fiscale. Nous proposons non pas d’abroger le dispositif actuel, mais de contenir la dépense fiscale afférente, en portant la quote-part représentative de frais et charges à incorporer dans les résultats soumis à l’impôt sur les sociétés de 5 % à 20 %, ce qui correspondrait à un taux d’impôt sur les sociétés de quelque 6, 8 %. Ce n’est tout de même pas démesuré !
Par ailleurs, nous proposons d’allonger la durée de détention des titres ouvrant le bénéfice de cette mesure d’exonération, en la faisant passer à cinq ans, afin de ne pas favoriser les opérations ne visant qu’à réaliser des plus-values rapides.
Comme le souligne souvent M. le président de la commission des finances, le groupe de travail appelé « G 24 », qui réunit des députés et des sénateurs avant chaque G 20, a condamné avec force le diktat du court terme. Notre amendement ne fait que reprendre cette position. D’ailleurs, il répond parfaitement au contexte actuel, dans la mesure où il prévoit également de ne plus faire bénéficier de ce régime fiscal les plus-values afférentes à des titres de sociétés constituées ou établies dans un territoire non coopératif ou à fiscalité privilégiée. On nous a affirmé que le dernier G 20 avait permis de grandes avancées en matière de lutte contre les paradis fiscaux, et des conventions ont été signées depuis sur ce thème. Monsieur le ministre, notre amendement s’inscrit donc bien dans le droit fil des décisions qui ont été prises lors du dernier G 20.
Certes, un différend nous oppose peut-être sur les chiffres, mais évaluons le coût de cette niche fiscale ! Nous ne demandons pas autre chose ! Je n’ai pas trouvé les chiffres que j’ai cités dans le magazine Marianne, mais sous la plume du président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, dont on peut penser qu’il dispose d’une administration aussi compétente et efficace que celle du Sénat ! Il n’a rien inventé !
En conclusion, j’estime que, dans ce contexte, notre amendement se justifie pleinement.
Notre amendement s’inscrit tout à fait dans le débat que nous avons eu sur la politique de classe que vous menez – vous me connaissez suffisamment, monsieur le rapporteur général, pour savoir qu’il ne s’agit nullement là d’une attaque personnelle.
En ce qui concerne le « manque à gagner » évoqué par M. le ministre, je souligne que le taux d’imposition des plus-values à long terme est tout de même passé de 19 % à 15 %, puis à 8 % ! La perte de recettes est donc très importante, alors que, en 2004, le ministre chargé du budget de l’époque, M. Copé, annonçait que cette mesure ne coûterait pas plus de 1 milliard d’euros. Aujourd’hui, nous en sommes à 20, 5 milliards d’euros… Je veux bien croire que ce chiffre est exagéré, mais l’écart par rapport à la prévision initiale est néanmoins très élevé ! Cela participe de l’explosion des dépenses fiscales.
Mais ce qui m’inquiète le plus, c’est que cette déperdition continuelle de recettes finit par vider les caisses et justifier votre politique : la révision générale des politiques publiques, la réduction des effectifs dans la fonction publique, l’assèchement des ressources des collectivités, dont la suppression de la taxe professionnelle constitue le plus récent épisode !
Si notre groupe dépose ce type d’amendements, c’est précisément pour accroître les recettes de l’État afin qu’il puisse être en mesure de mener une politique plus solidaire.
Dans l’immédiat, nous aimerions obtenir des explications sur la différence entre le milliard d’euros annoncé par M. Copé et les 20, 5 milliards d’euros que coûte effectivement la mesure aujourd’hui !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° I-305, présenté par M. Rebsamen, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 235 ter ZA du code général des impôts, il est inséré un article 235 ter ZB ainsi rédigé :
« Art. 235 ter ZB - Les personnes morales sont assujetties, dans les conditions prévues aux II à V de l'article 235 ter ZA, à une contribution exceptionnelle de solidarité égale à une fraction de l'impôt sur les sociétés calculé sur leurs résultats imposables aux taux mentionnés au 1 de l'article 219 du code général des impôts quand ceux-ci font apparaitre des bénéfices supérieur de 10 % à ceux de l'exercice précédent.
« Cette fraction est égale à 5 % pour les exercices clos ou la période d'imposition arrêtée entre le 1er janvier 2010 et le 31 décembre 2011 inclus. Elle est réduite à 2, 5 % pour les exercices clos ou la période d'imposition arrêtée entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2012 inclus.
« Sont exonérées les personnes morales ayant réalisé un chiffre d'affaires de moins de 50 millions d'euros et qui occupent moins de 250 salariés. Le chiffre d'affaires à prendre en compte s'entend du chiffre d'affaire réalisé par l'entreprise au cours de l'exercice ou la période d'imposition, ramené à douze mois le cas échéant et, pour la société mère d'un groupe mentionné à l'article 223 A, de la somme des chiffres d'affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe. Le capital des sociétés, entièrement libéré, doit être détenu de manière continue, pour 75 % au moins, par des personnes physiques ou par une société répondant aux même conditions dont le capital est détenu pour 75 % au moins par des personnes physiques.
« Pour la détermination de ce pourcentage, les participations des sociétés de capital risque, des fonds communs de placements à risques, des sociétés de développement régional et des sociétés financières d'innovation ne sont pas prises en compte à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au sens du 1 bis de l'article 39 terdecies du Code général des impôts entre la société en cause et ces dernières sociétés ou ces fonds. »
La parole est à M. Bernard Angels.
Cet amendement vise à instituer une contribution exceptionnelle de solidarité à compter du 1er janvier 2010, et cela pour une durée de trois ans. Je rappelle que cette mesure figurait dans la proposition de loi que M. Rebsamen a présentée voilà quelque temps.
Une telle contribution temporaire, qui avait déjà été mise en place par le gouvernement Jospin en novembre 1997, concernerait les seules personnes morales assujetties de plein droit ou sur option à l’impôt sur les sociétés, dans les conditions du droit commun, et ayant dégagé des bénéfices au moins supérieurs de 10 % à ceux de l’année précédente.
Les petites et moyennes entreprises – c’est-à-dire, selon la définition communautaire, celles qui emploient moins de 250 personnes et dont le chiffre d’affaires n’excède pas 50 millions d’euros – seraient exonérées de cette contribution temporaire de solidarité, qui serait assise sur la totalité de la cotisation brute d’impôt sur les sociétés, à raison des différents résultats imposables de l’exercice.
En effet, les grandes entreprises largement bénéficiaires doivent prioritairement, dans un contexte de crise, concourir davantage à la solidarité nationale, en particulier lorsqu’elles ont développé une politique d’optimisation des profits au bénéfice des actionnaires.
À titre d’exemple, GDF-Suez, par la voix de son directeur général, avoue avoir dépassé tous ses objectifs pour 2008, alors que ces profits excessifs ont été obtenus au moyen d’une politique de prix supportée par les consommateurs, pour lesquels la baisse de 10 % du tarif du gaz, après la saison hivernale, est intervenue trop tard pour permettre un véritable gain de pouvoir d’achat.
La commission est évidemment hostile à cet amendement purement idéologique.
Parce que vous n’en présentez pas, vous, des amendements idéologiques ?
Je ne critique pas les idéologies en tant que telles ! Je suis même satisfait de vous voir revenir à vos vieux fondamentaux ; cela me paraît être plutôt un facteur de clarification…
En tout état de cause, la disposition présentée figurait effectivement dans la proposition de loi de M. Rebsamen de mai dernier. Le Sénat l’ayant alors rejetée, j’appelle nos collègues à confirmer cette position.
Bien évidemment, le Gouvernement ne peut accepter cet amendement.
Je souligne que les bénéfices des entreprises sont loin de connaître une croissance exponentielle ; bien au contraire, comme en témoigne la baisse considérable du produit de l’impôt sur les sociétés : 30 milliards d’euros de recettes en moins en 2009 !
Laissons donc les entreprises reconstituer leurs bénéfices. Elles apporteront alors leur contribution par le jeu normal de l’impôt sur les sociétés, dont j’espère que les recettes vont se redresser le plus vite possible, pour revenir à leur niveau d’avant la crise.
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à cette disposition, dont la mise en œuvre serait très néfaste sur le plan économique et pour le développement du pays.
Je souhaite saluer la persévérance de notre collègue François Rebsamen, qui est à l’origine de cet amendement, ainsi que de l’amendement n° I-302, visant au partage des profits.
M. le rapporteur général qualifie notre proposition d’ « idéologique ». Mais quand le Président Sarkozy affirme, dans son discours prononcé à Nice en septembre dernier, que les profits ont atteint des niveaux souvent inadmissibles, que les comportements spéculatifs ont contribué à la dégénérescence du modèle capitaliste et qu’il faut aujourd’hui davantage de régulation et un meilleur partage du gâteau, est-ce de l’idéologie ? Telle était, en résumé, la teneur de ses propos, qu’il a d’ailleurs confirmés à plusieurs reprises depuis.
Si c’est là de l’idéologie, il faut essayer de la mettre en application, à moins bien sûr qu’il ne s’agisse de propos n’engageant que ceux qui les écoutent et ne devant déboucher sur aucune mesure concrète…
En tout cas, pour notre part, nous n’avons pas attendu ce discours tout à fait nouveau de M. Sarkozy pour affirmer, depuis de nombreuses années, que la régulation doit être renforcée et que les profits doivent être plus équitablement répartis.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° I-194 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 235 ter ZB du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. 235 ter ZB. - À compter du 1er janvier 2010, lorsque le bénéfice imposable est, au titre de l'année considérée, supérieur de plus de 10 % au bénéfice de l'année précédente, les sociétés se livrant à titre principal à des opérations de mise à la consommation sur le marché intérieur de produits pétroliers et assimilés énumérés au tableau B du 1 de l'article 265 du code des douanes, sont assujettis à une contribution égale à 50 % de l'impôt sur les sociétés calculé sur leurs résultats imposables aux taux mentionnés aux I et IV de l'article 219. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
Cet amendement, que nous présentons de façon récurrente, vise à une taxation des bénéfices supplémentaires réalisés par les compagnies pétrolières du fait de l’augmentation du prix du baril de pétrole.
À l’Assemblée nationale, un amendement similaire a été rejeté sans aucune explication. J’espère que nous en obtiendrons une ici au Sénat.
Cette proposition ne devrait pas être traitée à la légère. En effet, les Français peinent de plus en plus à payer leur plein d’essence ainsi que leur facture de gaz, produit dont le prix est indexé sur celui du baril de pétrole. Notons que cette indexation est immédiate en cas de hausse, mais abusivement différée ou même tout simplement inappliquée en cas de baisse.
Récemment, comme le rappelait notre ancien collègue, devenu député, Roland Muzeau, Mme Lagarde s’est félicitée de ce que Total ait réalisé le plus gros bénéfice jamais enregistré par un groupe français. Ce bénéfice s’élevait à 13, 9 milliards d’euros pour l’année 2008, contre 9, 1 milliards d’euros en 2004, 12 milliards d’euros en 2005, 12, 6 milliards d’euros en 2006 et 12, 3 milliards d’euros en 2007 !
Total a profité de la flambée du prix du pétrole, qui s’est établi à 97 dollars le baril en moyenne sur l’année 2008, soit 25 dollars de plus qu’en 2007. Ces prix ont, du reste, atteint un record historique en juillet 2008, de plus de 147 dollars le baril.
Les bénéfices ne risquent donc pas de baisser, d’autant que les politiques mises en œuvre par le Gouvernement ont pour conséquence directe de conforter ceux de grands groupes comme Total. Ainsi, pourquoi créer une taxe carbone quand on parle de plus en plus d’autoriser la circulation de camions de plus de soixante tonnes et que l’opérateur public de transport ferroviaire supprime une grande partie de son activité fret ?
La même observation vaut quand les politiques urbaines, soumises à la spéculation foncière et immobilière, conduisent à l’exclusion des ménages les plus modestes du centre des agglomérations, contraignant ceux-ci, de fait, à recourir à des modes de transport individuels, plus coûteux pour eux-mêmes comme pour la collectivité.
M. Thierry Foucaud. Dans ces conditions, il n’est pas juste que nos concitoyens paient pour les erreurs de l’État. Il nous paraît cohérent de taxer celles et ceux qui tirent profit de ces politiques antagoniques et non conformes aux objectifs fixés en matière de développement durable.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.
L'amendement n° I-344, présenté par M. Rebsamen, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 235 ter ZB du code général des impôts est ainsi rétabli :
« Art. 235 ter ZB. - À compter du 1er janvier 2010, lorsque leur bénéfice imposable déterminé conformément à l'article 209 est, au titre de l'année considérée, supérieur de plus de 10 % au bénéfice de l'année précédente, les sociétés dont l'objet principal est d'effectuer la première transformation du pétrole brut ou de distribuer les carburants issus de cette transformation sont assujetties à une contribution égale à 40 % de l'impôt sur les sociétés calculé sur leurs résultats imposables aux taux mentionnés aux I et V de l'article 219. »
II. - Après l'article 39 ter C du même code, il est inséré un article 39 ter D ainsi rédigé :
« Art. 39 ter D. - 1. Les sociétés dont l'objet principal est d'effectuer la première transformation du pétrole brut ou de distribuer les carburants issus de cette transformation sont autorisées à déduire de leur contribution à l'impôt sur les sociétés, dans la limite de 25 % de cette contribution, une provision pour le développement de la recherche dans les énergies renouvelables ainsi que pour les moyens modaux alternatifs au transport routier.
« 2. Les bénéfices affectés à cette provision à la clôture de chaque exercice doivent être employés, dans un délai de deux ans à partir de cette date, à des travaux de recherche réalisés pour le développement des énergies renouvelables.
« 3. À l'expiration du délai de deux ans, les sommes non utilisées dans le cadre prévu au 2 sont rapportées au bénéfice imposable de l'exercice en cours. »
La parole est à M. Bernard Angels.
Cet amendement relève du même esprit que le précédent. Je fais miens sans réserves les arguments avancés par M. Foucaud.
À un amendement récurrent, j’apporte une réponse récurrente : défavorable.
La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote sur l’amendement n° I-194 rectifié.
Nous venons d’examiner une série d’amendements qui, tous, ont le même objet : ajouter de nouveaux impôts aux impôts existants en fonction de la conjoncture.
Mais c’est oublier deux choses, mes chers collègues !
Tout d’abord, dans le contexte actuel de développement de la mondialisation
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame
… l’adoption de telles dispositions inciterait les entreprises visées à établir leur siège hors de nos frontières.
Par conséquent, de même que certains impôts ont poussé à la délocalisation des unités de production, …
… l’adoption de certaines dispositions pousserait à la délocalisation des bénéfices !
Tout cela ne me semble pas de bonne politique !
En revanche, comme l’a souligné M. le rapporteur général, il est vrai que les fonds propres des entreprises de notre pays sont insuffisants par rapport à ceux de leurs concurrentes. Nous devons donc inciter nos entreprises à renforcer leurs fonds propres, car c’est ainsi qu’elles pourront résister à la concurrence internationale.
M. Fourcade oublie une chose : nos comptes publics sont en déficit. Si les impôts ne rentrent plus, comment réduira-t-on ce déficit ? Telle est la question que nous posons.
On nous dit que si nous n’allégeons pas la fiscalité pesant sur les entreprises, celles-ci risquent d’établir leurs sièges sociaux hors de nos frontières, par exemple en Roumanie ou en Bulgarie, si elles sont moins imposées dans ces pays. Certes, mais que fait l’UMP, à l’échelon européen, pour obtenir une harmonisation de la fiscalité ? Pourquoi n’agissez-vous pas sur ce plan, alors que vous appartenez au groupe majoritaire au Parlement européen et que la France est un pays écouté ?
Cela permettrait d’éviter les délocalisations fiscales. Certains semblent dire que nous n’avons pas de marge de manœuvre, comme si, à un certain niveau, nous ne pouvions pas prendre les décisions politiques qui s’imposent ! Affirmer, comme vous le faites, que nous sommes contraints de moins imposer les entreprises, sinon elles se délocaliseront fiscalement et le déficit s’en trouvera aggravé, évite de poser la question fondamentale de la mise en œuvre d’une fiscalité européenne.
Évidemment, cela arrange la majorité de nous présenter comme des partisans d’un alourdissement de la fiscalité… Mais ce que nous affirmons, au travers de cette série d’amendements, c’est que certaines dépenses fiscales ne sont pas forcément justifiées et doivent donc être réexaminées, avant de les raboter, voire de les supprimer, si elles ne sont pas efficaces économiquement ni utiles socialement.
Par ailleurs, monsieur Fourcade, nous prônons nous aussi un renforcement des fonds propres de nos entreprises, parce que nous sommes bien conscients qu’ils sont actuellement insuffisants et que cela fragilise notre tissu économique.
Quant à l’impôt sur les sociétés, j’aimerais que nous menions un travail de fond sur ce sujet. Vous prétendez qu’il doit être réduit pour améliorer notre compétitivité, insuffisante notamment face à nos partenaires européens, mais vous ne vous intéressez qu’à son taux, sans prendre en considération son assiette. Or nous savons très bien que l’assiette de l’impôt sur les sociétés est rognée de toutes parts : si l’on prend en compte cet élément pour établir des comparaisons équitables, il apparaît que nous ne sommes pas forcément les moins concurrentiels.
Par conséquent, cessez de nous envoyer à la figure l’argument de la compétitivité et de nous présenter comme des tenants sans nuance de l’alourdissement de la fiscalité. L’Union européenne est malheureusement en panne depuis longtemps, mais, voilà quelques années, il avait été affirmé qu’une telle harmonisation fiscale devait être un objectif prioritaire, même si l’unanimité est requise, car il ne peut y avoir de marché unique sans une fiscalité coordonnée, notamment pour les entreprises.
Mme Nicole Bricq. Si l’on est vraiment européen, il faut s’en tenir à cette position. L’Irlande, qui a pratiqué un dumping effrayant en matière de fiscalité des entreprises, serait aujourd'hui à la dérive si elle n’était pas dans l’Union européenne.
M. Jean Desessard applaudit.
Nous mènerons, naturellement, la réflexion demandée par Mme Bricq. Il est vrai que notre fiscalité est totalement illisible, puisque si notre barème compte parmi les plus élevés, les contributions effectivement versées sont sans doute parmi les plus faibles.
J’ai posé des questions tout à l’heure, mais on ne me répond pas ! Quand le prix du baril augmente, les prix augmentent à la pompe pour les automobilistes, mais la corrélation ne fonctionne pas en sens inverse : pourquoi ? Tous les Français nous posent cette question de bon sens !
M. Éric Woerth, ministre. Bien entendu, quand le prix du baril baisse, le prix à la pompe baisse également.
M. Jean Desessard s’exclame.
C’est la réalité, telle que nous avons pu la constater depuis un an ! Rendez-vous dans votre station-service préférée, et vous verrez que le prix de l’essence a baissé par rapport à l’année dernière, à la suite de la baisse du prix du baril : des conventions en ce sens ont été signées entre les compagnies pétrolières et le ministère de l’économie.
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je voudrais tout de même rappeler que, dans le monde pétrolier international, la plupart des compagnies sont anglo-saxonnes, certaines sont aujourd’hui chinoises, mais une seule a son siège à Paris : Total. Peut-être seriez-vous heureux qu’il n’y en ait plus du tout !
Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
À l’échelle mondiale, Total n’est pas, contrairement à ce que vous dites, une très grande société pétrolière ; elle est plutôt de taille moyenne. Nous avons tout intérêt, sur les plans économique, géopolitique et politique, à conforter cette société, car c’est un instrument de la puissance de la France dans le monde ! Vous devriez en être davantage conscients !
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Outre les considérations planétaires que vient d’exposer M. le rapporteur général, Total détient de très nombreuses participations industrielles en France, qui sont sources d’emplois. Évitons donc de tirer sur cette société.
Applaudissementssur les travées de l’UMP.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° I-278, présenté par M. P. Dominati, Mlle Joissains et M. Revet, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L'article 244 quater B du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le e) du II est ainsi rédigé :
« e) Les frais de prise et de maintenance de brevets, marques, dessins et modèles, droits d'auteurs et droits voisins ; »
2° Le e bis) du II est ainsi rédigé :
« e bis) Les frais de défense de brevets, marques, dessins et modèles, droits d'auteur et droits voisins ; »
II. La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati
Je voudrais profiter de cette occasion pour rappeler à certains de nos collègues que si, en matière de fiscalité, les autres pays européens ne nous écoutent pas, c’est tout simplement parce que la France détient le record des prélèvements obligatoires, à l’échelon tant de l’Union européenne que du G 20.
Cet amendement a pour objet d’étendre le champ du crédit d’impôt recherche, au-delà des dépenses liées à la prise de brevets, déjà prises en compte, aux frais exposés pour l’obtention d’autres titres de propriété intellectuelle concernant les marques, les dessins, les logos ou les modèles. Une telle mesure serait notamment favorable aux PME, qui ne déposent qu’environ 13 % des brevets.
La commission, qui trouve cette initiative intéressante mais craint que sa mise en œuvre ne soit coûteuse, s’en remet à l’avis du Gouvernement.
Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.
Tout d’abord, il importe de bien définir les choses, surtout pour un dispositif d’une telle portée. En effet, toutes les entreprises sont concernées par la protection des marques ou des innovations. Il faut donc s’en tenir, à mon sens, à la prise en compte des investissements en matière de recherche, au sens que l’OCDE donne à ce terme, l’innovation relevant, à l’échelon international, d’une autre définition. Nous ne souhaitons pas aller au-delà, car le crédit d’impôt recherche coûte déjà quelque 3, 6 milliards d’euros. Nous espérons récupérer cette somme par le biais de la croissance, qui permettra de développer l’activité, et donc d’accroître la recette fiscale, mais, le coût direct du dispositif étant très élevé, je ne souhaite pas élargir son périmètre d’application.
Peut-être l’amendement de M. Dominati est-il un peu large, mais je souhaiterais tout de même que le Gouvernement examine la possibilité d’ouvrir un peu les facultés de déduction.
Il y a quelque temps, je visitais le centre anticancéreux de Clermont-Ferrand, qui est, en fait, un organisme privé, même s’il est accolé au CHU. Ses responsables m’ont expliqué que de nombreuses découvertes extrêmement pointues y avaient été faites, mais lorsque je leur ai demandé si des brevets avaient été pris, ils m’ont répondu que non, parce que c’était trop lourd et trop compliqué !
Je visitais, il y a trois ou quatre ans, à Clermont-Ferrand, le centre de recherche de Michelin, qui est aussi une entreprise qu’on pourrait haïr puisqu’elle réussit !
Sourires
Dans ces conditions, monsieur le ministre, sans aller jusqu’à viser les frais de défense de brevets, parce que cela pourrait peut-être mener trop loin, il me semble qu’au moins les frais de prise de brevets pourraient être déductibles.
C’est le cas ! Ils sont déjà pris en compte, M. Dominati veut ajouter les frais de prise et de maintenance des marques, dessins et modèles !
Je n’avais pas compris cela, je n’insiste donc pas ! Pardonnez-moi d’avoir fait perdre son temps au Sénat en abordant une fausse question qui n’a pas lieu d’être posée puisqu’elle est déjà réglée.
Vous n’avez pas fait perdre de temps au Sénat, monsieur Charasse, car vous avez exposé les difficultés liées au dépôt d’un brevet, qui est, pour beaucoup de PME, l’étape ultime. Une extension du champ de la défiscalisation à la protection des marques, des dessins ou des modèles leur serait bénéfique. On m’objecte qu’une telle mesure serait très onéreuse : je suis prêt à entendre cet argument budgétaire, mais j’aurais aimé que le Gouvernement précise ce point, car il s’agit là d’un domaine essentiel pour les PME.
Je n’ai pas la réponse à cette question, car le champ de l’extension du dispositif proposée est extrêmement large et un peu flou. Une entreprise du secteur textile, par exemple, refait tous les ans des dessins et renouvelle ses créations : est-ce de la recherche ou, plus simplement, l’objet même de l’activité de l’entreprise ?
Le dessin des cravates entre-t-il dans le champ du crédit d’impôt recherche ?
Non, car il s’agit là de l’objet même de l’activité, et non de recherche au sens de l’OCDE, qui a défini un périmètre précis. Nous nous y tenons, car sinon où s’arrêtera-t-on ? Toute entreprise doit innover, si elle ne veut pas mourir, mais les dépenses engagées dans cette perspective sont déductibles dans le cadre fiscal normal, comme les autres charges. Le crédit d’impôt recherche est un dispositif qui permet d’aller plus loin pour favoriser le développement de la recherche sur le territoire français, dans l’espoir que cette recherche aura un prolongement industriel, de préférence sur notre territoire également.
On ne peut pas demander indéfiniment de l’argent à l’État !
Au fond, le véritable problème est que la production supporte autant de prélèvements obligatoires. Compte tenu des archaïsmes de notre système fiscal, le crédit d’impôt recherche est sans doute la meilleure réponse possible, mais l’idéal serait en fait d’alléger toutes les charges.
M. Jean Desessard s’exclame.
Expliquons à nos concitoyens que ce sont toujours eux, finalement, qui paient, sous une forme ou sous une autre. La contribution économique territoriale, par exemple, sera répercutée dans le prix des produits que les consommateurs achèteront. Ayons cette idée bien présente à l’esprit et un jour, peut-être, nous pourrons débattre autrement de ce que pourrait être une vraie réforme de nos prélèvements obligatoires !
L’amendement de M. Dominati me pose un problème.
Les dépenses de recherche représentent une immobilisation, que le crédit d’impôt recherche permet de rendre déductible. Or cet amendement vise, à mon sens, des dépenses de fonctionnement, qui sont déjà déductibles dans le cadre fiscal ordinaire.
Il faudrait étudier précisément où se situe la frontière entre dépenses de fonctionnement et immobilisations, mais c’est là un travail de commission. Dans l’immédiat, je suggère à notre collègue de retirer son amendement.
L’amendement n° I-278 est retiré.
L'amendement n° I-149 rectifié, présenté par MM. César et Alduy, Mme Bruguière, MM. Doublet et Dufaut, Mmes Dumas et Goy-Chavent, M. Grignon, Mlle Joissains, Mme Lamure, MM. Lefèvre, Pointereau, Revet, Bailly, Beaumont, Chauveau, B. Fournier, Gilles, Huré, Laurent, Leroy et Trillard, Mmes Des Esgaulx, Férat et Sittler et M. Pintat, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 244 quater H du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le IV est ainsi rédigé :
« Les dépenses éligibles sont les dépenses exposées pendant quarante-huit mois à la suite du recrutement de la personne mentionnée au III ou la signature de la convention prévue à l’article L. 122-7 du code du service national. » ;
2° À la première phrase du V, les mots : « vingt-quatre mois » sont remplacés par les mots : « quarante-huit mois ».
II. - Le I n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
III. - La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Gérard César.
Aux termes de l'article 244 quater H du code général des impôts, les petites et moyennes entreprises peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt lorsqu'elles exposent certaines dépenses de prospection commerciale en vue de développer leur exportations, à condition de recruter une personne affectée à cette tâche ou un volontaire international en entreprise – un VIE.
Ce crédit d’impôt est plafonné à 40 000 euros par entreprise. Son bénéfice est soumis à de multiples conditions, parmi lesquelles une durée d'éligibilité des dépenses de vingt-quatre mois au maximum, à compter de l'embauche.
Les démarches de prospection commerciale à l'étranger sont multiples et difficiles : elles vont du simple contact avec des importateurs à une étude de marché, en passant par l'organisation de salons. Généralement, l'appréhension et la conquête d'un nouveau marché réclament beaucoup de temps, de patience et de persévérance, notamment pour comprendre les besoins des acheteurs locaux. Une période de vingt-quatre mois est bien souvent trop courte pour réaliser de telles opérations.
Dans ces conditions, faute de dispositif adéquat, les entreprises prospectent mal, ou pas du tout, les nouveaux marchés. Il est donc proposé de prolonger jusqu’à quarante-huit mois la durée d’éligibilité des dépenses de prospection commerciale au dispositif du crédit d'impôt export.
Je profite de cette occasion pour souligner l’action très importante de l’agence UBIFRANCE, qui est placée sous la tutelle du ministère des finances, pour soutenir le recrutement des VIE. Ce dispositif, outre qu’il ouvre à des jeunes une expérience à l’étranger, permet aux entreprises de conquérir ou de consolider des positions à l’exportation, ce dont la France a bien besoin. Je signale qu’UBIFRANCE a recruté 6 000 VIE l’an dernier, et que l’objectif est fixé à 10 000 pour cette année.
L'amendement n° I-150 rectifié, présenté par MM. César et Alduy, Mme Bruguière, MM. Doublet et Dufaut, Mmes Dumas et Goy-Chavent, M. Grignon, Mlle Joissains, Mme Lamure, MM. Lefèvre, Pointereau, Revet, Bailly, Beaumont, Chauveau, B. Fournier, Gilles, Huré, Laurent, Leroy et Trillard, Mmes Des Esgaulx, Férat et Sittler et M. Pintat, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le f du II de l'article 244 quater H du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Les dépenses liées aux activités de conseil fournies par des consultants. »
II. - Le I n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Gérard César.
Cet amendement a également trait au recrutement d'une personne affectée au développement des exportations ou au recours à un volontaire international en entreprise. Il est ici proposé de rendre éligibles au crédit d'impôt export les dépenses liées aux services de conseil fournis par tous types de consultants.
L'amendement n° I-151 rectifié, présenté par MM. César et Alduy, Mme Bruguière, MM. Doublet et Dufaut, Mmes Dumas et Goy-Chavent, M. Grignon, Mlle Joissains, Mme Lamure, MM. Lefèvre, Pointereau, Revet, Bailly, Beaumont, Chauveau, B. Fournier, Gilles, Huré, Laurent, Leroy et Trillard, Mmes Des Esgaulx, Férat et Sittler et M. Pintat, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le g) du II de l'article 244 quater H du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les dépenses liées à la souscription d'une assurance crédit à l'export. »
II. - Le I n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Gérard César.
L'article 244 quater H du code général des impôts établit la liste des dépenses éligibles au crédit d'impôt export, sur laquelle ne figurent pas les dépenses liées à la souscription d'une assurance crédit à l’export.
Or les entreprises peuvent rencontrer des difficultés à l’exportation. Il est donc important qu’elles puissent souscrire des assurances crédit, mais le coût de celles-ci est très élevé, notamment lorsque le cocontractant se situe, comme c’est souvent le cas, dans un pays en voie de développement.
En conséquence, nous proposons l’inscription des dépenses liées à la souscription d'une assurance crédit à l'export sur la liste des dépenses éligibles au crédit d'impôt export.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements n° I-149 rectifié, I-150 rectifié et I-151 rectifié ?
Je donnerai un avis global sur les trois amendements.
Ces dispositifs visant à valoriser les efforts consentis par les entreprises à l’exportation sont intéressants, mais est-il bien opportun d’accroître les dépenses fiscales ?
Je fais miennes les réponses de Mme Bricq.
Quel que soit l’intérêt des mesures présentées, je ne pense pas, compte tenu du contexte actuel et sous réserve de l’avis du Gouvernement, qu’il soit opportun d’étendre le champ de régimes exceptionnels.
En ce qui concerne le dispositif des VIE, est-il possible d’évaluer son effet sur le développement des exportations ? Existe-t-il un indicateur de performance permettant de confirmer son intérêt ? La présence de VIE dans tel ou tel pays a-t-elle une influence mesurable sur le développement de nos exportations ?
J’interroge le Gouvernement sur ce point, car, avant de doubler la durée d’éligibilité des dépenses visées au dispositif, il convient de se poser la question de l’efficacité de la mesure existante.
Connaissant le profond attachement de notre collègue Gérard César au développement de nos exportations, je m’en veux de lui faire une réponse qui, à ce stade, n’est pas très ouverte, mais j’espère qu’il comprendra dans quel contexte elle s’inscrit et qu’il acceptera, si toutefois M. le ministre partage mon point de vue, de retirer ses amendements.
Monsieur César, je connais votre intérêt pour tout ce qui concerne le développement de nos exportations, mais je fais miennes les remarques de M. le rapporteur général.
Il s’agit là aussi d’une niche fiscale, qui, comme toutes les autres, a son intérêt. En l’occurrence, afin de favoriser les exportations, les entreprises se sont vu accorder la faculté de déduire jusqu’à 50 % des dépenses de prospection commerciale, sous réserve du respect des conditions rappelées par M. César.
Je comprends votre envie d’aller plus loin, monsieur le sénateur, néanmoins nous pensons que les temps ne sont pas à l’extension de dispositifs qui fonctionnent de manière satisfaisante. Voilà pourquoi j’émets un avis défavorable sur vos trois amendements.
Je ferai trois brèves observations.
En premier lieu, nous ne pouvons pas à la fois critiquer avec force les niches fiscales et vouloir les multiplier ou les étendre.
En deuxième lieu, notre balance commerciale ne cesse de se détériorer.
À cet égard, si aide publique il doit y avoir, il est au moins aussi important qu’elle serve à développer la production en France pour lutter contre les importations qu’à favoriser nos exportations.
En effet, bien souvent – et ce sera ma troisième observation –, lorsque l’on examine ce qui se passe dans d’autres pays, on en conclut très vite qu’il vaut mieux produire sur place pour conquérir le marché local.
Je mets en garde contre l’imagination débordante de la direction des relations économiques extérieures…
Il est vrai, monsieur le rapporteur général, qu’il est très difficile de quantifier les résultats de l’action des VIE à l’étranger, mais s’ils n’existaient pas, beaucoup d’entreprises souffriraient de leur absence. C’est pourquoi UBIFRANCE en recrutera 10 000 l’année prochaine. En outre, le dispositif des VIE permet de former des jeunes, notamment à la pratique des langues étrangères, en particulier de l’anglais.
J’ai proposé de porter la durée d’éligibilité des dépenses de prospection commerciale à quarante-huit mois : peut-être est-ce un peu excessif et aurait-il mieux valu s’en tenir à trente-six mois. Nous en reparlerons sans doute l’année prochaine. Pour l’heure, je retire mes trois amendements.
Les amendements n° I-149 rectifié, I-150 rectifié et I-151 rectifié sont retirés.
L'amendement n° I-304 rectifié, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement doit, dans un délai de six mois, fournir au Parlement un rapport dans lequel il exposera les modalités concrètes de la mise en place d'une taxe assurantielle sur les activités des banques, en fonction du risque qu'elles prennent sur les marchés financiers.
Cette taxe devra être en adéquation avec la proposition d'une taxe assurantielle pour les banques, faite par le président du Fonds monétaire international lors de la réunion du G20 Finances des 24 et 25 septembre 2009.
Le dispositif mis en place ne devra pas prévoir de compensation au moyen d'une baisse de la taxe sur les salaires acquittée par les banques.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Lors de la dernière réunion du G 20 Finances, qui s’est tenue à Saint-Andrews, en Écosse, le directeur général du Fonds monétaire international a proposé la création d’une taxe assurantielle, qu’acquitteraient les banques en fonction des risques qu’elles prennent sur les marchés financiers. Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, lors du même sommet, a jugé cette proposition de M. Strauss-Kahn intéressante, tout en estimant que sa mise en œuvre prendrait du temps.
Je souligne que nous avions présenté ici même un dispositif similaire, le 29 octobre dernier, dans le cadre de notre proposition de résolution européenne portant sur la proposition de directive du 13 juillet 2009 relative aux fonds propres des banques.
Le présent amendement vise à engager le débat, afin que nous puissions déboucher, à court terme, sur la mise en place du dispositif en France, à la condition, bien entendu, que celle-ci ne soit pas compensée par la suppression de la taxe sur les salaires acquittée par les banques, comme le souhaitent certains de nos collègues de la majorité sénatoriale.
En effet, si l’on veut vraiment que les contribuables ne soient plus, en dernier recours, les assureurs du risque systémique pris par les agents bancaires et financiers, il convient de tout mettre en œuvre pour diminuer le risque et, partant, d’obliger les banques à constituer un fonds de réserve mobilisable en cas de crise.
La responsabilité des banques est de financer l’économie réelle. Au regard de la reprise économique espérée, il s’agit même d’une impérieuse nécessité. Or, lors de la crise financière, ce sont les États et les banques centrales – donc les contribuables – qui se sont comportés en assureurs de dernier ressort.
Les activités spéculatives qui représentent un risque systémique doivent être découragées par l’augmentation des exigences de fonds propres conditionnant leur exercice. La réglementation dite de « Bâle II » doit assurer une égalité des conditions de concurrence dans tous les pays représentés au Comité de Bâle. Pour ce faire, les ratios de fonds propres doivent être améliorés, quantitativement et qualitativement. Une assurance sur le risque systémique doit précisément permettre de renforcer l’appréciation des risques, tant qualitative que quantitative.
Il faut en effet que, pour chaque activité, l’autorité de surveillance prudentielle définisse un niveau de risque acceptable sous la forme d’un ratio. Le franchissement d’un certain seuil provoquera une taxation par l’intermédiaire d’une police d’assurance dont les primes alimenteront un fonds public européen de garantie placé sous la responsabilité de l’autorité prudentielle.
Je suggère à Mme Bricq que nous poursuivions l’examen de cet amendement cet après-midi, lorsque viendra en discussion l’amendement n° I-518 de la commission, qui porte sur le même thème.
Si nous poursuivons la discussion, cela va nous mener sans doute au-delà de treize heures. De surcroît, Mme Lagarde sera présente parmi nous cet après-midi.
Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de réserve formulée par la commission ?
Il est en effet souhaitable d’examiner ensemble les deux amendements. En outre, le sujet relève davantage de la compétence de Mme Lagarde. Elle pourra vous donner cet après-midi toutes les explications requises. La proposition de réserve me paraît donc judicieuse.
Je suis d’accord s’il s’agit bien d’une réserve, afin que l’amendement que je présente puisse être examiné en contrepoint de celui de la commission.
La réserve est de droit.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quatorze heures cinquante.